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En cinq ans, une nouvelle génération s'est fait les crocs au Palais Bourbon

La vague du renouvellement de 2017 a déposé à l'Assemblée nationale plusieurs jeunes députés qui, de LR à LFI en passant par En Marche, se sont efforcés de surnager dans un quinquennat de tempêtes sous l’œil de quelques vieux briscards qui ont su garder la barre.

Un coup d’œil dans le rétro et toujours le même constat. Chez les plus capés des députés, les premiers mois du quinquennat restent en travers de la gorge. Dans leur viseur: les néophytes issus d'une majorité qui prétend faire de la politique autrement.

"Ils n'étaient pas préparés à devenir députés", rembobine le socialiste David Habib.

"Ils avaient en plus un discours sur le jeunisme et le dégagisme épouvantable, le numérique devait tout régler...", énumère le vice-président de l'Assemblée, quatre mandats de député au compteur.

Ce début de législature, qui voit débouler "le nouveau monde" dans l'hémicycle sur fond de Macronie triomphante, "a posé un contexte extrêmement rude" et "les anciens l'ont plus mal vécu que nous", relève le jeune LR Fabien di Filippo, 35 ans.

Vient l'été 2018 et l'affaire Benalla qui fait dérailler la réforme constitutionnelle, avant que le vent de colère des "gilets jaunes" ne vienne faire trembler le nouveau pouvoir. Il y a moins de certitudes. Beaucoup moins d'arrogance aussi. "Ils ont appris, ils ont vieilli", complète M. Habib.

Aurore Bergé (LREM) recadre: "au départ il y a eu tout ce procès sur les députés macronistes accusés d'être inexpérimentés voire incompétents. C'était un procès par principe. Comme si on avait remplacé que des gens qui étaient irremplaçables".

L'élue des Yvelines, qui ne dédaigne ni les joutes sur les plateaux TV, ni celles de l'hémicycle et des coulisses, est l'une des jeunes députés de la majorité à avoir su pousser les murs du Palais Bourbon.

La trentenaire a fait ses classes à l'UMP puis LR avant de rejoindre le camp Macron. Tout sauf un hasard.

- "Perdre 15 fois" -

Le chercheur Étienne Ollion l'a souligné dans son récent ouvrage "Les candidats", autopsie de la vie parlementaire sous la législature qui s'achève: les néo-députés qui percent avaient un bagage politique.

Pour réussir dans le "nouveau monde", mieux valait avoir fait ses gammes dans l'ancien.

Habitué des "quatre colonnes" où députés et presse se côtoient, Sacha Houlié (LREM), 33 ans, illustre: "j'ai collé des affiches et distribué des tracts pendant douze ans avant de commencer ici".

"On ne tient pas si on n'a pas la conviction qu'il y a l'espoir de gagner car quand on se lève le matin, on va peut-être perdre 15 fois dans la journée", explique-t-il.

Même credo du côté de l'opposition. Avec cependant un sérieux handicap qui est d'être.... dans l'opposition. "Il y a eu un sectarisme législatif extrêmement important mais j'ai vécu cinq années passionnantes", expose Thibault Bazin (LR), 37 ans.

Avec près de dix ans de politique locale derrière lui, M. Bazin fait partie de cette jeune garde LR à l'Assemblée nationale dont le lotois Aurélien Pradié, devenu N°3 du parti, est la tête d'affiche.

Contrairement à leurs prédécesseurs, ces jeunes députés de droite ne sont pas constitués en bande de "mousquetaires", ce qui ne les empêche pas de retenir les leçons des "anciens".

"On apprend en les regardant", dit M. Bazin.

Pour tout le groupe LFI, l'Assemblée était une première mais "eux avaient l'expérience du combat politique", remarque en connaisseur Marc Le Fur (LR), près de 2.400 heures de présidence de séance au compteur, et dont le premier mandat de député remonte à 1993.

"Personne n'avait jamais été député, pas même Jean-Luc Mélenchon", rappelle Mathilde Panot, 33 ans, devenue leur cheffe de file.

"Le règlement de l'Assemblée, à partir du moment où vous vous l'appropriez, vous pouvez en faire plein de choses", relève l'élue du Val-de-Marne qui vante aussi la "montée en puissance en terme de sérieux" des députés LFI auto-désignés "députés du peuple".

Pour ces jeunes "mordus de la politique", ces cinq années écoulées sont passées en un éclair. En juin, tous voudront reprendre un nouveau ticket pour un deuxième mandat, convaincus que "la politique n'est pas un gros mot".

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