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IVG: le Comité d'éthique ne voit "pas d'objection" à allonger le délai légal

"Il n'y a pas d'objection éthique à allonger le délai d'accès à l'IVG", en le portant de 12 à 14 semaines de grossesse, a estimé vendredi le Comité d'éthique, saisi par le gouvernement après l'approbation de cette réforme par les députés.

"Il n'existe que peu, voire pas de différence de risque pour la femme avortant entre 12 et 14 semaines de grossesse", fait valoir le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) dans une "opinion" à propos de cet allongement que les sénateurs doivent examiner à leur tour le 20 janvier en première lecture.

Le groupe des députés LREM a aussitôt indiqué vendredi son intention d'inscrire "dès que possible" à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale cette proposition de loi de l'ex-groupe EDS, après son adoption par le Sénat.

Le CCNE a pris le contre-pied de l'Académie nationale de médecine, qui s'était dit opposée à une mesure risquant selon elle d'augmenter le recours à des "manœuvres chirurgicales" potentiellement "dangereuses pour les femmes".

Quelque 1.500 à 2.000 femmes partent chaque année avorter à l'étranger - principalement aux Pays-Bas, en Espagne et au Royaume-Uni - parce qu'elles ont dépassé le délai légal en France, observe le CCNE. Dans ces pays, le délai légal est fixé au-delà de 16 semaines.

"Il n'est pas bienveillant de laisser ces femmes en grande difficulté chercher de l'argent et un moyen de partir à l'étranger", a observé lors d'un point-presse la Dr Alexandra Benachi, gynécologue-obstétricienne et co-rapporteure de l'avis.

Le CCNE souligne toutefois qu'il "ne saurait cautionner" une réforme législative qui serait "prise pour pallier les multiples dysfonctionnements" empêchant certaines femmes d'avoir accès rapidement à une IVG.

"Oui, on peut repousser le délai, mais il faut absolument mettre en place certaines mesures pour améliorer la prise en charge le plus tôt possible" des femmes qui souhaitent avorter, a résumé Mme Benachi.

Car l'accès à l'IVG est caractérisé par "de fortes disparités territoriales": de moins en moins d'établissements proposent ce type d'intervention, ce qui peut conduire "à des délais importants de prise en charge", déplore le CCNE.

L'instance consultative préconise de "renforcer les moyens" dédiés, pour que les patientes puissent être reçues "dans les cinq jours, et en urgence lorsqu'(elles) sont proches du terme limite de 12 semaines de grossesse".

Il importe également de renforcer la prévention des grossesses non désirées, par des actions d'éducation dans les écoles, voire en proposant la gratuité de la contraception aux femmes de 19 à 25 ans, qui représentent 65% des IVG, propose le Comité d'éthique.

L'allongement du délai légal pour avorter a été approuvé début octobre en première lecture par les députés, via une proposition de loi dont le Sénat se saisira à son tour le 20 janvier.

L'examen de ce texte a ravivé les passions sur un sujet jugé "sensible", voire "prématuré" par le ministre de la Santé Olivier Véran qui avait saisi le CCNE pour avis.

"Le travail législatif doit désormais se poursuivre", a affirmé vendredi la ministre déléguée chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, Elisabeth Moreno, qui s'est "réjouie" de la position du Comité d'éthique.

Mme Moreno s'est par ailleurs prononcée pour la suppression de la clause de conscience spécifique permettant aux professionnels de santé de refuser de pratiquer des IVG.

Le CCNE, lui, s'est dit en faveur de son maintien. Pour lui, cette clause "souligne la singularité de l'acte médical que représente l'IVG". Par ailleurs, "on ne peut pas forcer un médecin ou une sage-femme à pratiquer un geste qu'il ne veut pas faire, car cela entraînerait probablement une prise en charge dégradée pour la patiente", selon Mme Benachi.

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