Partager:
En pleine polémique sur les violences policières, Gérald Darmanin a engagé mardi la procédure de dissolution du groupe "Soulèvements de la terre", qu'il a rendu responsable des affrontements samedi à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) lors d'une manifestation interdite contre les retenues d'eau.
Le ministre de l'Intérieur l'a annoncé lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, au cours de laquelle il a essuyé un feu roulant de questions sur les événements de Sainte-Soline et le maintien de l'ordre lors des manifestations contre la réforme des retraites.
Les images de bataille rangée entre gendarmes et manifestants encagoulés autour d'une "mégabassine" et leur bilan soulèvent depuis samedi critiques, interrogations et inquiétudes.
Au total, deux manifestants étaient encore mardi dans le coma, dont un avec un pronostic vital engagé. Les organisateurs ont évoqué 200 blessés, dont 40 grièvement, et les autorités fait état de 47 gendarmes blessés.
Un bilan bien plus lourd que lors de la précédente manifestation contre les retenues d'eau dans les Deux-Sèvres, également interdite, en octobre dernier.
Selon la gendarmerie, deux gendarmes qui avaient utilisé leur lanceur de balles de défense (LBD) depuis un quad, ont été suspendus et l'Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) a ouvert une enquête administrative.
Samedi, 3.200 gendarmes et policiers étaient mobilisés face à 6.000 à 8.000 personnes, dont 800 à 1.000 "radicaux", parmi lesquels "400 à 500 Black Blocs expérimentés et ultra-violents", selon un rapport du directeur général de la gendarmerie, publié mardi.
Selon ce rapport, 5.015 grenades lacrymogènes ont été tirées, 89 grenades de désencerclement de type GENL, 40 dispositifs déflagrants ASSR et 81 tirs de LBD. Le niveau d'emploi des GENL et LBD est qualifié de "proportionné".
Mardi, M. Darmanin a une nouvelle fois mis en cause "l'ultragauche" qui veut "mettre à bas la démocratie".
La veille, lors d'une conférence de presse, il avait dénoncé "le déferlement inouï de la part d'individus armés et violents" ayant pour "projet de blesser ou de tuer des gendarmes".
- "L'écosabotage" -
Le ministre a insisté devant les députés sur "l'extrême violence de groupuscules fichés par les services de renseignement parfois depuis de très nombreuses années, comme le groupement de fait +Soulèvements de la terre+", un des organisateurs de la manifestation de samedi.
Selon une note du ministère de l'Intérieur datée de mardi, "Soulèvements de la terre" (SLT) "incite et participe à la commission de sabotages et dégradations matérielles".
Créé en 2021 par des "membres de l'ultragauche issue de l'ex- ZAD (zone à défendre) de Notre-Dame-des-Landes" en Loire-Atlantique, SLT a bâti, selon cette note, "le concept de +désarmement+ destiné à faire accepter la pratique de l'écosabotage".
En octobre dernier, lors d'une première manifestation contre les "méga bassines" à Sainte-Soline, Gérald Darmanin avait fustigé "l'écoterrorisme" des auteurs de violence.
Selon les termes de la procédure contradictoire de dissolution, SLT dispose de dix jours pour répondre aux arguments du ministère avant que M. Darmanin ne décide de présenter en Conseil des ministres un décret de dissolution.
"C'est une tentative de diversion qui vise à faire oublier la politique désastreuse et tragique de maintien de l'ordre à Sainte-Soline", a réagi auprès de l'AFP Basile Dutertre, un des porte-parole de SLT.
"Les gens qui ordonnent de tirer sur la foule avec des armes de guerre sont ceux qui nous accusent d'ultra-violence, c'est un retournement sidérant", a également fait valoir M. Dutertre, qui a rappelé que SLT n'était "pas le seul" à avoir appelé à la manifestation de samedi.
"Une centaine d'organisations l'ont fait, parmi lesquelles l'intersyndicale, la Confédération paysanne, des partis politiques, des associations environnementales", a-t-il énuméré.
SLT a appelé à des rassemblements devant les préfectures de toute la France jeudi à 19h00 "contre la répression à Sainte-Soline".