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Grogne et appel au boycott des César: Roman Polanski en ligne de mire

Le 28 février prochain se tiendra à paris la cérémonie des César. Mais rien ne va plus pour la remise de trophées du cinéma français. Il y a d'abord cette pétition signée par 200 personnalités du milieu qui dénoncent l'élitisme de l'institution.

Et puis il y a Roman Polanski, nommé dans pas moins de 12 catégories pour son film J'accuse. Le réalisateur accusé de viol et d'agression sexuelle sur plusieurs femmes, poursuivi par Interpol, a-t-il sa place dans une cérémonie comme les César. Pour de très nombreuses femmes, non. Elles ont d'ailleurs manifesté leur désaccord lors de la sortie du film.  

Et dans une lettre ouverte publiée par Le Parisien le 11 février, une dizaine d'associations féministes interpelle "les 4313 professionnels·les du cinéma qui vont voter pour les César 2020" : elles réclament le boycott du film de Polansi dans leurs votes.

"12 nominations aux César pour le film J'accuse de Roman Polanski. 12, comme le nombre de femmes qui l'accusent de viols pédocriminels. Par ces 12 nominations, le monde du cinéma a apporté un soutien franc et inconditionnel à un violeur en cavale, qui a reconnu avoir drogué et violé une enfant de 13 ans et a fui la justice américaine", lit-on notamment dans cette lettre.

Les associations dénoncent aussi "l'hypocrisie" de l'Académie des Césars et réclament un geste fort de sa part : "En 2020, vous avez la responsabilité de prendre position et de refuser de décorer un violeur pédocriminel qui se pose en victime."

La crise aux César

La crise fait rage aux César : quelque 400 personnalités ont dénoncé l'opacité et le manque de démocratie au sein de l'Académie dont ils ont réclamé une réforme profonde, forçant celle-ci à demander en urgence une médiation au CNC.

Dans une tribune publiée lundi soir, des personnalités du cinéma français dont Omar Sy, Bertrand Tavernier, Michel Hazanavicius, Jacques Audiard, Céline Sciamma, Marina Foïs ou Agnès Jaoui ont réclamé une "réforme en profondeur" de l'Académie des César.

Parmi leurs reproches principaux, des "dysfonctionnements", une "opacité des comptes" ou des statuts qui "n'ont pas évolué depuis très longtemps" et reposent encore et toujours sur "la cooptation".

Ils se plaignent aussi que les membres de l'Académie des César n'aient "aucune voix au chapitre, ni dans les fonctionnements" de l'Académie et de la structure qui la régit, l'Association pour la promotion du cinéma (APC), "ni dans le déroulé de la cérémonie".

"Ca peut paraître un peu anecdotique, mais c'est un peu notre vitrine en fait", a souligné mardi soir sur BFMTV le réalisateur Michel Hazanavicius.

Prenant acte de ces critiques, le conseil d'administration de l'Académie des César a indiqué mardi qu'il allait saisir le Centre national du cinéma (CNC) "afin de nommer un médiateur en charge d'une profonde réforme des statuts et de la gouvernance de l'Académie".

"Grave problème"

 La crise est profonde dans cette institution, créée en 1975 par le journaliste et producteur Georges Cravenne et présidée depuis 2003 par le producteur Alain Terzian. 

La liste des membres de l'Académie, constituée de 4.700 professionnels du cinéma, est confidentielle. Pour en faire partie, il faut avoir au moins deux parrainages et avoir participé à au moins trois longs métrages en cinq ans.

L'Académie est elle-même régie par l'APC, dont les membres sont les professionnels ayant reçu un Oscar, les anciens présidents et plusieurs personnalités, soit 47 membres.

Elle est chapeautée par un conseil d'administration composé des membres fondateurs, d'anciens présidents ou de membres de l'Association, 21 personnes au total, parmi lesquelles les cinéastes Costa Gavras, Claude Lelouch ou Tonie Marshall.

Mais, regrette la tribune, "les statuts ne permettent pas qu'un nouveau membre de l'association soit élu par l'intégralité des 4.700 membres".

Les premiers signes de la crise étaient apparus mi-janvier, à l'occasion du dîner des candidats aux nominations pour les César du meilleur espoir.

La Société des Réalisateurs de Films (SRF) s'était indignée que l'Académie ait refusé deux marraines pour des espoirs, la romancière Virginie Despentes et la réalisatrice Claire Denis. Elle avait dénoncé "des agissements opaques et discriminatoires indignes", soutenue par plusieurs réalisateurs et acteurs.

Promesses "insuffisantes"

L'Académie des César avait alors présenté ses excuses puis promis une réforme. Son président Alain Terzian avait annoncé une "modernisation essentielle", passant par l'instauration de la parité.

Dimanche, il avait précisé ces promesses dans le Journal du dimanche, annonçant des mesures en vue d'instaurer la parité au sein du collège des votants (35% de femmes), au sein du conseil d'administration (28,5% de femmes) et de l'APC (17% de femmes).

"Insuffisant" aux yeux des signataires de la pétition. Ils ont estimé qu'"il s'agirait de nouveau d'un système de cooptation, vestige d'une époque que l'on voudrait révolue, celle d'un système élitiste et fermé". "Pourquoi les 4.700 membres de l'Académie ne peuvent-ils pas voter pour élire leurs représentants comme c'est le cas aux Oscars, aux Baftas"?, s'interrogent-ils.

"Une poignée d'hommes pose problème dans le cinéma français en se cooptant mutuellement depuis 30 ans à la tête de toutes les commissions, toutes les organisations", a fustigé sur Twitter le producteur Vincent Maraval. "Outre d'être illégitimes, ils empêchent le renouvellement".

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