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"Je suis devenue allergique après plusieurs colorations pour cheveux": Hélène met en garde contre la PPD

Après plusieurs teintures capillaires, une habitante d’Arlon a développé une allergie à la PPD. Cette substance chimique, utilisée essentiellement comme "colorant noir", est un allergène qui peut provoquer des réactions cutanées virulentes.

Après avoir lu notre article sur une jeune femme qui déconseille de se faire tatouer au henné au Maroc, Hélène nous a contactés via notre bouton orange Alertez-nous pour apporter son témoignage.

"A l'heure actuelle, on parle beaucoup de santé, d'environnement et des allergènes présents dans la nourriture comme le gluten. Mais on parle malheureusement très peu des produits comme la PPD. Cependant, c’est un produit très allergène pour la peau", souligne cette habitante d’Arlon de 33 ans.


"Dans pratiquement toutes les colorations pour cheveux foncés" 

La paraphénylènediamine (PPD) est une substance chimique bon marché présente dans de nombreux produits: certains hennés, des colorations pour cheveux, des teintures pour des cuirs ainsi que des colorants incorporés aux caoutchoucs. L’objectif est d’obtenir une couleur foncée. Plus la concentration de PPD est élevée, plus la couleur se rapproche du noir.

Elle permet aussi de rendre le produit plus résistant. "C’est une toute petite molécule qui pénètre extrêmement bien dans la peau pour les tatouages éphémères et dans le cheveu pour le colorer. Pratiquement toutes les colorations pour cheveux foncés vendues chez nous contiennent de la PPD. Normalement dans le henné traditionnel, le brun-rouge, il n’y en a pas. Mais comme il tient moins longtemps, on rajoute de la PPD pour que les tatouages éphémères foncent et tiennent surtout plus longtemps sur la peau", explique Dominique Tennstedt, dermatologue aux Cliniques universitaires Saint-Luc.

"La PPD est également utilisée comme colorant pour les cuirs et les caoutchoucs. Mais elle y est relativement bien accrochée. Les allergies à la PPD via les cuirs et les caoutchoucs sont donc rarissimes", assure le dermatologue.


"Entre deux et trois patients par mois qui sont positifs au test"

En Belgique, l’allergie à la PPD est loin d’être exceptionnelle. "A Saint-Luc, nous avons entre deux et trois patients par mois qui sont positifs au test. Mais nous sommes probablement le plus grand centre en Belgique de tests épicutanés pour détecter des allergies. Donc, sur l’ensemble du pays, on peut dire qu’entre 1 et 2% de la population féminine sont concernés", indique Dominique Tennstedt.

Hélène s’est rendu compte de son allergie grâce à un test spécifique conseillé par son dermatologue. "Je possède une peau atopique (NDLR: une peau qui présente des réactions allergiques sous forme de rougeurs, démangeaisons, boutons puis croûtes). J’ai donc de l’eczéma depuis que je suis gamine et je suis sujette aux allergies. En faisant des tests, j’ai appris que je suis allergique non seulement à la PPD, mais aussi au chrome, au nickel et au cobalt", indique Hélène.

"La peau atopique est plus perméable, donc les molécules pénètrent plus facilement. C’est la raison pour laquelle les personnes qui possèdent ce type de peau font souvent plus d’allergies. L’un fait le lit de l’autre", confirme Dominique Tennstedt.


 "L'allergie, c’est comme en amour"

D’après le dermatologue, cette allergie à la PPD peut se déclarer à tout moment. "L'allergie, c’est comme en amour. On peut devenir allergique à son mari ou à sa maîtresse après 1 jour, 5 jours, 1 mois, 10 mois, 3 ans, 50 ans. Donc, on peut très bien supporter la PPD pendant 15 jours ou 10 ans et tout à coup devenir allergique. Évidemment plus il y a des contacts avec le produit, plus vous risquez de devenir allergique", indique-t-il.

"Moi, c’est à cause des colorations capillaires. A force de réaliser des teintures chez mon coiffeur, j’ai été sensibilisée et je suis devenue allergique", révèle Hélène.


"Eczéma épouvantable, œdèmes,... cela peut être très impressionnant"

Lorsqu’une allergie à la PPD se déclare, c’est à vie. Tout nouveau contact avec la substance provoquera une réaction d’hypersensibilité. "Si je tiens mes cheveux en noir, je risque de me gratter et d’avoir des boursouflures", indique Hélène. "Quand on devient allergique à la PPD, on ne peut bien sûr plus se colorer les cheveux sous peine d’avoir de l’eczéma épouvantable, gravissime qui peut nécessiter une hospitalisation avec des œdèmes de la face, etc. Cela peut être très impressionnant mais aucune conséquence mortelle", confirme le dermatologue.

Et cela ne s’arrête pas là. Il existe également des allergies croisées. "Dans les textiles, on ne met pas de PPD en principe mais des colorants azoïques appelés dispersés. Ils possèdent une structure proche de la PPD. Du coup, si on devient allergique à la PPD, on peut devenir aussi automatiquement allergique à certains colorants dispersés", assure Dominique Tennstedt. Ces colorants sont utilisés uniquement pour teindre des vêtements synthétiques.


Les vêtements synthétiques à bannir 

En raison de ses différentes allergies, Hélène n’a donc pas le choix. La trentenaire doit être vigilante et bannir certaines choses. "J’évite tout ce qui est en cuir et je ne porte que des vêtements clairs fabriqués avec des fibres naturelles, le coton, le lin ou la laine. Cela limite vachement mon choix car les matières synthétiques sont de plus en plus utilisées", assure l’Arlonaise.

Comme elle a une peau atopique, la trentenaire doit aussi faire preuve de prudence quand elle achète des cosmétiques. "Pour les crèmes solaires, je dois trouver des crèmes minérales comme pour les bébés", ajoute-t-elle. Les filtres 100% minéraux, moins allergisants, sont en effet recommandés aux peaux très sensibles et intolérantes.

Plus question non plus bien sûr de teindre ses cheveux puisque la majorité des teintures contient de la PPD. "Je ne veux prendre aucun risque. Heureusement je suis blonde, du coup, ce n’est pas trop ennuyant pour moi."


La PPD indiquée clairement sur les étiquettes ? 

Vu les réactions possibles, elle estime que les fabricants devraient toujours indiquer clairement la présence de cet allergène sur les étiquettes des produits. "Je sais que c’est énorme comme démarche de demander cela aux fabricants mais on devrait commencer à y penser tout doucement. En tout cas, cela m’aiderait beaucoup et je suppose que je ne suis pas la seule", souligne Hélène.

En réalité, en ce qui concerne les colorants capillaires, c’est une obligation en Europe de mentionner la présence de PPD. Les teintures vendues dans nos rayons sont contrôlées et la concentration maximale autorisée est de 2%.

"Le problème surgit surtout avec le henné noir utilisé pour les tatouages éphémères. Ils contiennent de grosses concentrations de PPD, de l’ordre de 15 à 20%. Ce sont les principales sources des nouvelles allergies aujourd’hui", indique le dermatologue. Il s’agit alors de produits fabriqués hors Europe et qui peuvent être exportés illégalement de Chine, du Maroc ou encore du Bangladesh. "C'est devenu une mode, mais faites donc attention quand on vous propose ce genre de tatouages sur les plages du pourtour méditerranéen", prévient-il.

Autre conseil: être vigilant au nom utilisé par le fabricant. La présence de PPD peut être stipulée de différentes manières. "D’abord, ce n’est pas PPD qui est indiqué sur les emballages mais paraphénylènediamine et parfois p en italique pour « para » et phénylènediamine. Ensuite, l’autre nom fréquemment utilisé, c’est diaminoazobenzène. Or les gens ne sont pas toujours au courant qu’il s’agit de PPD. C’est une astuce qu’il faut connaître", souligne Dominique Tennstedt.

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