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Fabian tabassé par 9 policiers devant l'école de ses enfants: "La police de Charleroi aime jouer au Zorro contre des innocents" (photos)

A la veille des vacances de Pâques, un père de famille carolo a été victime de violences policières injustifiées, selon lui et les témoins présents. Pour la police et le parquet de Charleroi, par contre, cette débauche de moyens était totalement justifiée. Voici un fait divers où deux versions s'affrontent.

"La police de Charleroi aime jouer au Zorro contre des innocents mais ne fait rien contre les vrais criminels", voici comment Stéphane (nom d’emprunt), qui a été témoin d’une arrestation pour le moins musclée, a averti la rédaction de RTLinfo.be via notre page Alertez-nous.

Une rue où la moitié des voitures sont mal garées

Les faits remontent au 2 avril dernier. C’était un mercredi midi, un de ces jours où les enfants sont surexcités à l’approche des vacances de Pâques. Fabian, dont l’épouse était bloquée chez elle après une opération chirurgicale, avait pris congé pour pouvoir venir rechercher ses enfants à l’école Saint-Martin, rue du Vieux Moulin à Marcinelle. Il est midi et les parents ne savent plus où se garer. Comme souvent quand il ne s’agit que de quelques minutes, des largesses sont prises avec le code de la route.

Un riverain énervé appelle la police

Mais ce jour-là, exaspéré, un riverain avait appelé la police en dénonçant ces personnes qui se garaient n’importe où, explique le parquet de Charleroi. Une équipe de deux policiers de la zone était dès lors présente pour verbaliser toutes les voitures stationnées du mauvais côté de cette rue en stationnement alterné. "La police n’était donc pas là simplement pour faire rentrer de l’argent dans les caisses", insiste le parquet.

Verbalisé parce qu’il "allait se garer", des parents prennent sa défense

Fabian arrive alors. "Au moment de me garer du mauvais côté de la rue, je vois les policiers. Je ne m’arrête donc pas et continue ma manœuvre en sortant directement de la place où je comptais me garer. Mais je remarque que la policière note mon numéro de plaque", explique-t-il. L’homme se gare deux rues plus loin, là où c’est permis, et revient devant l’école. Il interpelle alors la policière et lui demande s’il va "recevoir une prune", selon les termes du parquet. Fabian ne nie pas: "Elle confirme qu’elle m’a verbalisé, selon elle, parce que j’allais me garer! Je lui dis alors que c’est honteux et plusieurs parents viennent aussi lui dire le fond de leur pensée".

"Outrageant, il a refusé le menotage"

La version officielle que nous livre la police de Charleroi sur les suites de l’altercation est la suivante: "Monsieur n’avait pas ses documents d’identité et s’est montré outrageant, et l’officier en support de sa collègue féminine qui verbalisait a décidé de son arrestation. L’intéressé étant de corpulence très forte et costaud, et puisqu’il a refusé le menotage, les agents ont dû appliquer une technique apprise dans toutes les écoles de police pour l’amener au sol et le maitriser". "Ce n’est finalement qu’au poste qu’il se calmera et avouera qu’il n’aurait pas dû s’énerver", explique le parquet.

De retour avec ses enfants, la police lui demande ses papiers

Mais la version de Fabian et des parents d’élèves témoins de la scène, dont Stéphane, est différente. Après avoir été rechercher ses enfants dans la cour de l’école, "juste au moment où je passe la barrière, j’ai les deux policiers qui s’avancent et me demandent ma carte d’identité. Je leur dis que je ne l’ai pas sur moi alors ils me disent de les suivre au poste. Je leur explique que je ne vais tout de même pas y aller avec mes deux enfants mais ils ne m’écoutent pas. Je commençais à m’énerver, mais sur moi-même. J’argumentais auprès des policiers mais ce n’est pas pour autant que je disais des grossièretés", assure-t-il.

Des renforts appelés en nombre

Puis, c’est l’escalade. "Tout en parlant, je commence à entendre des sirènes au loin et ils arrivent à 9 policiers avec la brigade canine! A ce moment-là, alors que je tiens toujours mes enfants par la main, j’ai directement un policier qui vient vers moi pour en découdre. Je l’ai senti tout de suite à son air menaçant", explique Fabian. "Je pense qu’ils ont cru que ça allait dégénérer quand ils ont eu tous parents sur le dos. Mais j’ai été la cible! Ils sont arrivés en croyant qu’il y allait y avoir un gros problème". La police de Charleroi nous explique qu’effectivement, l’équipe initialement présente a demandé du renfort et que, dans ces cas-là, ne sachant pas à quoi ils vont faire face, les grands moyens sont déployés.

 

Accompagné par 9 policiers jusqu’à sa voiture

Fabian est prié de suivre les policiers jusqu’à sa voiture pour y rechercher ses papiers. "Une professeure qui a assisté à la scène me propose alors de s’occuper de mes enfants pendant que je suis la police. J’appelle donc ma femme convalescente pour qu’elle vienne les chercher." Arrivé à sa voiture deux rues plus loin, suivi par les 9 policiers, Fabian se rend compte que ses papiers sont chez lui. "Ils me disent de les suivre jusqu’au poste et je leur réponds: 'D’accord, je viens avec vous'. J’avance avec eux, calmement, mais l’un me dit: 'On va vous mettre les menottes'. Je leur réponds qu’ils n’en ont pas besoin, que je suis calme et que les suis de mon plein gré. Mais là, un jeune homme m’attrape le bras et je résiste un peu."

Des coups, encore des coups…

C’est alors l’escalade: "Un autre vient par derrière m’étrangler. Au début je me demande quoi et je ne me laisse pas tomber par terre. Je n’ai pas l’habitude de ça, c’est la première fois qu’on m’arrête! Puis un policier me serre extrêmement fort les menottes. Je hurle au secours. Pour moi, il serre la menotte avec son pied tellement ça fait mal, et parce que j’ai la mains au sol. Je ne sais pas leur donner l'autre main tellement ils me font mal et eux prennent ça comme si je résistais. J’ai alors reçu des coups de tous les côtés, dont des coups de matraque dans le dos. Ils m’embarquent finalement pour outrage à agent et rébellion."

"Il n’a jamais été agressif envers les policiers"

Stéphane, comme d’autres témoins, a vu la scène: "C’est un homme très costaud qui en impose par sa simple présence, mais c’est surtout un homme calme, toujours poli et gentil, et il n’a jamais été agressif envers les policiers, il parlait très calmement. Mais il s’est retrouvé avec leurs chaussures dans la figure et lui enfonçant les menottes dans les poignets. Il a juste fait ce que vous et moi aurions fait, il a enlevé sa main", estime-t-il.

Il porte plainte au Comité P

Fort de ces témoins, après avoir passé 4 heures au poste "avec prise d’empreintes et photos comme si j’étais un criminel", Fabian se rend chez son médecin pour faire constater ses blessures et fait prendre les photos au bas de cet article. Le lendemain, après s’être renseigné sur la procédure, il porte plainte auprès du comité P pour violences policières en leur déposant un dossier complet. "Les policiers font leur travail et je n’aurais peut-être pas dû aller les voir. Ils n’ont fait que suivre les ordres", estime la victime présumée, réaliste. "Mais je trouvais ça honteux d’être verbalisé alors que je n’étais même pas à l’arrêt. Puis leur réaction a été disproportionnée."

Facile de" jouer aux caïds" face à des braves gens...

"Quand c’est dans des quartiers sensibles, avec des mafieux connus de tous, là la police ne s’arrête jamais pour verbaliser la moitié des voitures mal garées. Mais quand c’est pour aller chercher de l’argent chez les petites gens, là ils jouent aux caïds", déplore pour sa part Stéphane. De l’autre côté de la balance, le parquet de Charleroi tient à nuancer: "L’insécurité routière est un des principaux thèmes qui suscitent l’insécurité dans la population. Là, ça tourne mal et on vient se plaindre de la police!", regrette-t-il, ajoutant que "ce n’est pas l’affaire du siècle", Fabian n’a d’ailleurs pas été poursuivi par le parquet, même si un PV pour rébellion et outrage a été rédigé à sa charge. Pour la police, "il a eu un comportement inadapté pour de simples faits de roulage". Pour Fabian, au contraire, ce sont les policiers qui "ont eu une réaction disproportionnée". L'enquête du Comité P devra déterminer qui a raison.

 

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