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L'ex-président brésilien Lula, condamné à 12 ans de réclusion pour corruption, s'est dit "innocent" et peu impressionné par la prison, dans un entretien avec l'AFP jeudi, à huit mois de la présidentielle qu'il espère toujours ardemment remporter.
"Je travaille en partant du principe que je serai candidat, que je vais gagner en justice, prouver mon innocence et que j'aurai le droit d'être candidat", a déclaré Luiz Inacio Lula da Silva, favori des sondages, dans cette interview réalisée à Sao Paulo, plus grande métropole du pays (sud).
"S'ils m'arrêtent, ils arrêteront un innocent", a dit Lula. L'ex-chef de l'Etat, auquel on demandait s'il pensait à la prison, a répondu qu'il "y pense tous les jours". Mais "je n'ai pas peur", a assuré Lula, vêtu d'un t-shirt rouge (de la couleur de son Parti des travailleurs) sous un costume marine.
"Une peine de prison peut être très longue, comme celle de Mandela (...) 27 ans, ou très courte comme celle de Gandhi. Je ne suis pas inquiet et ma seule préoccupation est de prouver mon innocence", a ajouté Lula d'une voix sereine.
La figure de proue de la gauche brésilienne a été condamnée en appel à une peine de 12 ans et un mois fin janvier pour corruption passive et blanchiment, mais est menacée d'une demi-douzaine d'autres procédures en justice.
- "Gagner au 1er tour" -
L'ancien ouvrier métallurgiste âgé de 72 ans est accusé d'avoir reçu un appartement de luxe en bord de mer du groupe de BTP OAS en échange de l'attribution de marchés publics de Petrobras pendant ses deux mandats (2003-2010).
Même si la plupart des analystes le jugent politiquement mort avant même que tous les nombreux recours possibles ne soient épuisés, Lula s'est montré très confiant de pouvoir concourir, et même de remporter le scrutin d'octobre "dès le premier tour".
"Quel est le problème de mes adversaires ? Ils savent tous que si je suis candidat, je serai certainement au second tour, ou je pourrai certainement gagner l'élection au premier tour. Donc, il n'ont pas intérêt à ce que je sois candidat", a-t-il dit.
Lula a toujours clamé son innocence, s'estimant victime d'un complot des élites et des médias pour l'empêcher de se présenter.
Dans un dernier sondage de la fin janvier, il est crédité de 34 à 37% des intentions de vote, très loin devant le numéro deux, le député d'extrême droite Jair Bolsonaro (16 à 18%).
- "Toutes les larmes de mon corps" -
"J’aimerais que mes adversaires politiques respectent la démocratie comme je l'ai respectée", a poursuivi l'ex-président, interrogé pendant une heure et demie dans le studio d'enregistrement installé dans les locaux de l'Institut Lula, un lieu plein de caméras avec des éclairages spéciaux pour la télévision.
"J'ai perdu trois élections pour la présidence de la république (...) je suis rentré chez moi, j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps et je me suis préparé pour les autres élections", a-t-il rappelé, entre deux quintes de toux.
La loi brésilienne n'autorisant pas les candidats à officialiser encore leur candidature, Lula a rappelé qu'en tant que "pré-candidat du PT", qu'il a fondé dans les années 80, il allait "continuer à traverser le Brésil en caravane" tant que son sort n'est pas définitivement tranché.
"Je continuerai à discuter des problèmes économiques du pays (...) et des problèmes de développement du pays jusqu'à ce qu'ils prennent la décision, ou non, de m'interdire d'être candidat via la justice électorale".
Interrogé sur les risques de troubles s'il était disqualifié, Lula a répondu :"Nous allons nous battre démocratiquement pour cette élection".
Ce pays n'a pas la culture de la violence lors des processus électoraux. Comme je suis un citoyen qui croit beaucoup en la démocratie, je veux gagner dans le cadre démocratique, a-t-il dit.
Et comme on est au Brésil, impossible de ne pas interroger Lula sur Neymar, le crack du Paris SG arrivé le jour même dans son pays pour se faire opérer du pied et dont la rapidité de la récupération sera cruciale pour la Selecao.
Alors, Neymar est-il un nouveau Pelé? "Non, ah non! Mais c'est un grand joueur", a rétorqué Lula, se détendant tout d'un coup, et prédisant que "le Brésil (allait) arriver en bonne forme à la Coupe du monde" en Russie.