La Libye a commencé jeudi à mettre à exécution ses menaces contre Berne, en représailles à la brève détention d'un fils du numéro un libyen Mouammar Kadhafi à Genève, annonçant notamment que sa flotte arrêtait ses livraisons de pétrole à la Suisse.
Les compagnies nationales de transport maritime et des ports ont "décidé l'arrêt des navires pétroliers libyens chargés de produits pétroliers en direction de la Suisse, le refus de décharger tous les navires suisses et l'interdiction d'entrée de ces navires dans les ports libyens", selon un communiqué conjoint.
La décision a été prise mercredi soir, a indiqué à l'AFP un responsable de la Compagnie maritime libyenne, sans pouvoir préciser si cette mesure est entrée en vigueur.
Elles ont menacé la Suisse de "nouvelles mesures" si "elle ne classe pas dans les prochaines heures le dossier de l'affaire montée de toutes pièces" contre Hannibal Kadhafi, qui affirme avoir été maltraité par la police lors de son arrestation. Les deux sociétés exigent également des excuses.
Le communiqué a été publié en marge d'une manifestation organisée par les deux compagnies devant l'ambassade suisse à Tripoli, la deuxième du genre après celle de mercredi à l'initiative des Comités révolutionnaires, épine dorsale du régime de Mouammar Kadhafi.
La manifestation qui a rassemblé quelques centaines d'employés des deux compagnies s'est dirigée ensuite vers le ministère des Affaires étrangères où une délégation diplomatique helvétique avait des entretiens avec les responsables libyens pour tenter d'apaiser la tension, selon un correspondant de l'AFP.
Selon les organisateurs, les manifestants souhaitaient "se faire entendre" de la délégation suisse.
Hannibal Kadhafi, 32 ans, est officiellement "conseiller" de la Compagnie libyenne de transport maritime qui détient un quasi-monopole du transport des produits énergétiques en Libye, avec une flotte de dix navires.
Premier fournisseur de pétrole à la Suisse, la Libye avait menacé mercredi de stopper ses exportations de brut. Mais des spécialistes du secteur en Suisse avaient minimisé l'impact d'une telle mesure, estimant que la Suisse dispose de suffisamment de réserves et d'autres sources d'approvisionnement.
Le retrait des avoirs libyens dans les banques suisses, la rupture des relations diplomatiques et le départ des sociétés helvétiques sont également envisagés, selon Tripoli.
La Suisse s'attend toutefois à un déblocage rapide des tensions avec la Libye, a indiqué jeudi à l'AFP une porte-parole du ministère helvétique de l'Economie.
Alors que les médias libyens continuent à ignorer cette affaire, Tripoli a déjà pris dès le 17 juillet "des mesures de rétorsion préoccupantes" envers les ressortissants suisses et les intérêts de la Confédération en Libye, selon le ministère helvétique des Affaires étrangères.
Les liaisons aériennes entre les deux pays ont été réduites, les entreprises suisses en Libye ont reçu un ordre de fermeture et les autorités libyennes ont suspendu l'octroi de visas aux ressortissants suisses.
Les bureaux des groupes helvétique Nestlé et helvético-suédois ABB ont été ainsi fermés et leurs responsables ont été interrogés par la police libyenne, selon les deux groupes. L'employé suisse d'ABB demeure en détention, selon sa société.
Le département fédéral des Affaires étrangères a appelé jeudi les citoyens suisses actuellement en Libye à signaler leur présence à l'ambassade.
Hannibal Kadhafi, le quatrième fils de Mouammar Kadhafi, et sa femme avaient été arrêtés le 15 juillet à Genève, suite à une plainte de deux employés de maison qui les accusent de les avoir frappés. Le couple avait été libéré deux jours plus tard après avoir versé une caution d'un demi-million de francs suisses (312.500 euros).
