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Laurent scandalisé après l'accident de sa compagne: "Plus d'une vingtaine de voitures sont passées, personne ne s'est arrêté…"

Pourquoi des témoins d'un accident de la route ne se sont pas arrêtés pour venir en aide à une automobiliste en état de choc ? C'est la question que se pose Laurent, dont l'épouse ne s'est pas encore remise après avoir percuté un gibier avec son véhicule.

Le vendredi 27 avril débute comme tous les autres pour Laurent et sa compagne, originaires de la région de Hamois, en province de Namur. Le quadragénaire est encore à la maison lorsque sa compagne part travailler. Elle roule jusqu'à la gare de Ciney où elle prend le train. Mais ce jour-là, à 5h40 du matin, elle est victime d'une grosse collision.

"Un cerf a déboulé d'un talus, elle n'a pas pu l'éviter. Le choc a été très violent et la voiture est déclassée", raconte Laurent, qui a pris contact via le bouton orange Alertez-nous. Mais ce sont surtout les suites du sinistre sur lesquelles il veut insister.


"Personne ne s'est arrêté"

La conductrice se trouve en état de choc mais personne ne s'arrête pour lui porter secours, ni pour sécuriser les lieux. La nationale N97 entre Hamois et Ciney ne compte que deux bandes, et le véhicule bloque partiellement la voie vers Ciney, mais les automobilistes le contournent pour poursuivre leur route.  

"Plus d'une vingtaine de voitures sont passées, personne ne s'est arrêté. J'ai été le premier à m'arrêter, 10 minutes après l'accident. J'ai dû gérer la circulation, ma compagne et tout le reste, en attendant les secours", assure Laurent qui, arrivé sur les lieux, constate avec soulagement qu'elle n'a pas de blessures, mais est très choquée. Assise sur le siège passager, elle est "tétanisée", selon le quadragénaire qui appelle les secours.  


Le risque de suraccident

Malgré l'impact, le cerf est parvenu à se remettre sur pattes et à s'enfuir, mais la conductrice était "incapable de sortir de la voiture" pour demander de l'aide, nous dit son compagnon. Il a fallu moins d'une vingtaine de minutes pour que l'ambulance, puis la police arrivent sur les lieux de l'accident. Même s'ils sont intervenus assez rapidement, un second accident aurait pu se produire peu après le premier, et avoir des conséquences nettement plus graves.

"Ce qui m'a heurté, c'est que les 4 voitures qui me précédaient ont contourné la voiture de ma compagne sans s'arrêter, tout comme les précédentes. Je me suis arrêté sur la bande vers Ciney pour éviter le suraccident, j'ai appelé le 112. Puis j'ai arrêté moi-même une voiture pour demander de m'aider à sécuriser les lieux", poursuit Laurent. Plus grave : la personne qui suivait l'automobiliste a été témoin de l'accident et a continué son chemin "alors qu'elle a tout vu", déplore-t-il.

Le quadragénaire aimerait que des campagnes soient menées pour que les automobilistes comprennent qu'ils ont un rôle essentiel à jouer dans ce genre de situation. "Cela ne coûte rien d'aller voir si tout va bien. Là, on a perdu de temps, et il y aurait pu y avoir autre accident, surtout qu'il faisait encore nuit. Et puis elle n'était pas blessée, mais aurait eu besoin qu'on la rassure, qu'on appelle les secours et qu'on sécurise les lieux. Ça peut sauver des vies et c'est le devoir de chacun".


"De la non-assistance à personne en danger"

Benoît Godart, porte-parole de l'Institut Vias (ex-IBSR), le confirme : il était du devoir de l'automobiliste témoin de l'accident de s'arrêter.

"C'est un délit, c'est de la non-assistance à personne en danger. Instinctivement, quand on voit un accident, on doit s'arrêter, mettre le triangle de secours, prendre des nouvelles de la personne et appeler les secours, explique-t-il. Cela ne prend pas beaucoup de temps et c'est la moindre des choses. Si cette personne avait été à la place de la victime, elle aurait apprécié qu'on le fasse pour elle."

Benoit Godart rappelle qu'il est important d'éviter un suraccident. "Il faut tout mettre tout en œuvre pour qu'un autre conducteur ne vienne pas heurter la voiture accidentée. Placer le triangle de sécurité à 100 mètres pour les autoroutes, à minimum 30 mètres dans les autres cas. Ici, il aurait fallu le placer à 50 mètres", précise-t-il. Ensuite, il faut faire en sorte de ne pas se mettre soi-même en danger. "Il faut enfiler son gilet fluorescent et aller voir la personne accidentée, appeler les secours, rassurer la victime, parler avec elle, mais surtout ne pas la déplacer", rappelle le porte-parole de Vias.

L'expert en sécurité routière explique qu'en revanche, les autres automobilistes qui suivaient la jeune femme accidentée "ne se sont peut-être pas rendu compte de la gravité de la situation. D'autant plus qu'il faisait nuit, ils ont peut-être eu peur", explique-t-il.


Le système eCall: la solution ?

Progressivement, dans les prochains mois, le système d'alerte baptisé eCall va permettre d'avertir automatiquement les services de secours, que le conducteur soit conscient ou non, grâce au déclenchement des airbags. Si ceux-ci ne se sont pas déclenchés, le bouton pourra être activé manuellement. La géolocalisation permettra aux services d'urgence d'être avertis plus rapidement d'un accident, et d'arriver plus vite sur les lieux. Depuis le 31 mars 2018, tous les nouveaux modèles de véhicules mis sur le marché devront être équipés de ce système. Mais il faudra du temps pour que tout le parc automobile en soit équipé.


"Elle ne veut pas reprendre le volant"

La compagne de Laurent n'est quant à elle pas encore prête à reprendre le volant. Deux semaines après l'accident, elle reste très marquée par "l'animal qui a surgi de nulle part, le choc, le bruit", raconte-t-il. "Elle garde une appréhension à la conduite, elle ne veut pas reprendre le volant. Je vais devoir l'accompagner quelques fois, mais elle m'a déjà prévenu qu'elle allait rouler à du 30 kilomètres/heure. Ce n'est pas la solution, mais il lui faudra un peu de temps".

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