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JO-2018: Pinturault, un petit air de Killy

Alexis Pinturault a été élevé au diapason de la réussite du père Claude, propriétaire notamment d'un cinq étoiles de luxe dans la station chic de Courchevel et pour qui, "si on fait quelque chose, c'est pour tout donner et le faire à fond".

Plus abruptement, seule la première place compte, "le deuxième étant le premier des derniers", selon le credo du paternel.

Dure trajectoire à suivre, pour le fils prodige qui peut désormais se prévaloir de trois médailles olympiques: deux de bronze en slalom géant (2014, 2018), dont la seconde dimanche à Pyeongchang, et une d'argent sur le combiné (2018), mais aucune du plus précieux des métaux...

Avec des prédispositions vite décelées, sur la piste jouxtant l'hôtel Annapurna, Alexis, à 26 ans, n'a donc pas encore répondu à la haute attente de ses parents.

La faute à sa polyvalence et à son époque...

Précoce avec deux titres mondiaux chez les juniors, le blondinet a souffert à ses débuts en Coupe du monde, du trop-plein de "chien fou" en lui. Avec pour résultat, son incapacité à rejoindre l'arrivée lors de ses 14 premières courses sur le circuit principal.

Pour cette raison aussi, l'encadrement de l'équipe de France l'a longtemps protégé plus que de raison des attentes de la presse et du public.

A son 19e départ, le Courchevellois confirma enfin son potentiel, deuxième du slalom géant de Kranjska Gora (Slovénie), le 5 mars 2011, à moins de 20 ans.

La saison suivante, il avait commencé fort à Sölden (Autriche), sur le glacier du Rettenbach, où il n'avait été devancé que par Ted Ligety lors du géant d'ouverture. Bon prince, l'Américain, qui dominait alors le géant, l'avait gratifié de ces mots: "C'est un garçon stupéfiant, c'est effrayant de le voir skier".

- Référence Killy -

"Vous le jetez dans la pente, il sait aussitôt positionner son corps dans l'espace", avait renchéri un entraîneur de l'équipe de France.

Le rapprochement avec Jean-Claude Killy devint une évidence quand le skieur de Courchevel s'imposa en slalom le 8 décembre 2012 à Val d'Isère - son deuxième succès sur le circuit majeur après un +city event+ à Moscou - de surcroît dans la station du triple champion olympique de Grenoble 1968.

Comme un passage de témoin à 45 ans de distance. Et la majorité des entraîneurs et observateurs de concorder: depuis Killy, la France n'avait plus produit de polyvalent aussi doué.

Alors directeur de la compétition chez Salomon, Christian Frison-Roche avait loué ses dons de pilote et de metteur au point.

Si l'ascension avait été fulgurante, la fusée "Pintu" a depuis connu quelques ratés dans les couches hautes de la compétition. Certes, le Courchevellois a largement dépassé Killy, 21 à 15, au nombre de victoires d'un Français en Coupe du monde.

Un score à relativiser: Killy avait bâti son palmarès sur les deux premières éditions de la Coupe du monde, qu'il avait dominées avec un calendrier restreint en nombre d'épreuves.

- Polyvalence -

A sa décharge, Pinturault a croisé les spatules de l'Autrichien Marcel Hirscher, son aîné de deux ans, qui a également grandi dans la culture de la gagne. Le "monstre" a soulevé son premier gros globe de cristal en mars 2012 et, depuis, ne l'a plus quitté, sextuple vainqueur record de la Coupe du monde.

Face au Salzbourgeois, "Pintu" ne peut proposer en terme de palmarès individuel que trois troisièmes places au général, deux petits globes du combiné - discipline appelée à disparaître - trois médailles olympiques, et une aux Mondiaux-2015.

Hirscher n'est peut-être pas le seul coupable. Pinturault a aussi été "victime" de sa polyvalence, qui n'a pas d'équivalent actuellement sur le circuit masculin.

Le Français n'a toujours pas tranché, comme l'ont fait les derniers polyvalents d'envergure, Bode Miller et Aksel Lund Svindal. Depuis sa base de slalom géant, devait-il plus se consacrer au slalom ou au super-G, avec vue sur la descente?

Pour Sébastien Amiez, vice-champion olympique de slalom en 2002 et consultant pour RMC, "il a délaissé un peu le super-G qu'il maîtrisait. C'était son choix. Je reste persuadé qu'en descente il y arrivera par la force des choses", pour peut-être se forger un palmarès cinq étoiles.

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