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Pollution de l'eau aux PFAS: "À l'époque, il n'y avait pas de sentiment d'urgence, aujourd'hui on se demande comment c'est possible", confie une représentante de la SWDE

Après la ministre wallonne de l'Environnement Céline Tellier mardi, c'était au tour du Comité de direction de la Société wallonne des eaux (SWDE) d'être entendu, ce vendredi matin, sur la pollution aux PFAS de l'eau de distribution. "Nous sommes parfaitement conscients que ce qui est arrivé ne doit plus se produire", a admis, durant son audition en commission, Isabelle Jeurissen, l'une des membres du comité de direction de la société.

Demandes de la base de Chièvres

Cette dernière est revenue en détail sur le fil des événements, avec une ligne du temps débutant en 2017. En mai de cette année-là, la base militaire de Chièvres adresse un mail à la SWDE évoquant spécifiquement la présence de PFAS dans l'eau de distribution. Elle fait état de 5 valeurs et demande l'avis de la SWDE qui répond, quelques jours plus tard, que rien n'est prévu à ce propos puisqu'aucune norme n'est en vigueur.

Un deuxième message de l'armée américaine appellera la même réponse: il n'y a ni norme, ni recommandations. "Aujourd'hui, nous ne pouvons évidemment plus nous contenter d'une réponse comme celle-là. Mais il n'y a pas d'alerte de danger imminent, ce qui explique que le collaborateur de la SWDE n'en réfère pas au Comité de direction", a assuré Isabelle Jeurissen.    

Ça commence à bouger en 2021

Il faut attendre juillet 2021, et un message du cabinet de la ministre, pour que la tête de la société soit alertée. L'ISSEP, l'institut scientifique de service public, analyse alors 6 PFAS - il ne sait analyser que ces 6 PFAS-là. Un seul résultat - l'analyse de l'eau brute du puits de Chièvres - atteint 87 ng/L.

"On aurait pu en rester là mais le 6 octobre 2021, l'administration écrit à la SWDE pour adapter le programme de contrôle adopté un an plus tôt. Et le 13 octobre, le comité de direction écrit à l'administration et au cabinet pour aborder de manière globale la question de la présence des PFAS dans l'environnement, et en particulier dans l'eau", a poursuivi Isabelle Jeurissen, représentante du comité de direction  "Nous n'avons pas reçu de réponse spécifique mais les échanges vont se poursuivre", des analyses mensuelles étant réalisées à partir d'octobre 2021, a-t-elle ajouté.    

En juin 2022, l'inspecteur général du SPW s'adresse d'ailleurs à la SWDE pour voir quelles actions ont été entreprises. "Nous lui expliquons ce que nous avons fait et quelle option - celle des filtres à charbon actif - nous avons retenue. Jamais nous ne nous sommes dit que nous allions rester les bras croisés en attendant que la norme de 100 ng/L entre en vigueur en janvier 2026. Nous savions que nous devions agir", a encore dit Isabelle Jeurissen.

Autre membre du comité de direction, Philippe Boury, a quant à lui tenté de rassurer sur la potabilité de l'eau. "L'eau est-elle potable? Je peux le dire sans ambage, oui ! Elle est potable mais elle n'est pas pure. Et c'est normal. L'eau n'est jamais exempte de particules."   "Arrêtons de faire peur. Les normes sont édictées par des gens que nous estimons compétents et 99,8% de l'eau que nous distribuons y répond", a-t-il plaidé face aux députés.

Des zones d'ombre persistent, pointent les députés wallons

Les explications des quatre membres du comité de direction de la SWDE sont loin d'avoir répondu à toutes les questions qui entourent la pollution aux PFAS de l'eau de distribution au sud du pays, ont pointé, au terme de ces auditions, de nombreux députés wallons.

Au coeur de leurs interrogations, un message envoyé par la SWDE le 13 octobre 2021 à l'administration et au cabinet de la ministre Tellier, demandant une concertation sur la présence de PFAS dans l'environnement, et dans l'eau en particulier. Cette demande restera sans réponse, au grand étonnement des députés wallons. "Vous demandez une concertation; elle n'a pas lieu. Vous ne redemandez pas? Ca paraît aberrant", s'est ainsi exclamé Jean-Luc Crucke (Les Engagés). "Nous aurions dû insister", a reconnu Isabelle Jeurissen, l'une des membres du Comité de direction. "Il n'y a pas eu de réunion spécifique, mais il y a des circonstances qui peuvent l'expliquer, dont les inondations de l'été précédent, et les analyses de l'ISSEP sont rassurantes", a-t-elle ajouté en évoquant également des suites indirectes, notamment dans les discussions sur le contrat de gestion.  

On tourne en rond depuis des heures et on n'a pas de réponse à cette question principale

Les ratés manifestes de communication, entre autorités mais aussi vis-à-vis de la population, ont également soulevé de multiples commentaires dans les rangs parlementaires. "Ça ne communique nulle part", a résumé Olivier Maroy (MR) tandis que François Desquesnes (Les Engagés) tentait de son côté de déterminer qui est censé alerter les citoyens s'il y a un dépassement du seuil de 100 ng/L.

"On tourne en rond depuis des heures et on n'a pas de réponse à cette question principale: pourquoi n'a-t-on pas communiqué quand les taux ont explosé alors qu'on communique avant et après? Pourquoi n'a-t-on pas usé du principe de précaution pour dire à la population que son eau présentait quelques soucis, qu'on cherchait des solutions et qu'en attendant, il valait mieux, pour les femmes enceintes, les enfants,... ne pas boire d'eau du robinet", a insisté Olivier Maroy. "Qu'est-ce qu'on craignait? La panique dans les communes? La tache d'huile à laquelle on assiste de toute façon aujourd'hui? Le coût puisque les filtres à charbon coûtent quelques centaines de milliers d'euros?", a-t-il dit en regrettant par ailleurs qu'"on finisse, comme souvent en Wallonie, par se rejeter la balle". "Je me demande si on arrivera un jour à installer une culture un peu plus responsable dans cette région".

"On n'avait pas de recommandations des autorités sanitaires régionales pour communiquer à la population en cas de valeurs élevées", a défendu Isabelle Jeurissen. Quant à l'absence de communication au sein de la SWDE, "les collaborateurs qui ont reçu les messages de l'armée américaine, en 2017-2018,  n'ont pas communiqué, n'ont pas sonné l'alerte parce qu'à l'époque, il n'y avait pas de sentiment d'urgence, pas de danger imminent. Évidemment, aujourd'hui, on se demande comment c'est possible", a-t-elle admis.   "On peut regretter cette communication. A posteriori, on aurait fait autrement et nous en tirons les leçons. Si on doit s'excuser de quelque chose, c'est de ne pas avoir insisté davantage pour avoir des recommandations sanitaires, pour qu'on nous dise ce qu'on pouvait faire ou pas en cas de dépassements. Nous aurions dû être plus proactifs pour être en capacité de communiquer de manière pertinente", a pour sa part conclu Eric Van Sevenant.

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Commentaires

2 commentaires

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  • on se fou de la GEU...LES des gens personnes dés l alerte de la caserne ne bouge leurs culs bein OUI FAUT PAS LES FATIGUERS on passe plus le temps devant la machine a café a blablater qu a travailler NE CE PAS et ce a tout les niveaux

    dominique decarnoncle
     Répondre
  • Et comment se fait il qu'en France aucun problème alors que la toute grande majorité de notre eau vient de ce pays. Serions nous les pollueurs ?

    Philibert Bernard
     Répondre