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"Retirada": le musée toulousain des Abattoirs se penche sur "Picasso et l'exil"

En hommage à la "Retirada", l'exode espagnol après la victoire franquiste, le musée des Abattoirs de Toulouse explore avec une exposition "Picasso et l'exil" comment cet épisode historique a influencé l’œuvre du peintre et de nombre de ses contemporains.

Organisée sur trois niveaux du musée, forte de peintures, dessins, gravures, céramiques, sculptures de Pablo Picasso, mais aussi d’œuvres d'une quarantaine d'autres artistes, l'exposition, sous-titrée "Une histoire de l'art espagnol en résistance", plonge les visiteurs dans le contexte de la guerre civile espagnole.

Une guerre qui s'achève en 1939 par la défaite des républicains et l'établissement de la dictature du général Francisco Franco.

La chute de la Catalogne au début de l'année entraînera un exode de près d'un demi-million d'Espagnols à travers les Pyrénées, la "Retirada", dont on commémore en France le 80e anniversaire.

Inscrite dans ce cadre, l'exposition s'ouvre avec un immense rideau de scène, "La dépouille du Minotaure en costume d'Arlequin", offert par Picasso à la ville de Toulouse.

L’œuvre avait été commandée à Picasso en 1936 pour "Quatorze-juillet", une pièce de théâtre de Romain Rolland, montée pour célébrer symboliquement le premier 14 juillet du Front Populaire.

Le parcours se poursuit notamment avec des représentations par le maître espagnol de la colombe -- devenue l'emblème de la paix--, et des dessins préparatoires à Guernica, toile symbole des horreurs de la guerre. Picasso la peignit après le bombardement de la ville de Guernica pendant la guerre d’Espagne, par l'aviation nazie alliée de Franco.

La toile, qui ne quitte jamais le musée Reina Sofia à Madrid, a inspiré le graveur Damien Deroubaix. Sa reproduction de l'oeuvre, composée de 14 panneaux gravés et encrés, est présente à Toulouse.

- Un "exilé volontaire" -

La situation espagnole renforce l'engagement politique de Picasso contre le franquisme et pour la paix, tant dans son art que dans son soutien aux exilés espagnols, en particulier les artistes.

Car Picasso, après la libération de Paris, est au centre d'un réseau international d'aides et de dons à destination des réfugiés espagnols en France, explique Géraldine Mercier, historienne de l'art et commissaire associée à l'exposition.

Il est sollicité par des associations "pour récupérer et centraliser ces dons et les transférer à l'hôpital Varsovie", de Toulouse, aujourd'hui Joseph-Ducuing, qui soigne gratuitement les réfugiés espagnols.

Quant aux artistes que Picasso aidera, nombre sont exposés dans le cadre de cette exposition, tels Javier Vilato et son frère José, Manuel Angeles Ortiz, Julio et sa fille Roberta Gonzales.

Des oeuvres émouvantes sont accrochées, évoquant le parcage de nombre de républicains espagnols dans des camps de détention en France.

Parmi eux, Antoni Clavé, jeune peintre affichiste barcelonais qui mettra son talent au service de l'armée républicaine. Après la chute de Barcelone en janvier 1939, il sera interné dans un camps à Perpignan.

"Picasso, souligne Géraldine Mercier, restera un éternel exilé volontaire". Faisant le vœu de ne revenir que dans une Espagne libérée du franquisme, l'artiste meurt en 1973, sans avoir revu sa terre natale.

Un volet contemporain, invitant un peu plus d'une vingtaine d'artistes, complète cette exposition sur le site des anciens abattoirs de Toulouse.

Abordant le thème de l'exil aujourd'hui, ce sont aussi des témoignages "de l'importance de Picasso dans le message de liberté artistique et individuelle", souligne le catalogue.

L'exposition, qui durera jusqu'au 25 août, doit ouvrir vendredi au public mais cette ouverture pourrait être perturbée par un mouvement de grève au sein du musée.

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