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Université: début du classement des dossiers, au cœur de la réforme contestée

C'est l'un des grands changements de la nouvelle loi sur l'accès au supérieur: les universités doivent désormais étudier et trier les dossiers des lycéens, chacune selon ses propres critères, alimentant l'accusation de "sélection" brandie par les jeunes qui bloquent actuellement certaines facs.

Jusqu'à l'an dernier, c'est l'algorithme d'APB qui permettait de classer les candidats, avec parfois le recours au tirage au sort pour départager des jeunes dans les filières très demandées. C'est pour mettre fin à ce système, dénoncé comme injuste, qu'a été créée la nouvelle plateforme d'admission post-bac Parcoursup.

Désormais, dans chaque université, une commission d'examen des vœux est chargée d'étudier "manuellement" les dossiers des quelque 890.000 lycéens de Terminale et candidats en réorientation, qui devaient avant fin mars formuler jusqu'à dix vœux (et 20 sous-vœux).

A chaque faculté de déterminer ses critères d'admission en fonction des "attendus" qu'elle a précédemment définis et fait connaître sur Parcoursup.

Le ministère a mis à disposition des universités un outil d'aide à la décision, mais chacune est libre de pondérer différemment chaque critère: les notes des candidats en Première et Terminale, leur filière d'origine, leur motivation, ou encore leurs activités extra-scolaires.

Chaque formation devra ainsi classer les dossiers, en prenant soin de ne pas laisser de candidats ex æquo, pour qu'ensuite l'algorithme "national" de Parcoursup puisse prendre le relais. Les premières réponses tomberont à partir du 22 mai.

"Dans certaines disciplines comme les maths, il sera facile de classer les candidats: on regardera ceux qui ont de bonnes notes dans la matière et viennent de filières scientifiques", souligne Frédéric Dardel, président de Paris-Descartes. "Mais dans d'autres, comme le droit et la psycho, qui ne sont pas enseignés au lycée, ce sera plus compliqué", prévient-il.

Et d'insister: "Notre objectif ne sera pas de sélectionner mais de prendre les étudiants qui vont réussir à la fac". Or "les critères de réussite ne sont pas forcément les mêmes en fonction des filières".

- Refus de classements -

Certaines questions restent pour l'instant sans réponse: les facultés vont-elles regarder les lycées d'origine pour classer les candidats? Comment prendre en compte les lettres de motivation que les jeunes ont dû intégrer à leur dossier?

"Il sera impossible de toutes les lire", admet Frédéric Dardel, qui s'attend par exemple à recevoir 11.000 demandes, donc autant de lettres, rien qu'en psychologie. "Mais on veut laisser leurs chances à certains candidats qui viennent par exemple de bacs technologiques. Pour ceux-là, le dossier et la motivation compteront", assure-t-il.

"Quelle sera la différence entre un dossier à 18,877/20 et un autre à 18,876/20?", s'inquiète pour sa part Georges Haddad, le président de Panthéon-Sorbonne, dans les colonnes du Parisien.

Parcoursup "va responsabiliser les établissements dans la réussite de leurs étudiants", estime-t-il. Mais alors que le site de Tolbiac (Paris-1), qui dépend de son université, n'assure plus les cours depuis plusieurs jours, il reconnaît que la nouvelle loi "implique de la sélection".

Certaines facultés, comme l'université de Bordeaux-Montaigne, refusent d'établir un classement des dossiers.

Si les capacités d'accueil dépassent la demande, comme c'est le cas de Bordeaux, cela ne devrait pas poser de problème.

Mais dans les filières en tension, la situation est plus critique. La licence Sciences de l'éducation à Paris-Descartes par exemple devrait recevoir quelque 3.000 demandes pour 80 places et son responsable refuse de classer les candidats.

Même si elles ne classent pas, les facs doivent de toute façon examiner les dossiers et répondre "oui" ou "oui si" (acceptation conditionnée à un parcours d'accompagnement) pour les filières non sélectives.

Or plusieurs facultés ont d'ores et déjà prévenu qu'elles ne pourraient mettre en place ces parcours pour la rentrée prochaine, comme l'université de Poitiers, "faute de moyens humains".

Ces parcours se mettront en place progressivement, pendant le quinquennat, rassure-t-on au ministère.

Trois universités étaient toujours bloquées vendredi (celles de Toulouse, Montpellier et l'université Paris-8) et ce, depuis plusieurs jours, tandis que la situation sur les sites d'autres établissements était fluctuante, avec des blocages maintenus, levés ou mis en place.

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