Le robot européen Philae a atterri sur une comète, une première dans l'histoire spatiale, a indiqué l'agence spatiales européenne. Cet atterrissage couronne une mission spatiale lancée il y a plus de vingt ans et un voyage interplanétaire de plus de dix ans du robot en compagnie de la sonde Rosetta.
Le petit robot Philae, qui a quitté mercredi matin la sonde spatiale européenne Rosetta a réussi à se poser sur la comète Tchouri peu après 17h, suscitant la liesse du personnel de l'ESA (agence spatiale européenne). "Nous sommes sur la comète" Tchourioumov-Guérassimenko, "nous sommes très heureux", a déclaré l'ESA. La mission du robot laboratoire est de faire des prélèvements qui donneront des informations sur les origines du système solaire, voire sur l'apparition de l'eau et de la vie sur Terre.
Le robot avait déployé son train d'atterrissage et s'était approché lentement de l'inhospitalière "Tchouri", pour tenter de se poser pour la première fois sur le noyau d'une comète et percer un peu de ses mystères. "Enfin! Je peux étendre mes pattes après plus de dix ans. Le train d'atterrissage est déployé!" avait annoncé le robot dans un tweet de l'Agence spatiale européenne (ESA).
A 500 millions de kilomètres de la Terre
L'enjeu de la mission Rosetta et du robot Philae est de taille. Il s'agit de livrer des informations sur les origines du système solaire, que les comètes peuvent aider à déchiffrer. Elles permettent aussi de mieux comprendre l'apparition de l'eau et de la vie sur Terre. L'aventure semée d'embûches de Philae se passe à plus de 500 millions de km de la Terre. La comète, escortée par Rosetta, filait à 18 km/seconde. Après largage (séparation d'avec la sonde Rosetta), Philae descendait vers elle à la vitesse d'un marcheur (3,5 km/h). "Nous avons de très bonnes nouvelles. Tout se passe bien à bord. La pile de Philae fonctionne bien. Pour le moment, nous avons reçu toutes les données que nous attendions", avait déclaré Philippe Gaudon depuis le centre d'opérations scientifiques et de navigation de Philae à Toulouse alors que Philae exécutait ses 7 heures de chute libre dans l'univers vers la comète après son largage.
La sonde Rosetta a largué le robot Philae ce matin
La séparation de la sonde et de son robot laboratoire a eu lieu à 09H00 GMT (10H00, heure de Paris). Un premier succès qui a suscité exclamations et embrassades dans la salle de contrôle du Centre européen d'opérations spatiales (ESOC), à Darmstadt (Allemagne). "Alea jacta est. Il faut que Philae atterrisse, mais on ne peut plus rien pour lui", a lancé le directeur général de l'Agence spatiale européenne (ESA), Jean-Jacques Dordain. Deux heures environ après le largage, à 20 km de la surface de la comète, la liaison entre Rosetta et Philae a été rétablie comme prévu. "Un moment très important" salué par Paolo Ferri, chef des opérations à l'ESOC, tandis qu'Andrea Accomazzo, directeur de vol de Rosetta, levait le poing en signe de victoire.
Klim Tchourioumov et Svetlana Guérassimenko, les découvreurs de la comète en 1969, devaient assister en direct à l'atterrissage. "J'ai froid au dos depuis que tu m'as quittée mais je suis dans une meilleure position pour te regarder. Envoie moi une carte postale!", a sussuré Rosetta dans un tweet à Philae. C'est chose faite: Philae est parvenu à transmettre une photo de Rosetta. Rosetta a elle aussi pris des images de Philae pendant sa descente, très applaudies dans la salle de conférence de l'ESOC. "Nous voyons l'atterrisseur descendre sur la bonne trajectoire", a commenté Andrea Accomazzo.
Un problème sur le système d'émission de gaz, destiné à aider Philae à ne pas rebondir lorsqu'il touchera le sol de la comète, avait été détecté pendant la nuit mais cela n'a pas empêché les experts de donner le feu vert au largage. Philae, 100 kg sur Terre, ne pèse qu'un gramme dans l'espace. Il a donc été conçu pour être à la fois plaqué au sol par l'émission d'un gaz et s'ancrer en profondeur sur la comète grâce à deux harpons. Il ne va pouvoir finalement que compter sur eux, un handicap que les responsables de la mission minimisent.
Si la décision de lancer l'opération a été prise, "c'est qu'on a suffisamment de marge pour pouvoir y aller", a assuré M. Dordain. Ce "petit problème augmente peut-être la liste des inconnues, mais on a travaillé toute la nuit pour faire en sorte qu'on maîtrise les risques".
Un travail scientifique de deux jours et demi
Le site retenu pour l'atterrissage de Philae est une zone d'environ 1 km2 située sur le petit lobe du noyau de la comète. La comète s'est révélée très peu "coopérative", avec une forme torturée, un relief accidenté et un sol dont la nature reste une inconnue. Rosetta a parcouru 6,5 milliards de km depuis son lancement en 2004 pour rejoindre Tchouri. Si tout se passe comme prévu, le petit robot et ses 10 instruments se mettront immédiatement au travail pour un programme scientifique intensif de deux jours et demi, Philae fonctionnant alors sur ses piles. Au-delà, c'est un second système de batteries, rechargeables par des panneaux solaires, qui prendra la relève. Philae devrait fonctionner jusqu'en mars, condamné à mourir "de chaud" quand la comète se rapprochera du soleil.
Quoi qu'il advienne, la mission "Rosetta est déjà un succès", selon M. Dordain. 80% des enseignements scientifiques viendront de la sonde, mais Philae donnera des informations sur la comète, notamment sur la composition de son sol. L'aventureuse Rosetta continuera à escorter la comète au moins jusqu'à ce qu'elle passe au plus près de l'astre, en août prochain.
Les trois longues jambes de Philae, restées pliées pendant plus de 10 ans, vont-elles se déployer correctement?
"Les prochaines 24 heures vont certainement être les plus difficiles pour nous", a reconnu mardi soir Paolo Ferri, chef des opérations à l'ESOC. Le défi technique n'est pas mince, même si Rosetta a jusqu'ici parfaitement fonctionné, parcourant 6,5 milliards de km depuis son lancement en 2004 pour rejoindre Tchouri, dans un environnement particulièrement rude. Les trois longues jambes de Philae, restées pliées pendant plus de 10 ans, vont-elles se déployer correctement ? Le robot ne va-t-il pas arriver sur une partie trop accidentée d'"Agilkia", la zone d'un km2 choisie pour l'atterrissage par les scientifiques. Car si Agilkia est le secteur le moins risqué, il est loin d'être parfait.

