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La Caisse des dépôts prête main forte à l'exécutif sur les "territoires"

Avec un défilé de ministres mercredi, le gouvernement accompagne étroitement une réorganisation de la Caisse des dépôts en faveur des "territoires", au moment où la politique de l'exécutif est scrutée de près sur les banlieues et le logement.

La Caisse, instrument financier de l'Etat, doit être le "bras armé d'une volonté politique", a déclaré Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, à la Cité de la Mode et du Design à Paris.

"Notre responsabilité politique, c'est d'aimer toute la France", a-t-il insisté, lors d'un discours introduisant "la banque des territoires".

C'est le terme retenu par la Caisse des Dépôts pour le premier grand projet de son patron Eric Lombard depuis son arrivée fin 2017. Le dispositif sera chapeauté par le numéro deux de l'institution, Olivier Sichel, et était présenté tout mercredi en présence de multiples élus locaux.

Dans les faits, il ne s'agit ni d'un nouvel organisme ni de nouvelles offres, mais d'une réorganisation des services et de certaines filiales pour faciliter la lutte contre la "fracture territoriale", engagement martelé par M. Lombard depuis le début de son mandat.

Principale nouveauté pour les élus locaux ou les organismes du logement social, un secteur financé par la Caisse à partir notamment de l'argent des Livrets A: ils disposeront d'un seul point d'accès aux différentes offres de l'institution.

Celle-ci met l'accent sur la diversité de ses actions, qui vont du conseil aux investissements directs, mais ce sont les prêts qui restent au centre de son offre. La Caisse en a octroyé l'an dernier pour 15 milliards d'euros au logement social - parfois avec des horizons de remboursement extrêmement longs - et deux milliards aux collectivités.

En comptabilisant prêts et investissements, elle espère voir 20 milliards annuels transiter par ce dispositif, soit environ 10% de plus qu'actuellement selon ses estimations.

"Notre priorité doit être de financer les opérateurs et les collectivités qui ont le moins accès à ces financements: c'est plutôt les villes moyennes, les quartiers, la ruralité, même si évidemment on ne va pas se désintéresser des métropoles", a déclaré M. Lombard à l'AFP.

- Des syndicats sceptiques -

Ce discours fait fidèlement écho à la ligne affichée par le gouvernement sur plusieurs dossiers dans l'actualité: le logement social, dont la réorganisation est au coeur d'un touffu projet de loi examiné cette semaine par les députés, et surtout les banlieues, sur lesquelles le président de la République Emmanuel Macron vient d'appeler à "changer de méthode".

Tout en dévoilant une série de mesures pour les quartiers défavorisés, le chef de l'Etat s'est abstenu la semaine dernière de lancer un plan chiffré, affichant sa volonté de rupture avec 40 ans de politique de la ville et son refus du "clientélisme local".

"Je n'ai pas été surpris de ses propositions (...) qui reposent sur la responsabilité des acteurs", a déclaré M. Lombard à l'AFP. "(Je) ne fais pas de politique... Mais la Caisse a un rôle de soutien des politiques publiques, donc on n'est pas très loin non plus."

De fait, les membres du gouvernement doivent se succéder mercredi pour apporter leur appui aux ambitions de la Caisse, dont certains aspects font par ailleurs grogner les syndicats: plus ou moins favorables au projet dans son ensemble selon leur degré de réformisme, ils sont tous sceptiques quant au terme de "banque".

Après M. Le Maire, c'est le ministre de la Cohésion des Territoires, Jacques Mézard, qui interviendra dans l'après-midi. La journée sera conclue par le chef du gouvernement lui-même, Edouard Philippe.

L'exécutif reste d'autant plus proche de la Caisse que Bercy présente fin juin un vaste projet de loi sur le financement de l'économie, dit Pacte, qui prévoit de réformer la gouvernance bicentenaire de l'institution.

Là encore, alors que M. Lombard se montre pleinement solidaire de cette réforme en promettant de conserver "l'autonomie et la souplesse" de la Caisse, certains syndicats, comme la CGT, s'inquiètent d'une "banalisation" et d'un manque d'indépendance face à l'exécutif.

"C'est comme quand vous emmenez votre enfant chez le docteur: il crie avant même la piqûre", a ironisé M. Le Maire, faisant aussi allusion à des inquiétudes quant à une perte d'influence des parlementaires.

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