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Au barrage EDF de Grand'Maison, la corne d'alerte sonne pour les retraites

Le mugissement emplit l'air et puis s'étiole entre les montagne des Grandes Rousses: la corne d'alerte du barrage hydro-électrique EDF de Grand'Maison (Isère), le plus puissant de France, sonne mercredi pour défendre le système actuel de retraite.

"D'habitude, on la déclenche quand il y a un souci, pour prévenir la population. Là, le souci est l'attaque sur le système de retraite par répartition et sur le service public", explique Stéphane Bon-Mardion, venu du Centre d'ingénierie hydraulique d'EDF de Savoie Technolac pour soutenir le piquet de grève.

Depuis mardi, cette centrale qui représente 9% du parc hydraulique exploité par EDF dans le pays a été mise à l'arrêt. Avec des redémarrages ponctuels pour assurer la sécurité du réseau.

Une assemblée générale sur le site, menée par la CGT, majoritaire, reconduit chaque matin le blocage, l'objectif étant a minima de tenir jusqu'à vendredi, jour de présentation du texte de réforme en conseil des ministres et de mobilisation interprofessionnelle nationale, selon les grévistes.

"On est en grève depuis le 5 décembre. On se réinvente avec de nouvelles formes d'action", explique Soraya Lucatelli, du comité exécutif fédéral CGT Mines Energies, montée elle aussi à Vaujany.

Pas question de "mettre les usagers dans le noir", surtout en hiver. Mais en faisant baisser la puissance injectée sur le réseau, "ça a un impact sur l'économie, les industriels et on espère que ce gouvernement autiste va enfin nous entendre", ajoute la syndicaliste.

"On agit avec les moyens qu'on a quand la pseudo-négociation n'a pas lieu. Le gouvernement ne nous écoute pas et pourtant, des propositions, on en a! ", assure Mme Lucatelli.

Auprès du brasero, entre la banderole "EDF en grève" et le stock de palettes à brûler, ce sont surtout les agents EDF venus d'autres sites qui prennent la parole.

- "cash à outrance" -

Christelle Peybernès, spécialiste barrages et galerie, "peut faire grève": "par mon statut et mon salaire, je n'ai pas de problème de fin de mois, alors je me bats pour que tout le monde ait la même chance que moi".

Dans son entourage, elle compte des paysans et des maraîchers "qui ne peuvent pas perdre une journée de travail" et à qui le "gouvernement fait croire à un minimum garanti à 1.000 euros. Mais il est sous conditions, c'est de la désinformation !"

Au-delà des retraites, les grévistes parlent aussi du projet gouvernemental de privatiser la gestion des barrages qui arrivent au bout de leur concession en 2020.

Le nom de Marcel Paul, syndicaliste, communiste, résistant et fondateur d'EDF en 1946, est invoqué, lui qui instaura la péréquation tarifaire, assurant le même prix pour chaque usager quel que soit l'endroit où il habite sur le territoire.

Cette "idée géniale" serait mise à mal si l'hydroélectricité est vendue à des opérateurs privés, assure M. Bon-Mardion. "Qu'est-ce qui les empêchera de spéculer ?", renchérit Lionel Chanut, délégué CGT EDF Production Hydro Alpes. "Ils voudront faire du cash à outrance et pour une concession de 30 ans, la tentation sera de ne pas entretenir les ouvrages", poursuit M. Bon-Mardion.

Les barrages et les usines font la fierté des agents, surtout dans un site comme Grand'Maison, "capable de mettre dans le réseau l'équivalent d'une centrale nucléaire en quelques minutes", avec ses 1.800 megawatts de puissance de pointe, selon M. Chanut.

Le site est une station de transfert d'énergie par pompage (STEP): la retenue d'amont est regarnie régulièrement avec l'eau du barrage aval pour pouvoir alimenter les turbines n'importe quand.

"On entre dans les jours les plus critiques de consommation avec le froid: c'est là où l'hydraulique prend tout son sens", souligne M. Chanut, qui s'enorgueillit de "cette obligation de service public".

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