Accueil Actu

Manille publie les noms d'élus accusés d'être mêlés au trafic de drogue

Les Philippines ont publié lundi les noms de plus de 200 élus locaux accusés d'être mêlés au trafic de drogue, démentant toutefois avoir dressé une "liste noire" de cibles à abattre dans la campagne meurtrière du président Rodrigo Duterte contre les stupéfiants.

Les noms ont été rendus publics sur ordre du président quelques jours avant des élections locales dans l’archipel, où les campagnes électorales sont fréquemment synonymes de violences.

"La publication des noms des élus de barangay (districts) impliqués dans des affaires de drogue illégales est avant tout le résultat d'un ordre direct du président Rodrigo Duterte", a déclaré à la presse Aaron Aquino, le patron de l'Agence philippine de lutte contre les stupéfiants (DEA).

Les autorités font valoir que la liste a pour but de couvrir de honte les 207 élus concernés à l'approche des élections du 14 mai, mais les défenseurs des droits de l'homme déclarent qu'il pourrait s'agir d'une incitation au meurtre.

"Ces listes pervertissent l'Etat de droit et sont, au mieux, une forme de procès par l'opinion publique. Au pire, c'est une liste noire de cibles à abattre", a déclaré à l'AFP Carlos Conde, militant philippin de Human Rights Watch, ONG dont le siège est aux Etats-Unis.

Depuis son arrivée au pouvoir en 2016 après une campagne sécuritaire outrancière, le président philippin a lancé une campagne sans merci contre le trafic de drogue.

La police dit avoir tué 4.100 toxicomanes et trafiquants présumés. Les défenseurs des droits affirment qu'il faut multiplier ce chiffre par trois.

D'après M. Aquino, les élus nommés dans la liste sont soupçonnés d'être des consommateurs, des dealers ou même des barons de la drogue. Dans la plupart des cas, a-t-il cependant ajouté, ils sont accusés d'avoir protégé le trafic dans leur barangay.

La liste a été compilée après enquête de quatre départements de police et du renseignement, a-t-il ajouté.

Cependant, les autorités ont reconnu qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments pour inculper les personnes y figurant.

"Je ne crois pas que c'est une liste noire", a déclaré M. Aquino, ajoutant que le gouvernement allait assurer la protection des élus concernés "pour que personne ne leur fasse du mal en cas d'opération contre eux".

Le ministre de l'Intérieur Eduardo Ano a affirmé que les gens avaient le droit d'être au courant des agissements de leurs élus, qui ne sont pas des personnes privées.

"Ils auront l'occasion de se défendre. Nous respectons l'Etat de droit", a ajouté le ministre.

La Cour pénale internationale a lancé en février des investigations liminaires sur les meurtres de la drogue, ce qui a conduit M. Duterte à annoncer le retrait de son pays du traité fondateur de la CPI.

À lire aussi

Sélectionné pour vous