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Nuisances sonores et "produit cancérigène": l’aérodrome de Temploux rend fous les habitants des environs

La situation devient infernale pour les habitants de la commune de La Bruyère, à côté de Namur, qui sont excédés par les nuisances sonores provoquées par l’aérodrome de Temploux, non loin de leurs habitations.

"On a des nuisances qui sont assez fortes", regrette Vincent, qui fait partie du comité de riverains de La Bruyère. Le principal souci des habitants de ce village, et des autres aux alentours comme Bovesse, c’est qu’ils se situent pile dans le circuit d’atterrissage de l’aérodrome. "Quand il fait beau, ça peut être un avion toutes les minutes."


La piste de l'aérodrome est orientée en plein vers La Bruyère

Pourtant, l’aérodrome de Temploux existe depuis 1944. À l’époque, ce sont les Américains qui ont construit cette base pendant la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Depuis 1947, le terrain est devenu civil et jusqu’à récemment, les riverains ne s’en étaient pas trop plaints. "J’ai l’impression que c’est surtout à partir de la période post confinement", confie le bourgmestre de La Bruyère, Yves Depas. "Depuis que l’aérodrome a été racheté par Olivier de Spoelberch."

C’est en effet le 14 septembre 2017 que le Vicomte, également représentant d’une des principales familles actionnaires de la brasserie AB InBev, rachète cet aérodrome où il a ses habitudes depuis plusieurs décennies. Lors de l’achat, le pilote insistait notamment sur "le respect des droits des riverains", comme le rapporte le journal l’Echo.

Ces paroles étaient-elles sincères ou faisaient-elles uniquement bonne figure ? Le fait est qu’en 4 ans et demi, l’activité de l’aérodrome a explosé.

En 2018, une piste asphaltée a vu le jour et des rénovations des infrastructures ont eu lieu. En tout, les travaux auraient coûté 12 millions d’euros.

L’année d’après, les exploitants ont réussi à faire venir la Sonaca Aircraft. L’entreprise y assemble désormais son modèle "Sonaca 200". L’aérodrome est devenu un pôle économique. Depuis l’arrivée de la Sonaca Aircraft à Temploux d’autres entreprises lui ont emboîté le pas.

En 4 ans, l’aérodrome est passé de 8 emplois directs et indirects à 130 personnes qui travaillent sur site. À terme, la direction espère en accueillir 200.

Pas de dialogue possible

C’en est trop pour les riverains qui demandent une modification du circuit d’atterrissage pour éviter que les avions ne survolent continuellement leurs maisons "afin de réduire les nuisances sonores", réclame Vincent.

Mais les exploitants ne l’entendent pas de cette oreille. "On a eu des réunions avec eux et le bourgmestre, ça s’est mal terminé. Il n’y a pas de dialogue possible", regrette encore Vincent.

"On aimerait trouver un arrangement avec l’exploitant", espère le bourgmestre de La Bruyère qui croit "que ce circuit est attractif pour les pilotes donc que ça ennuie l’exploitant de le modifier."

Un problème cancérigène

La deuxième préoccupation majeure des riverains, c’est le carburant que certains avions utilisent encore : l’essence au plomb. "La loi européenne interdit l’essence au plomb B", explique Yves Depas, le bourgmestre. "Mais il y a une tolérance pour vider les cuves qui tient jusque juin 2022, je crois." Cette tolérance permet aux petits avions de tourisme de continuer à consommer ce carburant, reconnu comme dangereux. "À partir de là (juin, ndlr) les avions plus anciens devront être remplacés", souligne encore le bourgmestre.

Outre la contamination de l'air, du sol, de l'eau potable et des cultures vivrières, l'essence au plomb est critiquée pour favoriser les maladies cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et les cancers.

Si le problème du carburant devrait ainsi être résolu dans les prochains mois, l’arrivée de l’été et de ses beaux jours signifiera aussi plus de trafic au-dessus de la tête de Vincent et de ses voisins. "À l’aérodrome de Saint-Hubert qui est géré par la Région Wallonne, les pilotes qui ne respectent pas les règles sont mis à l’amende. À Temploux, il n’y a rien de tout ça", peste le riverain. 

"Compliqué de se faire entendre"

"On a un peu l’impression que c’est compliqué de se faire entendre, on ne sait pas à quelle porte frapper", constate le bourgmestre Yves Depas. "Le problème c’est que ce sont des lois différentes. Si l’avion est au sol, il dépend de la ville de Namur et s’il est en vol, il dépend du fédéral. C’est un dossier qui est très complexe parce que tout ne dépend pas de l’exploitant ni de la ville de Namur, mais aussi parfois de la DGTA (Direction Générale du Transport Aérien, l’administration de l’aviation civile aussi appelée BCAA pour Belgian Civil Aviation Authority, ndlr)."

Malgré la complexité du dossier, Vincent et les autres riverains ne comptent pas se laisser faire, d’autant qu’ils ont une carte à jouer. L’aérodrome est en train de demander le renouvellement de son permis d’exploitation. S’ils ne veulent pas de la fermeture pure et dure de l’aérodrome, les riverains espèrent obtenir une modification des trajets des avions afin que ces derniers passent ailleurs qu’au-dessus de leurs maisons. "Si pas de raccourcir les circuits alors définir des horaires qui permettent d’avoir une certaine tranquillité comme le dimanche après-midi", ajoute de son côté le bourgmestre.

Pour se faire entendre, les habitants ont lancé une pétition qui rassemble, selon Vincent, plusieurs centaines de signatures dans un seul but : le retour d’un certain calme dans leur campagne namuroise. "Si on ne le fait pas maintenant, on est reparti pour 20 ans."

Contactés, les responsables de l'aérodrome de "veulent pas mettre de l'huile sur le feu" et ne souhaitent pas réagir.

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