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Frappes en Syrie: les Etats-Unis prêts à "dégainer" de nouveau

Donald Trump et ses alliés français et britannique estiment avoir réussi leurs bombardements contre la Syrie de Bachar al-Assad accusé d'avoir utilisé des armes chimiques, Washington se disant prêt à "dégainer" encore en cas de récidive de Damas, en dépit de la colère de Moscou qui dénonce une "agression".

Après cette opération militaire "limitée" qui a visé trois sites liés au programme d'armement chimique syrien sans faire de victimes, selon les Occidentaux, la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni entendent relancer la diplomatie. Ils ont remis samedi soir à leurs 12 partenaires du Conseil un nouveau projet de résolution sur la Syrie qui devrait être discuté à partir de lundi, selon des diplomates.

Le texte comprend plusieurs facettes - chimique, humanitaire et politique -, incluant la création d'un nouveau mécanisme d'enquête sur l'emploi d'armes chimiques, selon le texte obtenu par l'AFP.

Dans le domaine chimique, le texte "condamne dans les termes les plus forts tout recours aux armes chimiques en Syrie, en particulier l'attaque du 7 avril à Douma". Il prévoit de créer "un mécanisme indépendant" d'enquête et d'attribution des responsabilités "basé sur des principes d'impartialité et de professionnalisme".

Il demande aussi à la Syrie de coopérer pleinement avec l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) dont une mission se trouve en Syrie pour réunir des éléments sur cette attaque chimique présumée qui aurait fait au moins 40 morts à Douma, selon des secouristes sur place.

La Russie, soutien politique et militaire du pouvoir syrien, nie, comme Damas, que des armes chimiques aient été utilisées dans cette localité de la Ghouta orientale, près de la capitale syrienne, zone des rebelles islamistes que la Syrie a annoncé avoir totalement reprise samedi après deux mois de combats meurtriers.

Plus de 1.700 civils ont été tués, selon selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), une ONG qui dispose d'un vaste réseau de sources dans la Syrie en guerre.

Après les frappes occidentales, la Russie a obtenu une réunion d'urgence du Conseil de sécurité mais a échoué à faire voter sa résolution condamnant "l'agression" armée contre Damas, son représentant Vassily Nebenzia fustigeant "le néo-colonialisme" des Etats-Unis et de leurs deux alliés.


"Les Etats-Unis sont prêts à dégainer de nouveau"

L'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley, est, elle, montée au créneau pour maintenir la pression sur le président Assad mais aussi sur ses alliés russes et iraniens.

"J'ai parlé au président (Trump) ce matin, il a dit que si le régime syrien continue d'utiliser ce gaz toxique, les Etats-Unis sont prêts à dégainer de nouveau", a-t-elle affirmé dans une nouvelle joute entre Washington et Moscou qui symbolise l'extrême tension entre les deux anciens ennemis de la Guerre froide.

Le président français Emmanuel Macron a pour sa part estimé qu'après les frappes, c'était maintenant au Conseil de sécurité de "reprendre, dans l'unité, l'initiative sur les plans politique, chimique et humanitaire".

Le projet de résolution des trois pays qui ont mené les frappes est le premier à regrouper les aspects chimique, humanitaire et politique du conflit vieux de plus de sept ans.

Il "exige des autorités syriennes qu'elles s'engagent dans des négociations inter-syriennes de bonne foi, de manière constructive et sans préconditions" en application des dernières discussions menées à Genève le 3 mars.

Ces négociations, au point mort, doivent porter sur la gouvernance, la question constitutionnelle, les élections, le contre-terrorisme et des mesures de confiance.

Egalement impliqué dans le conflit, le président turc Recep Tayyip Erdogan s'est félicité samedi des frappes, et s'est entretenu avec Vladimir Poutine "pour réduire les tensions en Syrie et pour trouver une solution politique à la crise", selon une source présidentielle turque.


"Mission accomplie" 

Cette opération semble avoir été ciblée pour éviter une escalade de la guerre en Syrie, plus complexe que jamais après sept années de conflit et la présence sur le terrain de plusieurs forces étrangères, dont les armées américaine, russe et iranienne.

"Mission accomplie!", a lancé Donald Trump -- comme son prédécesseur George W. Bush en 2003, qui avait alors annoncé, de manière prématurée, la fin de la guerre en Irak.

Le Pentagone a réfuté une déclaration de l'armée russe selon laquelle la défense antiaérienne syrienne a intercepté 71 missiles sur 103, dénonçant une "campagne de désinformation russe".

Il a affirmé que le programme chimique syrien "mettra des années à s'en remettre" mais sans pouvoir garantir que le régime Assad "ne sera pas en mesure de le reconstituer".

Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a aussi estimé qu'une "bonne partie de l'arsenal chimique" avait été "détruite".

La porte-parole du ministère américain de la Défense Dana White a réaffirmé que les Etats-Unis ne cherchaient "pas à intervenir" dans la guerre civile syrienne.

La seule mission de l'armée américaine en Syrie reste le combat contre le groupe Etat islamique (EI), considérablement affaibli, et Donald Trump a plaidé récemment pour un désengagement le plus rapide possible.


"Agression" et "insulte" 

Le président Assad a dénoncé une "agression" qui ne fait que "renforcer" sa "détermination à continuer de lutter et d'écraser le terrorisme", terme par lequel il désigne les rebelles.

Moscou a évoqué une "insulte" au président Vladimir Poutine, tandis qu'en Iran, le guide suprême Ali Khamenei a qualifié les dirigeants américain, français et britannique de "criminels".

A Damas, les frappes ont galvanisé les partisans du régime. Au lever du soleil, plusieurs dizaines d'entre eux se sont rassemblés sur l'emblématique place des Omeyyades, au son de klaxons et de musiques patriotiques, arborant des drapeaux syriens, chantant et dansant à la gloire de Bachar al-Assad.

Et pour les évacués de Douma, rencontrés par l'AFP à 400 kilomètres de chez eux, dans un camp de déplacés, l'opération des Occidentaux ne change pas la situation.

"Nous sommes contents de voir que quelqu'un a enfin senti qu'on existait", a déclaré Nadia Sidaoui. Mais, ajoute-t-elle, "les frappes menées n'ont pas eu vraiment d'impact" sur Bachar al-Assad.

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