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C'est le Jour J: la France se remet lundi en mouvement après un long confinement, avec port du masque obligatoire dans les transports et casse-tête sanitaire à l'école, sur fond de crainte que la reprise déclenche une nouvelle flambée de l'épidémie de coronavirus. "Grâce à vous, le virus a reculé. Mais il est toujours là. SAUVEZ DES VIES RESTEZ PRUDENTS", a tweeté le président Emmanuel Macron à quelques heures de l'échéance.
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Après 55 jours d'un confinement aussi strict qu'inédit, le bilan quotidien des morts du Covid-19 est retombé dimanche à 70, au plus bas depuis la mise sous cloche d'une bonne partie de la population le 17 mars. Le bilan total reste lourd, avec au moins 26.380 décès, dont 9.738 dans les maisons de retraite. Même si la pression sur les urgences se réduit toujours.
Avec la levée progressive des restrictions, des centaines de milliers de personnes reprennent le chemin du travail, bientôt suivies par les écoliers.
Toutefois, la loi d'état d'urgence sanitaire n'a pas été promulguée dimanche soir comme espéré par le gouvernement, le Conseil constitionnel devant l'examiner seulement ce lundi. Dès lors l'exécutif fait appel "au sens de la responsabilité des Français" pour respecter certaines de ses dispositions dans l'intervalle, ont annoncé l'Elysée et Matignon dans un communiqué. Ceci repousse à lundi soir, sous réserve de cet aval, l'entrée en vigueur de deux dispositions phare: la limitation des déplacements à 100 km et l'attestation obligatoire dans les transports en commun.
Cette remise en mouvement, vitale pour relancer une économie plongée dans une récession jamais vue depuis la deuxième guerre mondiale avec un chômage partiel touchant plus de 12 millions de personnes, inquiète au plan sanitaire.
D'autant que l'apparition de trois nouveaux foyers d'infection dans des zones de l'ouest du pays, classées en "vert", souligne les dangers de ce retour. L'un a justement été enregistré dans un collège où des personnels préparaient la reprise. Un autre dans une entreprise.
Ministres et responsables politiques ont donc redoublé d'appels à la prudence et à la responsabilité.
"Ce n'est pas parce qu'on parle de zone verte qu'il n'y a pas de virus qui circule", a averti Olivier Véran dimanche soir sur TF1. "Nous allégeons les conditions du confinement mais la vie ne peut pas reprendre comme elle était auparavant", a insisté le ministre de la Santé.
La situation dans les transports cristallise les inquiétudes en ce lundi matin. La ministre en charge des Transports Elisabeth Borne et son secrétaire d'Etat Jean-Baptiste Djebbari se sont donc rendus gare de l'Est à Paris pour vérifier les préparatifs.
"J'en appelle à la fois à chaque entreprise et à chaque citoyen pour qu'il prenne aussi sa part dans la réussite de ce déconfinement", a lancé la ministre, alors que le masque devient le sésame obligatoire dans les transports publics.
L'Etat va d'ailleurs mettre "10 millions de masques à disposition des opérateurs de transport", destinés aux usagers, dont 4,4 millions pour la région Ile-de-France, selon le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.
La situation francilienne préoccupe particulièrement: outre le masque, l'accès aux transports en heures de pointe sera soumis à restriction, avec attestation d'employeur requise.
Mais le maintien de la "distanciation sociale" s'annonce périlleux, et la RATP comme la SNCF ont prévenu: il y aura des interruptions de service si besoin.
"On n'est pas à l'abri d'un reconfinement si les règles ne sont pas respectées", a même estimé la présidente de la région, Valérie Pécresse.
Les Franciliens, dont certain "exilés" du confinement regagnaient leur domicile ce week-end, vont-ils alors se précipiter sur leur voitures? Si le trafic automobile devenait "trop intense" la maire de Paris Anne Hidalgo envisage la "circulation alternée". Et encourage ceux qui le peuvent à sortir leurs vélos. Sur deux autoroutes franciliennes, des voies seront réservées au covoiturage.
La météo, qui s'annonce froide et pluvieuse sur une bonne partie du pays, aidera peut-être à contenir les flux, dissuadant certains de sortir.
Les craintes semblent en tout cas largement partagées: 53% de Français disent avoir personnellement plus peur pour leur santé ou celle de leurs proches que des conséquences économiques, selon un sondage Ifop pour le cabinet de conseil No Com dans Le Parisien.
Autre dossier brûlant, le retour à l'école qui inquiète élus locaux, profs et parents.
Lundi verra une pré-rentrée des enseignants pour organiser la reprise. Les élèves sont attendus à partir de mardi, voire plus tard selon les communes. "Près de 86%" des 50.500 écoles de France vont ouvrir, pour accueillir "plus de 1,5 million d'enfants", sur un total de 6,7 millions d'écoliers en maternelle et élémentaire, a assuré au Journal du Dimanche le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer. Les collégiens doivent retrouver plus tard en mai le chemin des classes (selon que leur zone est verte ou rouge), et une décision sera prise à la fin du mois sur les lycées.
Mais de nombreux maires rechignent à rouvrir les écoles face au casse tête des règles sanitaires à faire respecter, notamment par les plus jeunes. Mêmes préoccupations pour les profs, dont certains envisagent un droit de retrait. Et de nombreux parents craignent de remettre leurs enfants en contact potentiel avec le virus.
Le déconfinement marque aussi la fin des attestions à remplir pour tout déplacement. Et la distance dont on peut s'éloigner de son domicile passe de 1 à 100 kilomètres (une raison "impérieuse", notamment familiale ou professionnelle, sera nécessaire pour aller au-delà). L'interdiction de socialiser est également assouplie et les rassemblements jusqu'à 10 personnes autorisés, dans le respect des "gestes barrière".
Quatre régions (Ile-de-France, Hauts-de-France, Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté) et 32 départements, dont Mayotte, où vivent quelque 27 millions de Français au total, restent classées "rouge" en raison de la circulation toujours rapide du virus et du risque de saturation des hôpitaux.