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La communauté asiatique de Californie faisait face à un deuil immense mardi, après deux tueries de masse perpétrées par des tireurs venus de ses rangs, qui ont fait 18 morts près de Los Angeles et San Francisco.
Les deux fusillades ont eu lieu à moins de 48 heures d'intervalle, entre samedi soir et lundi, et la plupart des victimes sont également d'origine asiatique.
Déjà dramatique, ce bilan s'est alourdi mardi, lorsque la police a annoncé qu'un homme armé a tué au moins trois personnes dans l'Etat de Washington. Cet acte, apparemment isolé, ne visait pas la communauté.
Face à ces carnages successifs, le président Joe Biden a appelé à adopter "vite" un projet de loi pour restreindre l'accès aux fusils d'assaut aux personnes de plus de 21 ans.
"Le fléau de la violence par armes à feu en Amérique demande une action plus forte", a-t-il souligné, pendant que le gouverneur de Californie Gavin Newsom fustigeait lui aussi la prolifération incontrôlable de ces armes aux Etats-Unis.
Le ministère chinois des Affaires étrangères a pour sa part exhorté ses ressortissants aux Etats-Unis à "éviter de fréquenter des lieux où les gens se rassemblent".
Les enquêteurs continuent eux d'explorer toutes les pistes pour tenter d'expliquer ces deux drames.
Samedi soir, en plein Nouvel an chinois, onze personnes principalement d'origine asiatique ont été massacrées dans un dancing de Monterey Park, en banlieue de Los Angeles. Puis lundi, sept autres victimes -- certaines asiatiques, d'autres latino-américaines -- sont mortes lors d'une autre fusillade menée dans deux fermes de Half Moon Bay, près de San Francisco.
- Carnages inhabituels -
Dans une Amérique tristement habituée aux fusillades faisant de nombreuses victimes -- 45 ont déjà eu lieu au seul mois de janvier, selon le site Gun Archive Violence --, ces deux carnages sont particulièrement surprenants. Car la violence par arme à feu est plutôt rare au sein de la communauté asiatique et les suspects sont des seniors, âgés de 72 et 67 ans.
Selon l'organisation Violence Project, 79% des auteurs de ces tueries de masse commises entre 1966 et 2020 étaient âgés de moins de 45 ans, et à peine 6,4% d'entre eux étaient d'origine asiatique.
Le massacre de Half Moon Bay a été commis par un homme d'origine chinoise, identifié comme Chunli Zhao et arrêté par la police, avec un pistolet semi-automatique dans sa voiture.
Les victimes, tous employés agricoles, "pourraient être ses anciens collègues", a expliqué mardi la shérife du comté de San Mateo, Christina Corpus. Selon elle, des enfants ont assisté au massacre.
Mardi soir à Half Moon Bay, un moine bouddhiste a fait résonner un bol cérémoniel sept fois en hommage aux sept victimes, devant une cinquantaine de personnes venues se recueillir et déposer des fleurs.
Sans arme, l'histoire ne serait pas allée plus loin, estime Sophie Li, une résidente encore incrédule au lendemain du drame, comme beaucoup d'autres habitants. "Sans fusil, on en reste à une dispute", dit-elle.
- "Dernière danse" -
Cette tragédie est survenue moins de 48 heures après celle de Monterey Park, où le septuagénaire Huu Can Tran a tué six femmes et cinq hommes samedi soir dans une salle de bal.
Selon les autorités, il y a tiré 42 balles avant d'essayer de s'en prendre à un second dancing dans une ville voisine, où un employé a réussi à le désarmer. Cerné par la police, il s'est ensuite suicidé dans son van.
L'arme retrouvée dans son véhicule est un pistolet semi-automatique interdit à la vente en Californie, selon le shérif du comté de Los Angeles Robert Luna. "Qu'est-ce qui a conduit un forcené à faire ça?", s'est-il interrogé.
Les enquêteurs explorent actuellement la piste d'une possible jalousie envers des membres de ce dancing, fréquenté assidûment il y a plusieurs années par le suspect. Mais son profil reste flou: selon CNN, son certificat de mariage montre qu'il a émigré de Chine; le New York Times explique en revanche qu'il s'agit d'un homme d'origine vietnamienne, naturalisé américain.
Le septuagénaire semblait en tout cas agité. Plus tôt en janvier, il s'était rendu deux fois au commissariat de Hemet, son lieu de résidence, pour assurer que sa famille tentait de l'empoisonner ou de lui voler de l'argent.
L'un de ses anciens locataires l'a décrit auprès du Los Angeles Times comme un homme solitaire et rancunier.
"Il se méfie des gens qui l'entourent", a-t-il expliqué sous couvert d'anonymat. "Je pense que sa vie était si misérable et désespérée qu'il a choisi ce jour-là d'en finir, et il voulait que les personnes qu'il n'aimait pas ou qu'il détestait l'accompagnent."
A Monterey Park, où les passants déposent des fleurs en mémoire des victimes, la ville panse encore ses plaies.
Dans un communiqué, la famille d'une des femmes tuées samedi, My Nhan, a expliqué "devoir encore réaliser" l'ampleur de cette tragédie. La sexagénaire "adorait" passer son temps à la salle de bal, ont expliqué ses proches. "Mais injustement, samedi était sa dernière danse."