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Réforme de l'université: à Paris 8, reprise du blocus au retour des vacances

Le cours de 15H est-il maintenu ? De retour de vacances, certains étudiants de Paris 8-Saint Denis étaient dans le flou avant la tenue d'une AG, qui a finalement voté la poursuite du blocage sans convaincre tout le monde.

Midi. En ce jour de rentrée, le campus de 22.000 étudiants au nord de Paris est désert, balayé par des rafales de pluie glacée.

Les étudiants se serrent dans l'amphi B2, où se tient une assemblée générale qui doit décider de la poursuite du mouvement entamé début avril contre la nouvelle loi sur l'accès aux études universitaires. Sur les murs sont reproduits des aphorismes de Mai 68, clin d'oeil au mouvement qui vit naître la fac héritière de Vincennes.

Pêle-mêle s'affichent des revendications féministes radicales, des sigles hostiles à la police, tels ACAB ("All cops are bastards") ou des mises en garde adressées au chef de l'Etat: "Macron tu vas bientôt savourer ton échec".

Les étudiants commencent à voter sur les modalités de l'AG: présence ou non de journalistes, composition de la "tribune", organisation des prises de parole sur le principe de l'alternance homme/femme -- "pour éviter la monopolisation par les +assignés mâle+" -- sont ainsi soumis à ratification.

Un étudiant kurde fait circuler une pétition; un migrant en appelle à la solidarité des étudiants pour la cinquantaine de sans-papiers qui occupent depuis trois mois une aile de l'université.

Le directeur de l'UFR de philosophie appelle quant à lui à "mettre la pression" sur ses collègues pour qu'ils adoptent la "validation universelle" - l'octroi à tous les étudiants d'une note identique élevée pour ne pas les pénaliser.

-"On voulait avoir cours"-

Puis les étudiants débattent du processus de blocage. L'un d'eux met en garde contre "le blocage complet qui désertifie la fac" et prive les étudiants mobilisés de la possibilité de convaincre la majorité silencieuse. Un autre suggère de "bloquer les serveurs informatiques" de la fac en les "inondant de messages", mais sa proposition rencontre peu d'échos.

Apercevant sa prof de musique sur un banc de l'amphi, Romain se penche vers elle pour lui demander s'il y a cours comme prévu à 15 heures. L'enseignante fait signe qu'elle n'en sait rien.

Romain se dit à la fois "contre le blocage et contre la loi" réformant l'accès à l'université.

Sa camarade, qui préfère taire son prénom, regrette une mobilisation qui tombe au "mauvais moment, à cause des partiels". Un autre étudiant, qui habite loin du campus, s'inquiète de savoir si le partiel de jeudi sera maintenu, à cause de la grève des trains.

Au dernier rang, Jonathan interpelle l'assemblée: "vous ne pouvez pas décider pour 22.000 personnes, vous ne pouvez pas dire que c'est démocratique !".

Son intervention déclenche un tollé, mais des voix se font entendre pour défendre son droit à l'expression. "On voulait avoir cours pour apprendre plein de choses et ce n'est pas possible", déplore ce fan de métal aux longs cheveux raides, à l'origine d'une pétition sur internet réclamant la fin du blocus.

15H45. Les étudiants votent à main levée diverses résolutions, dont l'une réclame la démission des présidents d'université "qui ont fait appel aux flics" pour lever les blocus, comme à Tolbiac, Nanterre ou Censier lundi matin. Une autre appelle à la "convergence des luttes" avec les cheminots, aux côtés desquels les étudiants en lutte iront manifester les 1er, 3 et 5 mai.

15H45. La poursuite du blocage jusqu'à la prochaine AG de vendredi est adoptée. A l'unanimité moins une voix.

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