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Rome a repoussé jeudi à fin octobre la date butoir pour conclure la cession de la compagnie Alitalia, initialement fixée au 30 avril, et ce alors que les élections italiennes et l'incertitude politique ont retardé un éventuel accord.
"Il est clair qu'il faut maintenant entrer dans une phase de négociations plus étroite, ce qui présuppose qu'il y ait un gouvernement ayant la possibilité d'exprimer sa propre orientation" et puisse dialoguer avec les investisseurs potentiels, a souligné le ministre italien du Développement économique, Carlo Calenda, après avoir annoncé ce nouveau délai.
Trois manifestations d'intérêt, dont une de l'allemande Lufthansa et une autre de la compagnie britannique EasyJet, ont été remises pour une éventuelle reprise de la compagnie en difficulté.
M. Calenda a souligné que les "interlocuteurs" n'étaient "pas disponibles" à aller de l'avant dans leurs offres avant que ne soit clarifiée la situation politique.
Or, les consultations en cours pour former un nouveau gouvernement après les élections du 4 mars s'éternisent. L'option d'une alliance Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème)/Ligue (extrême droite) a été officiellement enterrée et le Parti démocrate (PD) a renvoyé au 3 mai sa décision pour former ou non un gouvernement avec le M5S.
Et en cas d'échec de ce nouvel axe, le M5S s'est déclaré favorable à de nouvelles élections.
Alitalia, qui emploie quelque 11.000 salariés, a accumulé les pertes ces dernières années face à la concurrence des compagnies à bas coûts.
Elle a été placée sous tutelle en mai 2017, après le rejet par les salariés d'un plan de restructuration prévoyant 1.700 suppressions d'emplois et elle est désormais dirigée par trois commissaires nommés par le gouvernement.
Rome lui a accordé un prêt relais de 900 millions d'euros et a repoussé jeudi le délai de remboursement au 15 décembre, afin de permettre son maintien à flot.
Ce prêt fait l'objet depuis lundi d'une enquête approfondie de la Commission européenne qui veut vérifier s'il est conforme aux règles de l'UE. La Commission s'est dit notamment "préoccupée" par sa durée, supérieure aux six mois autorisés, et par son montant.
- "Situation fragile" -
"Les commissaires travaillent bien, le prêt relais est quasi intact", a souligné jeudi M. Calenda. "Mais il est important de dire que la situation d'Alitalia reste fragile sur le long terme" et que "pour réduire les pertes, il faut des investissements, de nouveaux avions et un accord avec les syndicats" sur l'emploi.
Le ministre avait souligné le 16 avril que la proposition "la plus prometteuse" parmi les trois reçues était celle de Lufthansa, qui avait amélioré sa proposition précédente "tant en termes de maintien des liaisons intercontinentales que du personnel".
Selon la presse italienne, la compagnie allemande souhaiterait la suppression de quelque 4.000 emplois sur les 8.400 qui font partie de la branche "aviation", au lieu des 6.000 suppressions souhaitées précédemment.
Lors d'une conférence téléphonique à l'occasion de la publication des résultats trimestriels, le directeur financier de Lufthansa, Ulrik Svensson, a répété jeudi qu'ils n'étaient "pas intéressés par Alitalia telle qu'elle est aujourd'hui".
"Nous avons remis un document de réflexion, il est important de souligner que ce n'est pas une offre: c'est un document sur ce à quoi pourrait ressembler une Alitalia différente avec des coûts plus bas et un nombre inférieur de liaisons et de personnel", a-t-il ajouté.
Ce document "doit être étudié par les autorités italiennes mais comme il n'y a pas de gouvernement en place, je pense que cela va prendre beaucoup de temps jusqu'à ce que quelque chose se passe de ce côté", a précisé M. Svensson.
"Comme nous l'avons dit de nombreuses fois, le marché italien est très important pour nous, c'est le deuxième plus important après les Etats-Unis", a-t-il encore noté.
EasyJet a présenté de son côté une "manifestation d'intérêt revue pour une Alitalia restructurée, dans le cadre d'une alliance", sans donner de détails ni le nom des acteurs avec lequels elle a noué cette alliance. Selon les médias, il s'agirait du fonds américain Cerberus et de la compagnie américaine Delta.
Selon la presse italienne, la troisième offre aurait été soumise par la low cost hongroise Wizz Air. Interrogée par l'AFP, cette dernière s'est refusée à tout commentaire.