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Signé Giltay: Trump-Biden, le remake aura bien lieu

Le 20 janvier 2025, le prochain président des États-Unis prêtera serment, les derniers sondages donnent Donald Trump en tête face à Joe Biden. Mais il règne de nombreuses incertitudes devant ce remake annoncé. On se prépare à un nouveau duel entre l’establishment de Washington et l’Amérique profonde. Pourtant d’un côté les ennuis judiciaires de Donald Trump, et de l’autre l’âge avancé de Joe Biden pourraient fausser la donne.

Les observateurs en ont longtemps douté, mais la présidentielle de 2024 verra bien s’affronter, Joe Biden et Donald Trump dans une revanche de l’élection précédente. Finalement les primaires n’ont été qu’une formalité, malgré la pugnacité de Nikki Haley côté Républicain. Chez les démocrates il est de tradition de soutenir le président démocrate sortant, Joe Biden n’avait pas de véritable rival au sein du parti. C’est d’ailleurs pourquoi Robert Kennedy Junior, le fils de Bobby Kennedy, frère de John, a décidé de se présenter comme indépendant, en dehors de tout parti, au risque de déstabiliser Biden. Il y a un précédent, en l’an 2000, le candidat écologiste Ralph Nader avait recueilli 2,7% des voix, privant Al Gore de la victoire face à George W Bush.

La première des inconnues, c’est l’âge des candidats. Joe Biden aura 86 ans à la fin de son second mandat. Trump, qui en apparence apparaît plus jeune et plus dynamique, n’a jamais que trois ans de moins que lui. Qu’à cela ne tienne, les trumpistes enfoncent le clou en insistant sur les moindres défaillances du président : lapsus, trous de mémoire, difficulté à descendre de Air Force One, etc…

Establishment contre Bible Belt

Joe Biden présente plutôt un bon bilan en économie et en politique intérieure, sa grande expérience (36 ans sénateur, 8 ans vice-président, 4 ans président) lui permet de naviguer avec habileté dans le marigot de la politique internationale, entre guerre en Ukraine et conflit au Proche-Orient. Trump, c’est tout le contraire, il se conduirait au pouvoir comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. On le voit depuis le début de son procès pour fraude le 6 novembre 2023, il ne sait faire qu’une chose, foncer. Il envisage même de faire campagne derrière les barreaux s’il était emprisonné, ce que la loi permet.

Si l’élection présidentielle devait être la sanction d’une politique, Joe Biden aurait toutes les chances de l’emporter, mais c’est loin d’être le cas. Les sondages lui sont défavorables, malgré son excellente image sur la côte Est et en Californie. L’élection américaine se joue état par état.

Dans l’Amérique profonde, c’est le fighting spirit, l’esprit du combattant Trump qui l’emporte. Hormis la Bible Belt, dans le Sud, du Texas à la Caroline du Nord, il est également donné vainqueur dans 5 des 6 swings states (Nevada, Géorgie, Arizona, Michigan, Pennsylvanie et Wisconsin) dont le basculement peut décider de l’élection. D’après David Axelrod, ancien stratège de Barack Obama, le comportement antidémocratique de Trump devrait le disqualifier… Ça n’est pas le cas. Il fourbit ses armes. Un centre de réflexion très à droite lui a concocté un programme radical qui pourrait révolutionner la démocratie américaine.

Un projet anti démocrate… ou antidémocratique ??

Ce programme, appelé projet 2025, a été rédigé par "The heritage fondation", un cercle ultra-conservateur qui a fait appel pour l’alimenter à des dizaines de groupes extrémistes à travers tout le pays. L’objectif : permettre à Donald Trump, en cas de victoire, de faire passer toutes réformes qu’il désire, sans se heurter comme lors de son premier mandat à des oppositions parlementaires ou constitutionnelles. Si ce programme devait être mis en œuvre, "ce serait la fin de notre pays tel qu’on le connaît" a déclaré Hillary Clinton.

Des destins tels que celui du Hongrois Viktor Orban font rêver le millionnaire aux cheveux orange. Il se voit en autocrate tout-puissant qui, je cite : "va éradiquer la racaille communiste marxiste fasciste et gauchiste qui vit comme de la vermine." L’objectif de Donald Trump tient en un seul mot: la vengeance! Il n’a jamais admis sa défaite de 2020. Plus encore, il n’a pas supporté qu’on s’oppose à sa tentative de coup d’Etat au Capitole, pour renverser le résultat de urnes. Il veut traîner devant les tribunaux son ancien ministre de la Justice William Barr et son ex chef d’état-major, le général Mark Milley, parce qu’ils ont reconnu la victoire de Joe Biden. Par ailleurs, il a prévu de nommer un procureur spécial pour juger Joe Biden et sa famille. On se croirait dans le San Theodoros d’Hergé où, à chaque pronunciamento, le général Alcazar veut faire exécuter Tapioca et vice-versa.

La tentation du pouvoir absolu

Un comble pour quelqu’un qui se prétend ultralibéral et donc opposé à l’appareil d’Etat, il veut mettre la main sur tous les pouvoirs publics, y compris les agences indépendantes, comme celle qui contrôle l’audiovisuel. Il envisage de modifier la constitution pour licencier « 50 000 fonctionnaires marxistes », entendez démocrates, et les remplacer par des fidèles. Projet 2025 a déjà établi des listes de candidats. Ainsi, il pourrait appliquer ses réformes les plus dures, notamment sur l’immigration. Il envisage de faire interner et d’expulser tous les illégaux, ils sont douze millions, et organiser, là encore, je cite : "La plus grande déportation de l’histoire des Etats-Unis".

En 2016, Donald Trump n’avait pas l’expérience du pouvoir, il s’est heurté aux garde-fous légaux qui ont retoqué nombre de ses initiatives. Cette fois, le fou ne veut plus de gardes.

Alea jacta est

Face à un tel adversaire, Joe Biden est-il bien le meilleur candidat démocrate ? La question s’est longtemps posée, mais il est désormais trop tard pour y apporter une autre réponse que oui. Selon une formule consacrée, digne d’un western, "on ne change pas de monture au milieu du gué". L’avenir de Joe Biden est suspendu à son état de santé, et à l’évolution des conflits en Ukraine et en Israël. L’opinion publique américaine commence à se lasser de l’Ukraine, et le président n’arrive plus à faire voter par le Congrès les importants budgets militaires qu’il octroie à Kiev. Quant à Israël, son soutien jusqu’à présent inconditionnel à l’offensive contre Gaza pourrait le priver des votes de la communauté musulmane. Or, dans certains Etats, il suffit de quelques milliers de voix pour décider du scrutin.

"God bless America" chantent les patriotes américains. Avec ce que nous réserve ce duel électoral, il faudrait plutôt entonner un hypothétique : "God save America"!

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