Accueil Actu Belgique Justice

C'était une grande différence entre la Belgique et la France pour juger les attentats: les jurés "ont accompli une tâche colossale"

Dans le procès des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016, la cour d'assises a dévoilé son arrêt ce mardi soir jusque dans la nuit. Sur les dix accusés, six sont condamnés. C'est une étape importante dans la conclusion de cette procédure fleuve.

Relevons un élément important dans ce processus: le travail des jurés. Il a été salué par tous à l'issue de l'arrêt de la cour. Pourtant, il y avait des craintes avant la tenue de ce procès. Des voix réclament déjà depuis un certain temps la suppression du jury populaire pour les Cours d’assises. Et encore plus dans ce cas-ci. S’agissant de terrorisme, certaines voix se demandaient comment des citoyens pouvaient juger des actes aussi graves. D'ailleurs, la France avait fait un choix très différent pour le procès des attentats de Paris, avec une cour d'assises spéciale composée de magistrats professionnels.

Aujourd’hui, tout le monde reconnaît le travail exemplaire des 12 jurés effectifs et 15 suppléants. Personne n’a fait défaut. Ils ont fait preuve de rigueur, de sérieux pour ce procès le plus long de notre histoire. Le procureur fédéral leur a d’ailleurs rendu hommage avec ce message sur Twitter: "Ils ont accompli une tâche colossale. J'espère que tout le monde est conscient de leur sacrifice", a écrit Frédéric Van Leeuw.

Les éditorialistes vantent le modèle du jury populaire

Ce mercredi matin, de nombreux éditorialistes de la presse écrite francophone se sont d'ailleurs exprimés sur le modèle de la cour d'assises belge et de son jury populaire. "Tout au long du procès, le jury populaire a démontré qu'il n'était pas "des buses" . D'un bout à l'autre, on a ressenti que chacun de ces jurés était pleinement concerné par la mission qu'il avait finalement acceptée. Car ils auraient pu se débiner, ils auraient pu produire un certificat médical bidon. Mais ils ne l'ont pas fait… Les 18 derniers jours ont démontré que ce jury populaire était de qualité, consciencieux et concerné par le sort des dix accusés et par la justice qu'ils doivent rendre pour les victimes et pour la société", lit-on ainsi dans L'Avenir.

Un choix différent de la France

Le choix belge, opposé à celui de la cour d'assises spéciale en France, composée de magistrats professionnels, qui a jugé les attentats à Paris du 13 novembre 2015, était "le bon choix", abonde La Libre Belgique. "Face aux terroristes qui s'en prennent gravement à un pays en tuant, en déstabilisant et en intimidant sa population et ses représentants, il fallait une réponse à la hauteur de l'enjeu. Qui mieux que des personnes tirées "au hasard" pour juger des islamistes qui s'en sont pris à des personnes "au hasard" ? La cour d'assises a offert à la société, et non à des magistrats professionnels, le droit et le devoir de juger ceux qui s'attaquent à la civilité de notre société et aux valeurs européennes", écrit le quotidien, avant de poursuivre: "Pour les victimes et leurs proches, le choix du jury populaire est important aussi. Il leur permet, notamment, de témoigner, de voir l'intérêt et l'émotion dans le regard des jurés, et de se sentir écoutés et entendus. (...) Quand les faits sont gravissimes, que la vérité judiciaire soit prononcée par des citoyens offre une dimension supplémentaire : une réponse et une condamnation des actes par la société elle-même."

Par rapport à la cour d'assises de Paris, "Bruxelles n'a pas à rougir des mois qui viennent de s'écouler", estime Le Soir.

De nombreux couacs

Malgré les nombreuses tuiles qui sont tombées sur la cour d'assises de Bruxelles avant et durant les sept mois de procès (échec de la correctionnalisation des faits, demandée avec insistance par le parquet fédéral; conflit larvé entre parquet, cour et SPF Justice autour de l'organisation du procès avec, en point d'orgue, le démontage des box des accusés; lutte des avocats de la défense et de leurs clients pour une fouille des détenus à nu sans génuflexions, décès soudain de Sébastien Courtoy, l'avocat de l'accusé Smaïl Farisi, etc.), la justice tourne, se félicite L'Echo. "Malgré des mois de retard et des hoquets, le procès, le plus long de l'histoire du pays, s'est tenu, vaille que vaille, et a offert aux observateurs une nouvelle preuve que la justice pénale est un élément central du pacte démocratique. Les éléments du dossier ont été présentés à la lumière du jour, exposés, soupesés, discutés. Voici la magie de la cour d'assises: les débats y sont oraux, pas écrits, accessibles et contestables par tous, qu'ils soient puissants ou misérables", relève le quotidien économique et financier, pointant également le calme et la constance de la présidente de la cour d'assises, Laurence Massart.  

Il ne s'agit ni plus ni moins que d'un "procès de haut vol qui rend justice à la justice", résume Le Soir. Il "restera comme un modèle du genre. La capacité qu'a la justice à s'affranchir de l'émotion suscitée par l'abject pour soupeser les responsabilités fait aussi la grandeur et la force d'une démocratie.

Six condamnés, trois acquittés

Six des dix accusés (Oussama Atar, Mohamed Abrini, Osama Krayem, Salah Abdeslam, Ali El Haddad Asufi et Bilal El Makhoukhi) sont déclarés coupables d'assassinats et de tentatives d'assassinat dans un contexte terroriste. Trois ont été donc acquittés de ce chef: Sofien Ayari, Hervé Bayingana Muhirwa et Smail Farisi. Quant au dernier accusé, Ibrahim Farisi, il n'était pas poursuivi pour ce chef d'accusation.

Par ailleurs, huit des dix accusés - Oussama Atar, Mohamed Abrini, Osama Krayem, Salah Abdeslam, Sofien Ayari, Ali El Haddad Asufi, Bilal El Makhoukhi et Hervé Bayingana Muhirwa - ont été reconnus coupables d'appartenance à un groupe terroriste, dont le premier, présumé mort en Syrie, comme dirigeant.   Les deux derniers accusés, Smail et Ibrahim Farisi, ont été acquittés de cette prévention. Ainsi, les deux frères ont été totalement blanchis par la justice durant la nuit de mardi à mercredi, dans ce que l'on a qualifié de "procès du siècle". À l'issue du verdict, les deux hommes, très émus, sont tombés dans les bras de leurs avocats respectifs.
 

À lire aussi

Sélectionné pour vous

Commentaires

2 commentaires

Connectez-vous à votre compte RTL pour interagir.

S'identifier S'inscrire
  • une grande différence de combien de millions d'euros? je pense au changement des box qui ne plaisaient aux accusés etc.....

    jean-pierre lanhove
     Répondre
  • une grande différence de combien de millions d'euros? je pense au changement des box qui ne plaisaient aux accusés etc.....

    jean-pierre lanhove
     Répondre