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Claude Lévy, chevalier blanc CGT des femmes de chambre

Collier poivre et sel et verbe haut, Claude Lévy n'est jamais loin quand des femmes de chambre, gouvernantes ou plongeurs manifestent devant un palace parisien: le militant cégétiste bat le pavé depuis près de 30 ans pour les défendre.

Sa dernière victoire? L'accord intervenu aux hôtels Campanile et Première Classe du Pont de Suresnes: après 32 jours de grève, femmes de chambre et lingères ont obtenu des hausses de rémunération substantielles et une augmentation de leur temps de travail.

Alors quand la secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes-hommes Marlène Schiappa annonce qu'elle va inviter "les fédérations et principales agences qui emploient ces femmes" autour d'une table mercredi, il fulmine. "Qui est-ce qu'elle reçoit comme interlocuteur pour la CGT? La fédération des ports et docks qui soutient le syndicat de la propreté qui casse nos grèves!"

Les relations sont loin d'être au beau fixe entre le secteur de la propreté CGT, affilié à la Fédération des ports et docks, et le syndicat CGT des Hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE) qu'anime Claude Lévy: les uns et les autres sont même venus aux mains en 2014 lors des grandes grèves du Park Hyatt Vendôme.

"On va manifester le 3 juillet devant le ministère si on est pas reçus", assène-t-il.

Né en 2001, le CGT-HPE qu'il anime revendique 963 adhérents dans une cinquantaine d'hôtels de Paris et de la région parisienne. Il est de toutes les grandes luttes de ces dernières années: Concorde Montparnasse (2012), Campanile et Première Classe de Suresnes (2013), Park Hyatt Vendôme ...

- Payées à la chambre -

Sa plus longue grève? Le conflit de 111 jours au Holiday Inn de Clichy en 2017/18.

"Aujourd'hui, les femmes de chambre et gouvernantes de l'Holiday Inn ont été embauchées en interne, et ils ont mis dehors la société de sous-traitance", jubile-t-il.

"C'est choquant que le cœur de métier de l'hôtellerie, qui est l'hébergement, le nettoyage des chambres, soit sous-traité. Dans l'hôtellerie c'est dramatique, un hôtel sur deux sous-traite en France. Les femmes se font exploiter de manière honteuse, on les paye à la chambre et non à l'heure, avec des conditions de travail très, très pénibles", s'indigne-t-il.

Claude Lévy est "tombé" dans le secteur de l'hôtellerie par hasard. Né au Maroc, grandi à Nice, dont il garde la faconde et l'accent, il travaille trois ans dans une petite société de lecture de presse "un peu comme l'Argus de la presse", dit-il.

"Je découvre les conditions de travail dans une petite entreprise où le patron refuse de mettre un éclairage adapté. C'est là que je suis devenu myope. On avait des chaises complètement bancales ... je me suis engagé syndicalement dans le seul syndicat existant, la CFDT", dit-il.

Licencié, il "gagne aux prud'hommes", une première victoire syndicale. En 1986, il rend sa carte de la CFDT, pas assez combative selon lui au moment de la Loi Delebarre sur l'aménagement du temps de travail. La CGT lui propose de s'occuper du secteur du nettoyage.

"C'est là que j'ai découvert l'horreur totale. La situation est toujours la même: là où on a un rapport de forces on arrive à obtenir des choses convenables mais dans les déserts syndicaux, les gens se font totalement écraser. Des problèmes de sans-papiers, on en découvre encore tous les jours", dit-il.

A 60 ans, il a "toujours la pêche", même si les choses n'ont guère progressé, "la sous-traitance s'est même accélérée depuis la fin des années 80".

Son meilleur souvenir? "Les défilés de la Fashion Week de septembre 2013 où les femmes de chambre du Park Hyatt Vendôme ont organisé leur propre défilé en habit traditionnel pour faire un pied de nez au monde du luxe. Ça avait été couvert par les télés mondiales!"

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