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En Russie, une rentrée scolaire sous le drapeau

Sergeï Anguelov a accompagné comme d'autres parents russes sa fille de douze ans vendredi pour une rentrée scolaire moscovite placée sous le signe du patriotisme et de la militarisation.

Il assiste à une cérémonie festive. Les enfants sont déguisés, l'hymne national retentit dans la cour et les plus âgés des élèves portent un grand drapeau aux couleurs blanc-bleu-rouge du pays.

"Nous vivons une période difficile, toutes sortes de choses se produisent", souffle à l'AFP ce chauffeur de 39 ans, alors que des drones ukrainiens atteignent maintenant régulièrement la capitale.

Désormais, les enfants ont un nouveau programme conçu pour inculquer la version du Kremklin.

Dès le premier jour, le président Vladimir Poutine a donné lors d'une rencontre avec des adolescents le la des "Conversations d'importance", ces cours d'éducation introduits peu après le début de l'offensive contre l'Ukraine.

Hier contre les nazis comme aujourd'hui contre Kiev, la Russie reste "invincible", grâce à "l'état d'esprit de son peuple", vante-t-il.

Depuis février 2022, plusieurs innovations portant un discours anti-occidental ont été introduites, notamment pour justifier l'assaut contre le voisin ukrainien.

- Drones et Kalachnikov -

Rédigé en un temps record sous la direction d'un proche du chef de l’État, un nouveau manuel d'histoire est à l'image de sa couverture, qui présente le pont voulu par le Kremlin pour relier la Crimée ukrainienne annexée à la Russie.

Tatiana Barabanova, qui enseigne cette matière à Ekaterinbourg dans l'Oural, en fait l'éloge. "Les jeunes sont déstabilisés par les fausses informations qui nous calomnient et ils y trouveront des exemples très clairs de courage voire d'héroïsme", dit-elle.

Elle pourra compter sur le soutien de certains parents à la maison qui comme Sergeï Varalov, un employé du BTP de 55 ans, se félicite qu'on apprenne mieux l'offensive en Ukraine, dans les classes.

"Le monde entier nous est tombé dessus", lance-t-il. "Je ne dis pas qu'il faut faire comme en Corée du Nord, mais nous devons préparer" les enfants, estime-t-il. Il est donc favorable aussi au module de "première formation militaire".

Réintroduit pour l'année 2023-2024, il compte au moins 140 heures de cursus. Il existait déjà sous l'Union soviétique avant de tomber en désuétude et permet notamment aux 15-17 ans de sa familiariser avec le fusil d'assaut Kalachnikov.

En montrant les masques à gaz et des mains en plastiques portant des blessures qui serviront de support pédagogique à ses cours, la professeure Elena Sobatchkina juge que c'est une bonne introduction au "service militaire".

Elle prévoit de faire intervenir des soldats déployés en Ukraine et doit se mettre à jour du maniement des drones, car c'est aussi au programme.

- "Suivre le mouvement" -

Les enseignants qui contrairement à elle ont refusé le nouveau programme ont été écartés. D'autres ont démissionné.

Il s'applique aussi à Marioupol, ville occupée par les Russes où Vladimir Poutine a inauguré un nouvel établissement par visioconférence.

Et à Moscou, Nina Ivanova, une retraitée de 83 ans, préfère voir son petit-fils, qui s'est porté volontaire pour intégrer l'éducation nationale, écrire au tableau qu'enfiler le treillis loin de chez lui.

"J'espère qu'il sera libéré de l'armée" en cas de nouvelle mobilisation grâce à ce poste, explique-t-elle en le regardant dans ses nouveaux habits faire son entrée.

D'autres parents "suivent le mouvement", comme Ioulia, une maman qui n'a pas souhaité donner son nom de famille. "On s'adapte à tout avec le temps", énonce cette Moscovite.

L'artiste Irina Dobrokhotova, revenue de la Crimée annexée par la Russie et constamment ciblée par Kiev pour voir son fils retourner à l'école, admet qu'il y a "des raisons d'être inquiets" à cause de la nouvelle menace des drones.

Mais "tout le monde garde espoir", affirme-t-elle.

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