Le verdict de l'affaire Sanda Dia fait énormément polémique. Ce jeune étudiant est mort durant son baptême estudiantin et les personnes responsables de sa mort ont écopé de 200 heures de travail d'intéret général ainsi que de 400 euros d'amende. Une décision de justice jugée pas assez sévère. Le point sensible de l'affaire étant que Sanda, issu de l'immigration, était baptisé par des jeunes venant de milieux très aisés. La justice de classe est-elle présente dans notre pays ? C'est la question qui a été posée à cinq présidents de partis politiques dans l'émission C'est pas tous les jours dimanche.
Un "jugement scandaleux"
Georges-Louis Bouchez, président du MR : "Je dénonce une justice qui est trop souvent laxiste. Je pense que le grand problème de la justice dans notre pays, c'est que c'est une caste qui ne parle pas assez, qui ne rend pas suffisamment de compte et qui ne s'explique pas suffisamment à l'égard de la population. En l'occurrence, ce jugement est scandaleux. 200 heures de travail, ça représente 25 jours. Ça veut dire qu'ici, on a des personnes qui sont responsables de la mort de quelqu'un et pendant 25 jours ils vont aller à l'accueil d'une commune et après un mois c'est terminé. Le plus choquant, c'est l'anonymat dont ils ont pu se prévaloir. Je n'ai jamais vu ça. Si ça avait été 10 jeunes de Molenbeek qui s'en prennent à d'autres catégories sociales, vous ne croyez pas qu'on aurait eu leurs photos dans le journal ? Il faut être juste avec les mêmes règles pour tout le monde."
"Pas possible de ne pas être choqué"
François De Smet, président de Défi : "Je trouve que c'est toujours délicat de commenter des décisions de justice en raison de la séparation des pouvoirs. Néanmoins, très objectivement, ce n'est pas possible de ne pas être choqué par des peines aussi faibles compte tenu des actes qui ont été posés. Le Conseil supérieur de la Justice s'empare du dossier, nous verrons ce qu'il va se produire. Je ne suis pas sûr qu'il y a une justice de classe parce qu'elle n'hésite pas à s'en prendre à des puissants, à des hommes d'affaires, à des politiques, à des députés et même à les mettre en prison, donc on n'est pas laxiste tout le temps partout. Mais ici, c'est l'accès à la justice et l'inégalité dans le fait de pouvoir se défendre."
C'est dégoutant
Raoul Hedebouw, président du PTB : "On vit aujourd'hui dans une justice de classe. Vous vous rendez compte ? 400 euros d'amende... N'importe quel syndicaliste qui bloque un Delhaize peut avoir 1.000 euros d'amende. Vous imaginez ? Vous tuez quelqu'un : 400 euros. Vous faites une action de grève devant un magasin : 1000 euros. Ils n'ont même pas d'extrait de casier judiciaire. N'importe quel jeune dans les quartiers de Liège ou de Bruxelles aurait tout de suite son casier judiciaire rempli. Depuis les années 90 et l'affaire des enfants disparus (l'affaire Dutroux, ndlr), depuis que Carine et Gino Russo (les parents de Mélissa, ndlr) ont clairement indiqué avoir vécu cette justice de classe, on sait que l'appareil de justice n'agit pas de la même manière quand il s'agit des enfants du peuple et des travailleurs par rapport aux enfants des puissants. Et ça, c'est dégoutant."
Est-ce que ce principe de base de notre démocratie est respecté ?
Rajae Maouane, co-présidente d'Ecolo. "Un des principes de base de notre démocratie, c'est que tout le monde doit être égal devant la justice. Quand on voit le jugement qui a été rendu, on peut légitimement se poser la question : "Est-ce que ce principe de base de notre démocratie est respecté ?". Ce n'est pas évident pour un politique de commenter une décision de justice parce qu'il faut respecter l'indépendance de la Justice, c'est un principe de base, mais un autre principe de base, c'est l'équité et l'égalité devant la justice. Ici, on voit que les peines sont un peu en deçà de ce qu'on aurait pu attendre si la victime ou les bourreaux avaient été d'une autre classe sociale. On doit prendre du recul et se demander si la Justice est en capacité de rendre justice à chacun et chacune de façon la plus équitable possible."
"On ne connait rien des détails de l'affaire"
Maxime Prévot, président des Engagés : "Ça me met mal à l'aise. Ce n'est pas le rôle de présidents de partis politiques de donner la leçon et de faire le procès de certains jugements qui ont été rendus par des tribunaux. On ne connaît rien du contenu des détails de l'affaire. On n'a pas participé aux audiences. On réagit ici plus sur la justice des réseaux sociaux plus que sur la justice réelle. On peut difficilement, comme homme politique, faire le procès de la justice quand, depuis 20 ans, on a tant diminué les moyens alloués à la Justice."

On peut difficilement, comme homme politique, faire le procès de la justice quand, depuis 20 ans, on a tant diminué les moyens alloués à la Justice." Mr Prévot est au moins, comme politicien, honnête avec lui-même. Tous sont loin d'être dans son cas, très loin de là..!