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Meurtre de Magali Blandin: le procureur explique pourquoi sa plainte pour violences conjugales a été classée sans suite

"Il y a eu une réponse judiciaire mais qui n'est pas passée par une poursuite": le procureur de Rennes a justifié mardi le classement sans suite d'une plainte déposée en septembre par Magali Blandin contre son mari, qui a avoué l'avoir tuée à coups de batte de baseball.

Le féminicide présumé de cette femme de 42 ans a suscité un vif émoi dans l'opinion et plusieurs responsables politiques et associatifs ont pointé du doigt la justice.

"Le couple venait de se séparer. Elle a été tuée à coups de batte de baseball. De batte de baseball. Elle avait déposé plainte pour violences. La plainte avait été classée sans suite. En fait, rien ne change. C'est désespérant et révoltant", a écrit sur Twitter Laurence Rossignol, sénatrice socialiste et ancienne ministre.

"Halte aux violences faites aux femmes. Effroi et désespoir pour Magali Blandin mère de quatre enfants, massacrée par son mari. Elle avait porté plainte pour violence conjugale. La plainte fut classée c'est révoltant", a estimé Ségolène Royal, ancienne ministre et "finaliste" de l'élection présidentielle, sur le même réseau social.

La militante féministe Caroline De Haas a également mis en cause le parquet dans un tweet. "Magali Blandin avait porté plainte en septembre contre son ex-mari. Classée sans suite. Il l'a assassinée en février (...)".

Le procureur de Rennes, Philippe Astruc, qui dit ne pas vouloir "polémiquer avec quiconque", a toutefois souhaité expliquer à l'AFP les raisons du classement de cette plainte le 4 septembre.

A l'été 2020, Magali Blandin, éducatrice spécialisée, annonce à son mari qu'elle va prendre un compte en banque personnel, décision qui tend les relations dans ce couple qui a quatre enfants et qui s'est marié en 2003 après s'être rencontrés en 1996.

Le 2 septembre au soir, lors d'une discussion animée, "elle dit qu'il soulève le banc et qu'elle tombe sur les fesses en arrière" et décide de quitter le domicile. Le lendemain, elle dépose plainte à la brigade de Montauban-de-Bretagne et le mari, qui n'a pas d'antécédent judiciaire pour violences, est placé en garde à vue, tandis que les quatre parents du couple seront entendus.

Examen de conscience 

Magali Blandin "passe le protocole, va à l'IMJ (institut médico-légal). Un certificat médical ne constate pas de lésions physiques mais évoque une tachycardie importante", liée au stress, explique M. Astruc. "Elle évoque aussi des faits en 2005, 2013, 2019, 2020 et le caractère autoritaire de son mari, et dit : +Généralement, les violences, ce sont plus des bousculades, des insultes en tout genre, des dénigrements+".

Le mari, qui reconnaît avoir soulevé le banc, "dit qu'il est victime de violences physiques de la part de sa femme, ce que Mme Blandin reconnaît et ce que dans la procédure civile, les enfants confirmeront".

Aussi, le magistrat, qui décide du classement, considère que "l'intensité de ce fait-là ne justifie pas un renvoi devant le tribunal correctionnel". "Étant donné une approche égalitaire du droit (...), il aurait fallu naturellement poursuivre Mme Blandin pour les violences, reconnues, qu'elle a pu exercer sur son mari", dit M. Astruc.

"Le choix qui a été fait a été plutôt de mettre en place un accompagnement social", explique M. Astruc, avec entretien avec un psychologue, saisie de deux associations d'aide aux victimes et accompagnement de l'intervenant social en gendarmerie.

"J'ai fait mon examen de conscience et voilà pourquoi cette décision a été prise et que j'en assume sa responsabilité", a dit le procureur, soulignant que 1.414 plaintes pour violences conjugales en 2020, contre 720 en 2018, ont été traitées au tribunal de Rennes, avec 330 déferrements en 2020 contre 100 deux ans plus tôt.

"Dire que la justice ne fait pas son travail et que rien ne change, c'est très injuste", a-t-il estimé.

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