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Depuis le 19 avril dernier, plus de 6.000 familles de migrants ont été séparées de force aux Etats-Unis, soit plus de deux fois plus qu'indiqué précédemment par les autorités américaines, ressort-il jeudi d'un rapport d'Amnesty International sur la politique migratoire du pays.
L'administration du président Donald Trump ayant déjà procédé à des séparations avant la politique de "tolérance zéro", environ 8.000 familles ont subi un "préjudice catastrophique" depuis 2017, a calculé l'ONG de défense des droits humains sur la base des chiffres qui lui ont été fournis.
Au printemps dernier, des milliers d'enfants ont été séparés des adultes qui les accompagnaient à leur arrivée sur le territoire américain, le résultat de la politique de "tolérance zéro" du président à l'encontre de l'immigration clandestine. Face au tollé et aux images d'enfants terrorisés, Donald Trump a rétropédalé en juin mais plus de 300 jeunes n'ont toujours pas retrouvé leurs parents.
"Vous n'avez aucun droit ici"
Dans son rapport intitulé "USA: 'you don't have any rights here'" (vous n'avez aucun droit ici), Amnesty International revient sur ces séparations et autres pratiques contraires au droit international initiées par le gouvernement américain.
En septembre, le Service des douanes et de la protection des frontières (CBP) a informé l'organisation que ses agents avaient séparé 6.022 "cellules familiales" (expression qui vise tant des individus que des familles entières, les statistiques officielles n'étant pas claires) entre le 19 avril et le 15 août 2018, peut-on lire dans le document. On ignore combien parmi ces personnes souhaitaient demander l'asile. Jusqu'ici, il était question d'environ 2.500 enfants.
Auparavant, entre octobre 2016 et février 2018, 1.768 familles avaient déjà été séparées, d'après un décompte du département de la Sécurité intérieure (DHS). Au total, environ 8.000 familles ont donc été divisées depuis 2017 mais bon nombre de ces opérations n'ont pas été consignées en bonne et due forme, résume Amnesty International.
"Un mauvais traitement voire une forme de torture"
"Ces nouveaux chiffres choquants laissent supposer que les autorités américaines ont soit mal renseigné le public quant au nombre de familles séparées de force, soit continué d'avoir recours à cette pratique illégale sans relâche, en dépit de leurs affirmations et des décisions de justice ordonnant l'arrêt des séparations de familles", s'indigne Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques d'Amnesty International.
L'ONG demande au Congrès de dresser immédiatement un état des lieux complet des séparations de familles par les autorités, lesquelles constituent, au regard du droit international, "un mauvais traitement voire une forme de torture dans certains cas". Amnesty International a interrogé plusieurs parents ou tuteurs durablement traumatisés.
Outres ces séparations, l'administration renvoie massivement des demandeurs d'asile à la frontière mexicaine, ce qui est contraire au principe international de non-refoulement. Amnesty contaste de plus une "augmentation du recours à la détention arbitraire et illimitée des demandeurs d'asile, bien souvent sans possibilité de libération conditionnelle".
"Le Congrès doit agir maintenant"
"Le gouvernement Trump mène une campagne délibérée de violations généralisées des droits humains afin de punir et de dissuader les personnes qui cherchent une protection à la frontière entre les États-Unis et le Mexique", analyse Erika Guevara-Rosas.
"Le Congrès doit agir maintenant pour mettre fin à la détention d'enfants et de familles une bonne fois pour toutes, et financer des solutions permettant d'éviter la détention, telles que le Programme de gestion des dossiers familiaux (Family Case Management Program), dont l'efficacité a été prouvée à 99% pour aider les familles demandeuses d'asile à comprendre et respecter les conditions de l'examen de leur dossier d'immigration."