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Macron envoie une lettre aux Français: il leur demande de répondre à une trentaine de questions pour "transformer les colères en solutions"

Une trentaine de questions pour encadrer le grand débat et "transformer les colères en solutions": Emmanuel Macron promet dans sa lettre aux Français rendue publique dimanche qu'il "tirera toutes les conclusions" de cette consultation inédite qui sera lancée mardi.

Au lendemain d'un neuvième samedi de manifestations des "gilets jaunes" marqué par un regain de mobilisation, le chef de l'Etat assure que les propositions des Français "permettront de bâtir un nouveau contrat pour la Nation, de structurer l'action du Gouvernement et du Parlement, mais aussi les positions de la France au niveau européen et international". "Je vous en rendrai compte directement dans le mois qui suivra la fin du débat", s'engage-t-il.


Une trentaine de questions, des lignes rouges

Il propose une liste d'une trentaine de questions sur les thèmes qu'il avait définis par avance le 10 décembre : fiscalité, modèle social, démocratie, institutions, transition écologique et diversité, immigration, laïcité. Mais assure qu'il n'y aura "pas de questions interdites".

Pourtant il trace plusieurs lignes rouges, en excluant de revenir sur les réformes votées sur la fiscalité sur le patrimoine. En clair, sur la suppression de l'ISF, dont le rétablissement fait pourtant partie des demandes les plus fréquentes apparues dans les cahiers de doléances ouverts dans des milliers de mairies.

Autre point non négociable pour le chef de l'Etat, la remise en cause du droit d'asile. Il n'évoque pas d'autres points que le gouvernement ne veut pas mettre sur la table, comme la peine de mort ou l'IVG.

En revanche, au milieu de questions attendues, comme celle sur la possibilité de compter les votes blancs ou d'une dose de proportionnelle, Emmanuel Macron pose la question de fixer des quotas annuels d'immigration, une mesure qu'il n'a jamais proposée.

Dans le mois qui suivra le 15 mars la fin du grand débat, il donne rendez-vous aux Français pour sa traduction politique. Il ne précise pas comment les propositions des citoyens pourraient devenir réalité, s'abstenant d'évoquer l'idée de référendums multiples, suggérés par des membres du gouvernement.

> Les questions tout en bas de l'article

Ni une élection, ni un référendum

Ce débat n'est "ni une élection, ni un référendum", avertit le chef de l'Etat. Car il représente pour l'exécutif autant un espoir qu'un risque politique, s'il débouche sur des demandes à l'opposé du programme présidentiel ou s'il fait un flop de participation. Ce qui torpillerait la solution politique choisie par le président, très bas dans les sondages.

Le grand débat viendra compléter les mesures sur le pouvoir d'achat d'un total de 10 milliards d'euros (augmentation de 100 euros net pour les salariés autour du Smic, CSG des retraités...) annoncées le 10 décembre par Emmanuel Macron, sous la pression de la rue.


Regain de participations parmi les gilets jaunes

Les "gilets jaunes" ont eux montré leur détermination samedi en défilant plus nombreux (84.000 dans toute la France contre 50.000 la semaine précédente, selon des chiffres du ministère de l'Intérieur). Dimanche encore, quelque 200 femmes "gilets jaunes" ont défilé à Toulouse, 300 au Mans.

Ce neuvième acte a été marqué par 167 interpellations rien qu'à Paris mais au final moins de violences que redouté par les autorités. "La responsabilité l'a emporté sur la tentation de l'affrontement", a salué le ministre de l'intérieur Christophe Castaner.


Déjà des critiques envers les questions posées

La liste de questions posées par le chef de l'Etat a aussitôt été contestée par l'opposition. "Des questions souvent fermées, orientées, des sujets fondamentaux absents, rien sur l'UE!", a protesté Florian Philippot.

"Pas de question interdite mais pas touche aux mesures économiques et fiscales. Pour le reste les questions énumérées par Emmanuel Macron renseignent sur les décisions qu'il annoncera seul", ironise Eric Coquerel (LFI, La France Insoumise, parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon).

La consultation suscite aussi la méfiance des "gilets jaunes". Samedi à Strasbourg, Jean-Jacques jugeait que "le débat, c'est dans la rue, pas dans une salle ou sur internet". Dimanche, un "congrès fondateur" de quelque 600 "gilets jaunes" des Pyrénées-Orientales pour structurer le mouvement et l'inscrire dans le débat s'est soldé par un échec.

Tous les partis ne sont pas prêts à y contribuer non plus. "C'est un enfumage pour un enterrement" de la contestation, selon Danielle Simonnet (LFI). "Ce n'est pas à la hauteur des enjeux" et l'exécutif cherche à "gagner du temps", critique aussi Wallerand de Saint Just (RN, Rassemblement national, ex-Front national, parti de Marine Le Pen).

A l'inverse, Olivier Faure (PS) souhaite que les socialistes y participent. Les Républicains (LR) aussi vont "essayer d'apporter (leur) soutien à cette consultation" car "nous voulons sortir du chaos", a déclaré la porte-parole Laurence Saillet. Mais selon le patron de LR Laurent Wauquiez, le débat "risque d'être un artifice grossier", a-t-il prévenu dimanche dans sa propre lettre aux Français.


Les questions pratiques à préciser

Les modalités de cette consultation doivent être précisées lundi par le Premier ministre Édouard Philippe. Le pilotage reste encore à définir, après la défection cette semaine de la présidente de la Commission nationale du débat public, Chantal Jouanno, après une polémique sur sa rémunération.

Un "comité de garants" pourrait être installé, chapeauté par une personnalité comme le Défenseur des droits Jacques Toubon ou le Haut Commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye.


Liste des questions par thème

Impôts

- Comment pourrait-on rendre notre fiscalité plus juste et plus efficace ?

- Quels impôts faut-il à vos yeux baisser en priorité ?


Services publics

- Quelles sont les économies qui vous semblent prioritaires à faire ?

- Faut-il supprimer certains services publics qui seraient dépassés ou trop chers par rapport à leur utilité ?

- A l'inverse, voyez-vous des besoins nouveaux de services publics et comment les financer ?


Modèle social

- Comment mieux organiser notre pacte social ?

- Quels objectifs définir en priorité ?


Organisation de l'État

- Y a-t-il trop d'échelons administratifs ou de niveaux de collectivités locales ? Faut-il renforcer la décentralisation et donner plus de pouvoir de décision et d'action au plus près des citoyens ? A quels niveaux et pour quels services ?

- Comment voudriez-vous que l'État soit organisé et comment peut-il améliorer son action ? Faut-il revoir le fonctionnement de l'administration et comment ?

- Comment l'État et les collectivités locales peuvent-ils s'améliorer pour mieux répondre aux défis de nos territoires les plus en difficulté et que proposez-vous ?


Transition écologique

- Comment finance-t-on la transition écologique : par l'impôt, par les taxes et qui doit être concerné en priorité ?

- Comment rend-on les solutions concrètes accessibles à tous, par exemple pour remplacer sa vieille chaudière ou sa vieille voiture ?

- Quelles sont les solutions les plus simples et les plus supportables sur un plan financier ?

- Quelles sont les solutions pour se déplacer, se loger, se chauffer, se nourrir qui doivent être conçues plutôt au niveau local que national ?

- Quelles propositions concrètes feriez-vous pour accélérer notre transition environnementale ?


Biodiversité

- Comment devons-nous garantir scientifiquement les choix que nous devons faire à cet égard ?

- Comment faire partager ces choix à l'échelon européen et international pour que nos producteurs ne soient pas pénalisés par rapport à leurs concurrents étrangers ?


Démocratie et institutions

- Faut-il reconnaître le vote blanc ?

- Faut-il rendre le vote obligatoire ?

- Quelle est la bonne dose de proportionnelle aux élections législatives pour une représentation plus juste de tous les projets politiques?

- Faut-il, et dans quelles proportions, limiter le nombre de parlementaires ou autres catégories d'élus ?

- Quel rôle nos assemblées, dont le Sénat et le Conseil Économique, Social et Environnemental doivent-ils jouer pour représenter nos territoires et la société civile ?

- Faut-il les transformer et comment ?

- Quelles évolutions souhaitez-vous pour rendre la participation citoyenne plus active, la démocratie plus participative ?

- Faut-il associer davantage et directement des citoyens non élus, par exemple tirés au sort, à la décision publique ?

- Faut-il accroître le recours aux référendums et qui doit en avoir l'initiative ?


Immigration

- Que proposez-vous pour améliorer l'intégration dans notre Nation ?

- En matière d'immigration, une fois nos obligations d'asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ?

- Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?


Laïcité

- Comment renforcer les principes de la laïcité française, dans le rapport entre l'État et les religions de notre pays ?

- Comment garantir le respect par tous de la compréhension réciproque et des valeurs intangibles de la République ?

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