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Décryptage - Le Bitcoin dépasse les 60.000$, comment l'expliquer? "Ça reste un actif influençable et très volatile"

Le Bitcoin poursuit sa montée effrénée, et dépasse la barre des 60.000 dollars ce mercredi. Va-t-il battre son record absolu, obtenu fin 2021? Comment expliquer cette hausse fulgurante? Nicolas Van Zeebroeck, professeur en stratégie numérique à la Solvay Business School nous livre son analyse.  

Le Bitcoin n'arrête pas sa montée fulgurante. A 18h15 ce mercredi, la reine des cryptomonnaies a atteint 63.800 dollars, gagnant plus de 8% rien que dans la journée. 

L'actif a ainsi rattrapé sa descente aux enfers: début 2023, il ne valait plus que 16.600 dollars. Une progression de 30% depuis le début de l'année. Son record historique remonte au 10 novembre 2021 lorsqu'il avait atteint la somme folle de 69.000 dollars. Pourrait-il battre son record dans les prochaines semaines?    

Pour Nicolas Van Zeebroeck, professeur en stratégie numérique à la Solvay Business School, rien n'est sûr: "C'est tout à fait possible, il en prend le cheminMais ça peut aussi partir dans l’autre sens. C’est un actif très volatile, bien plus que les actifs traditionnels", explique-t-il.

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Cours du Bitcoin sur la journée du 28 février 2024 © capture d'écran Coin Market Cap

Comment expliquer cette hausse? 

Plusieurs facteurs expliquent cette envolée. Il y a des éléments conjoncturels, qui sont donc intrinsèquement liés à la situation économique actuelle, et des éléments de fond. "Il y a un intérêt et une confiance croissante dans les modèles de Bitcoin, en tout cas comme objet de placement ou de spéculation. Le Bitcoin a maintenant 15 ans, et il n'a jamais été piraté, c'est une technologie qui a prouvé sa solidité", analyse Nicolas Van Zeebroeck. 

"Structurellement, le Bitcoin est un objet qui existe en quantité limitée: on en émet très peu, juste de manière prévisible", ajoute-t-il. Actuellement, 19 millions de bitcoins sont en circulation. "On sait qu'il n’y en aura jamais plus de 21-22 millions. C'est donc un objet rare et qui est de plus en plus crédible", précise le professeur en stratégie numérique. Et forcément, puisque le Bitcoin gagne en crédibilité, ça attire de plus en plus de monde, ce qui fait que son prix augmente. Car plus il y a de personnes qui investissent dans le Bitcoin, plus le cours augmentera. 

 Il y a un engouement qui se crée juste avant le halving

Le "halving", un évènement qui a lieu tous les 4 ans et qui participe à la hausse du cours du Bitcoin

Ensuite, on approche petit à petit de ce qu'on appelle le "halving" du Bitcoin. Déjà, "halving" en anglais, ça veut dire diviser par deux. Et c'est exactement ce qu'il se passe avec les bitcoins. Cet évènement, qui a lieu tous les 4 ans, consiste a réduire de moitié les nouveaux bitcoins émis. "Ce qui diminue, ce n'est pas la quantité de bitcoins en circulation, mais c'est le rythme de production de bitcoins", explique Nicolas Van Zeebroeck. 

Car pour "produire" de nouveaux bitcoins, il faut les "miner", comme on appelle ça dans le milieu des cryptomonnaies. En résumé, il y a ce qu'on appelle des "mineurs" qui sont en compétition et qui doivent répondre à des équations très techniques, dès qu'une nouvelle transaction en bitcoin est réalisée. Le mineur qui y parvient en premier reçoit un nombre déterminé de bitcoins en récompense de son travail. Cette somme a été fixée dès la conception du Bitcoin. C'est donc cette récompense qui est divisée par deux. 

"Il y aura donc moins de bitcoins émis, et on approche de l'échéance. Alors le cours est à la hausse", observe Nicolas Van Zeebroeck. Le prochain halving aura lieu le 19 avril 2024. Lors des 3 précédents halvings, il y avait déjà eu une montée du cours du Bitcoin. Mais comment expliquer cette hausse juste avant la période de halving? "Car à partir de ce moment-là, il y aura moins de bitcoins émis, ça deviendra encore plus rare. Il y a donc un engouement qui se crée juste avant le halving. Ce qui tire le cours vers le haut", détaille-t-il. 

Un actif influençable par quelques gros acteurs

Mais ce n'est pas tout puisque les institutions financières commencent également à voir un intérêt à investir dans la reine des cryptomonnaies. Ce qui fait aussi fluctuer le cours du Bictoin: "Ça devient un objet institutionnalisé, ce qui rajoute aussi de la pression sur les cours car les banques investissent par centaines de millions. Et donc forcément, ça fait fluctuer", analyse Nicolas Van Zeebroeck. 

Dernier élément, le gendarme boursier américain (SEC) a récemment autorisé des fonds spéculatifs sur le Bitcoin. Depuis, les investisseurs se ruent sur ces nouveaux produits, ce qui fait forcément fluctuer le cours de la reine des cryptomonnaies. 

Pourquoi cette volatilité ? 

Si le Bitcoin fluctue autant, c'est parce que d'une part, il ne repose que sur la confiance, explique Nicolas Van Zeebroeck: "Le Bitcoin, il n’y a rien derrière, juste un algorithme, ce qui rend la chose plus volatile qu’une activité dans le monde physique. Pour les monnaies traditionnelles, il y a la garantie des Etats, mais le Bitcoin, il n'y a rien derrière". 

Deuxième point: il y a un grand décalage entre l'offre et la demande du Bitcoin: "La demande grandit plus vite que l'offre. Il y a donc une très forte sensibilité du cours du Bitcoin à ces écarts entre offre et demande. La demande fonctionne par paquet: si de gros investisseurs s’y intéressent, il y aura un gros effet, et inversement, si de gros investisseurs s’y désintéressent, ça va baisser. Ça reste un actif influençable par quelques gros acteurs". 

Il suffit de pas grand-chose pour refaire tomber le Bitcoin

Est-ce un investissement fiable ? 

Initialement, le projet Bitcoin a vu le jour en 2008 dans un contexte de crise financière, et avait pour but de présenter aux citoyens une alternative au système financier traditionnel. Mais Nicolas Van Zeebroeck appelle à la vigilance: "C'est un actif assez spéculatif et il faut le faire avec prudence. Il faut investir que ce qu'on est prêt à perdre".

Car si le Bitcoin a fait ses preuves en terme de plateforme technologique sûre, il n'a pas démontré qu'il pouvait remplacer la monnaie traditionnelle, explique Nicolas Van Zeebroeck. "Il démontre par son intérêt croissant et sa rareté qu’il pourrait devenir une valeur refuge, un peu comme l’or mais en version électronique", analyse-t-il.

Attention cependant à ne pas investir aveuglément. Car personne ne sait ce qu'il peut se passer: "Il peut y avoir de grosses plateformes d’échange qui se cassent la figure, comme c'est arrivé par le passé, ou des accidents technologiques. Il suffit de pas grand-chose pour refaire tomber le Bitcoin. Il n’y a aucune garantie qu'il ne va pas se casser la figure demain". 

Il existe 3 philosophies d'investissement sur le Bitcoin, mais "aucune d'elles n'ont de garantie":

  • Le Bitcoin a attiré des spéculateurs, qui font de beaux rendements à court terme en jouant à la hausse ou la baisse ;
  • Certains y sont pour la valeur refuge ;
  • Tandis que d'autres sont là pour faire des investissements sur le long terme 

Comment peut-on posséder du Bitcoin ? 

Il y a deux manières de posséder du Bitcoin, et elles ne sont pas sans risque:

  • Soit passer par une grande plateforme d'échange, comme dans une banque. Mais le risque, c’est que si la plateforme se casse la figure, on perd tout (ndlr, comme avec la chute de la plateforme FTX en 2022 ou plus récemment de Bit4you) ;
  • Soit acheter via une plateforme et les transférer ensuite sur un portefeuille qu’on détient sur la chaine de Bitcoin mais il ne faut pas perdre la clé car là aussi, sinon, on perd tout.

"C'est le problème du Bitcoin. Chaque fois que quelqu'un perd sa clé, les bitcoins sont perdus à tout jamais. Alors qu'avec une banque, c'est plus facile: si on perd notre carte ou notre code, ça peut être renouvelé". En conséquence, les bitcoins sur le marché sont nettement moins élevés que ce qu’on imagine, "parce que certains sont bloqués à tout jamais", précise Nicolas Van Zeebroeck. 

Qui se cache derrière le bitcoin ?

Le Bitcoin atteint des sommes folles, mais qui se cache derrière la reine des cryptomonnaies? Tout ce que l’on sait vraiment du créateur du Bitcoin, c’est… son pseudonyme: Satoshi Nakamoto. Il pourrait s'agir d’un homme, d’une femme ou même d’un groupe d’individus. Mais personne ne le sait.

Le 31 octobre 2008, un certain Satoshi Nakamoto annonce son intention de créer une monnaie électronique pour libérer les citoyens du système financier traditionnel, sur fond de crise financière. Le 3 janvier 2009, Satoshi Nakamoto lance le Bitcoin, la toute première cryptomonnaie décentralisée et fiable, et réalise les première transactions avec un ami.

Au début, Satoshi Nakamoto intervient des centaines de fois sur les forums spécialisés pour expliquer sa démarche, donner des détails techniques, et parfois donner quelques informations sur lui. Il disait être japonais, et être né en 1975. Et en 2011, il disparaît de la circulation... Depuis, son identité n'a toujours pas été démasquée et est sujette aux théories les plus folles. 

En 15 ans, la valeur du Bitcoin s’est envolée, passant de 0.001$ à 69.000$ à son pic le plus haut (en novembre 2021). Mais l'idendité de son inventeur, elle, est toujours secrète... "Ce qu’on sait, par contre, c'est que cette ou ces personnes n’ont jamais touché les bitcoins: il y a plus d’1 million de bitcoins qui sont dans les mains de Satoshi Nakamoto et qui n’ont jamais bougé", explique Nicolas Van Zeebroeck. 

Il y a donc 3 théories qui se dessinent:

  • Soit cette ou ces personnes jouent sur du très long terme car en 15 ans, personne n'y a touché ;
  • Soit cette ou ces personnes sont mortes ;
  • Soit cette ou ces personnes ont perdu les clefs de leur propre portefeuille. 

Mais à l'heure actuelle, personne ne sait, et le mystère reste entier...

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