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La SNCF condamnée à payer les jours de repos des grévistes

La justice donne raison aux syndicats de cheminots: elle a condamné jeudi la SNCF à payer les jours de repos des grévistes que le groupe refusait de régler en considérant comme un seul mouvement les 18 épisodes de deux jours de grève sur cinq.

Le tribunal de grande instance de Bobigny a jugé "sans cumul possible" les différents "préavis déposés successivement par les organisations syndicales" - et "non contestés" par la direction -, depuis le début du mouvement contre la réforme ferroviaire, selon le jugement dont l'AFP a obtenu copie.

"Il s'agit donc de grèves successives conditionnées les unes par rapport aux autres en fonction de l'avancée des négociations", écrit le TGI dans sa décision, où il a "écarté" l'"interprétation" de la SNCF.

La direction de l'entreprise publique avait considéré que les différents épisodes du calendrier de deux jours de grève sur cinq - lancé début avril - étaient en fait un mouvement unique contre la réforme ferroviaire. Elle pouvait ainsi appliquer un règlement de retenues sur la fiche de paie non seulement des jours de grève, mais aussi de jours de repos au-delà de deux jours de grève.

Avec une telle définition, un agent en grève quatre jours a vu son salaire diminué de ses quatre jours de grève et d'un jour supplémentaire au titre des repos, soit au total cinq jours de salaire en moins sur sa fiche de paie.

Le TGI juge également que "le système instauré" par la SNCF constitue une "entrave au droit de grève". Le tribunal retient notamment "l'intention de neutraliser la stratégie des organisations syndicales" caractérisée dans un mail "du 23 mars 2018" de la direction des ressources humaines.

La SNCF "fait appel de cette décision", a-t-elle rapidement annoncé dans un communiqué. Mais cet appel ne suspendra pas l'application du jugement, le TGI ayant "ordonné l'exécution provisoire" de sa décision, ont souligné les avocats de la CFDT Cheminots et de l'Unsa ferroviaire, qui poursuivaient l'entreprise avec la CGT Cheminots.

- "Régulariser sans délai" -

C'est "une décision logique et forte. Le juge a reconnu la pluralité et les différences de nos préavis de grève. Cette décision montre aussi que la direction avait déployé tous les moyens possibles, y compris très limites en matière d'éthique pour décourager les cheminots à faire grève", a souligné auprès de l'AFP Rémi Aufrère-Privel, secrétaire général adjoint de la CFDT Cheminots.

Le syndicat "invite la direction à régulariser sans délai" les salaires des agents concernés.

"L'Unsa ferroviaire est très satisfaite de cette décision", a déclaré à l'AFP son secrétaire général Roger Dillenseger. "Cela montre bien que l'interprétation de l'entreprise visait à perturber le mouvement de grève", a-t-il relevé.

Les fiches de paie de juin étant déjà bouclées, l'Unsa souhaite que les rémunérations soient régularisées sans attendre celles de juillet, a expliqué M. Dillenseger, qui a réclamé jeudi dans un courrier à la direction "le remboursement des retenues indues dans les meilleurs délais".

La SNCF "appliquera le jugement" du TGI et "régularisera la situation des agents concernés", a indiqué la direction, sans donner de dates.

Pour la CGT Cheminots, "très satisfaite", ce jugement "prouve que les démarches de la direction de la SNCF pour s'attaquer aux familles par des retenues financières alourdies étaient bien des coups bas destinés à casser la grève sous couvert du gouvernement", a dit à l'AFP son secrétaire général Laurent Brun.

Mais "l'annonce immédiate par la SNCF de son appel n'est pas un facteur de sérénité. Le corps social cheminot n'avait pas besoin d'une telle posture conflictuelle", a regretté M. Aufrère-Privel.

Le 17e et avant-dernier épisode de grève du calendrier court de jeudi soir à tôt dimanche matin. Pour vendredi, la SNCF prévoit un trafic moins perturbé que lors des journées de mobilisation précédentes: neuf TGV sur dix, trois TER sur cinq, deux Transilien sur trois.

Après le dernier épisode la semaine prochaine, la grève continuera en juillet et août avec la CGT et SUD-Rail. Sans l'Unsa qui s'arrêtera le 28 juin. La CFDT annoncera sa décision "un peu avant" cette date.

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