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La Super League: "Un pari"

Voici l'analyse de notre expert en économie Bruno Wattenbergh.

Quelle est la stratégie économique des 12 clubs qui revendiquent une championnat à 20 super clubs ?

Rentabiliser le plus possible leur investissement dans des clubs dans lesquels ils ont mis des milliards d’euros. Imaginez que vous achetez une machine technologique pour 4 milliards d’euros, c’est la valeur d’un club comme le Real ou le Barça. Que des millions de clients sont là pour voir des matchs, acheter du merchandising … et cela dans le monde entier.

Et bien, vous avez envie que la machine tourne 24h/24.

Mais ce n’est pas déjà le cas aujourd’hui ?

Oui. On ne peut plus parler de sport uniquement, mais d’une entreprise qui est prise dans le cycle de l’argent. Les investissements réclament plus de chiffre d’affaire, des sources de revenu diversifiées. Le problème, c’est que des clubs comme le Real plafonnent. Et dans l’état actuel ne parviennent pas à aller chercher les millions supplémentaires.

Que voulez-vous dire par là ?

Plus d’argent, cela veut dire plus de matchs. Plus de merchandising, cela veut dire un rayonnement plus mondial encore. Donc des matchs plus prestigieux, plus susceptibles d’être diffusés au niveau de la planète. Ce n’est pas le cas avec les matchs de qualification de la Champion League, quand le Real joue contre un plus petit club. Et sur base des chiffres, ils ont raison parce que l’audience baisse pour les phases de qualifications en Champions League … même si les droits télés ont augmenté.

Et donc il est logique dans le chef d’une entreprise de vouloir aller plus haut … et vous avez cette propositions de Super League, en prenant l’exemple sur la NBA et la NFL aux Etats-Unis …

Les compétitions internationales actuelles rapporteraient trop peu à un club comme le Real ? On a une idée du montant ?

A peu près 120 millions d’euros bon an mal an. Alors est-ce trop peu ? C’est trop peu par rapport à quoi ? Sans doute par rapport au potentiel de cette Super League. Manifestement, les clubs qui rejoignent cette Super League ont fait leur calcul et pensent qu’elle rapporterait plus que la Champion’s League aujourd’hui.

Pour vous donner une idée, l'UEFA pour l’ensemble de ses compétitions de clubs a généré 3,2 milliards d'euros de droits TV en 2018-2019. En contrepartie de leur engagement, les clubs fondateurs se partageront 3,5 milliards d'euros destinés uniquement à des investissements en infrastructures et à compenser l'impact de la crise du Covid-19.

Justement, cette crise du Covid a-t-elle accéléré le processus de scissions ?

Pas directement, sauf peut-être que les clubs ont souffert et que certains peuvent penser avoir mal été traités par l’UEFA, ou mal compensés pour leur manque à gagner.

N’est-ce pas risqué de se mettre l’UEFA à dos ?

C’est un pari. Mais je ne peux pas penser un instant que des clubs aussi puissants et professionnels se soient lancés dans cette stratégie de bras de fer sans être sûr, soit de pouvoir lancer cette Super League, soit de recevoir quelque chose en contrepartie.

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