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Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez devant le juge dans l'enquête visant son épouse

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Juan Medina

Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez doit témoigner mardi dans l'enquête pour corruption et trafic d'influence visant son épouse Begoña Gómez, au coeur d'un intense bras de fer politique et judiciaire qui fragilise son gouvernement de coalition.

Le juge Juan Carlos Peinado, chargé de cette enquête, est arrivé peu avant 11H00 (09H00) dans une voiture bleue au palais de la Moncloa, résidence officielle du Premier ministre, où doit se tenir cette audition, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Cette audition, que le magistrat veut filmer, doit se tenir en présence d'un représentant du parquet et des avocats des différentes organisations ayant décidé de se joindre à la procédure, à l'image du parti d'extrême droite Vox.

Elle sera la deuxième d'un Premier ministre espagnol en exercice, après celle du conservateur Mariano Rajoy, entendu comme témoin lors d'un procès sur le financement illégal du Parti populaire (PP, droite) en 2017.

- Rencontre avec le roi -

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OSCAR DEL POZO

L'audition de M. Sánchez pourrait cependant être extrêmement rapide: le chef du gouvernement espagnol, convoqué sur le seul volet "trafic d'influence" de l'affaire, a en effet le droit de ne pas répondre aux questions, la loi espagnole autorisant les citoyens à garder le silence quand une enquête porte sur leur conjoint.

Le dirigeant socialiste, qui a toujours défendu la probité de sa femme, n'a de fait pas chamboulé son agenda. Présent mardi matin pour le début du Conseil des ministres, le dernier avant une période de vacances, il doit se rendre dans l'après-midi sur l'île de Majorque, aux Baléares, pour rencontrer le roi Felipe VI sur son lieu de villégiature.

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OSCAR DEL POZO

Dans une lettre envoyée mercredi dernier au juge Peinado, le Premier ministre s'était dit mercredi prêt à témoigner, mais uniquement par écrit, afin selon lui de "préserver" sa fonction. Mais le magistrat a refusé cette requête et maintenu sa convocation, en tant qu'époux de Begoña Gómez, malgré un appel du parquet.

Begoña Gómez, qui dirige un master de management à l'université Complutense de Madrid, est soupçonnée d'avoir utilisé les fonctions de son mari dans le cadre de ses relations professionnelles - notamment avec Juan Carlos Barrabés, un homme d'affaires espagnol.

L'enquête la visant a été ouverte après une plainte de Manos limpias ("Mains propres"), un collectif proche de l'extrême droite qui a dit se fonder sur des articles de presse. Une deuxième association, Hazte oír ("Fais-toi entendre"), ainsi que Vox, se sont depuis joints au dossier.

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Pierre-Philippe MARCOU

Entendu mi-juillet par le juge Peinado, M. Barrabés, qui enseigne dans le master dirigé par Mme Gómez, a reconnu l'avoir rencontrée à cinq ou six reprises à la Moncloa, dont deux fois en présence de Pedro Sánchez.

Cet entrepreneur, qui aurait reçu des lettres de recommandation de Mme Gómez pour des appels d'offres de plusieurs millions d'euros, a toutefois assuré que ces réunions se limitaient à des questions sur l'innovation.

- "Harcèlement" -

Convoquée elle aussi par Juan Carlos Peinado, un magistrat de 69 ans dont plusieurs enquêtes ont déjà fait polémique, Mme Gómez avait choisi de garder le silence, son avocat Antonio Camacho assurant que cette procédure n'avait "pas de raison d'être".

Pedro Sánchez est "très nerveux" car "il ne va pas pouvoir faire ce qu'il fait au Parlement, c'est-à-dire se moquer de ceux qui lui posent des questions, se taire ou mentir", a assuré mardi un député de Vox, Jorge Buxade, devant le palais de la Moncloa.

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OSCAR DEL POZO

Au moment de l'ouverture fin avril de l'enquête, le chef du gouvernement espagnol avait créé la surprise en suspendant ses activités pendant cinq jours et en disant songer à démissionner - une menace qu'il n'a finalement pas mise à exécution.

Depuis, il dénonce une "stratégie de harcèlement" émanant de "médias fortement marqués à droite" et soutenue selon lui par les partis d'opposition, à commencer par Vox.

Cette formation, tout comme le Parti populaire (PP, droite), multiplie depuis des semaines les critiques contre le Premier ministre, fragilisé par l'affaire mais aussi par l'absence d'une majorité stable au Parlement - l'exécutif dépendant du soutien de divers partis régionaux, notamment indépendantistes, qui s'opposent souvent à lui.

L'"agonie" de l'exécutif est "irréversible", a estimé lundi la numéro deux du PP, Cuca Gamarra, en déplorant dans un communiqué que le gouvernement ait "plus d'affaires de corruption en cours devant les tribunaux que de lois votées au Congrès".

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