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"Il faut arrêter l'impunité": paroles de victimes un an après #Metooinceste

Dans le sillage de l'affaire Olivier Duhamel, des centaines de personnes ont pris la parole sur Twitter pour dénoncer l'inceste dont elles ont été victimes. Ray, Leila, Mélina et Laurent en font partie. Un an plus tard, ils racontent leur reconstruction.

- Ray Gasseville, 44 ans: "Une validation de la part de la société"

Violé à plusieurs reprises entre ses 6 et 8 ans par un adolescent de sa famille, il a occulté ces souvenirs pendant trente ans.

"C'était très important de confronter mon expérience à celles des autres. Quand j'ai partagé mon histoire, j'ai perçu chaque commentaire, chaque retweet, comme une forme de validation de la part de la société. C'est comme si on me disait: on comprend ce que tu as vécu et on te croit", explique-t-il.

"Cette année, en plus de prendre la parole publiquement, j'ai dû faire le deuil. J'ai accepté le fait qu'on n'en parlerait pas avec ma famille. J'ai essayé avec ma mère, mais elle ne voulait pas comprendre. C'est comme ça."

- Leila* (prénom modifié), 20 ans: "Il est important de former le personnel éducatif à reconnaître les signes"

Pour ses études, Leila a emménagé chez son oncle. Celui-ci l'a agressée et filmée à son insu pendant cinq ans.

"J'avais l'impression d'être la seule à vivre ça dans le monde entier. Voir les personnes partager leur histoire m'a redonné de l'espoir. Depuis, je me sens libérée".

"Il faut protéger les enfants. La première fois où je suis allée voir la police pour déposer plainte, j'étais mineure. Ils ne m'ont pas pris au sérieux."

"Un jour, alors que j'étais toute seule en heure de colle, un surveillant du lycée m'a vu mal-en-point. Il m'a mise en confiance et m'a demandé ce qui se passait. Je ne le remercierai jamais assez pour ça. Après cinq ans de lutte, j'ai enfin craqué. C'est très important que le personnel éducatif sache reconnaître les signaux d'alarme qu'on leur envoie. Il faut une formation, c'est important."

- Mélina Froger, 21 ans: "Il faut arrêter l’impunité"

Violée par son oncle en 2008, 2012 et 2015, cette Rennaise a vu sa plainte classée sans suite. Aujourd'hui, son agresseur travaille dans un camping, auprès d'autres enfants.

"Ça m'a fait mal de voir qu'il y avait autant de personnes qui témoignaient. Qu'elles vivaient toutes la même chose que moi. Cette douleur je ne la souhaite à personne".

"Ma reconstruction a commencé un petit peu avant #Metoo, quand j'ai déposé une plainte contre mon agresseur. Ensuite je me suis réjouie. Je me suis dit que si tout le monde en parlait, ça allait jouer en ma faveur. Mais il y a trois semaines, j'ai appris que l'affaire a été classée sans suite. L'Etat français ne protège clairement pas ses enfants".

"Cette année, il faut arrêter l'impunité. Il faut que les agresseurs soient jugés. On parle, on donne tout mais ça continue quand même. Ça fout la rage, je m'attendais au moins à un procès. Je n'étais pas sa seule victime".

- Laurent Boyet, 50 ans: "La honte change de camp"

Laurent a été violé par son grand frère, rentré d'internat en 1977. Un calvaire qui durera trois ans. Aujourd'hui, il est membre de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) et fondateur de l'association de lutte contre la maltraitance infantile Les Papillons.

"Je voulais faire partie de ce mouvement. Donner du sens à ce qui m'est arrivé. En écrivant mon tweet, je voulais parler à nos enfants intérieurs et leurs dire: c'est à nous", raconte-t-il.

"Un an après, ça va très bien. La honte est en train de changer de camp. 2021 a été l'année des victimes, 2022 doit être l'année où la société accompagne le mouvement".

"Chaque famille doit faire ce que Camille Kouchner a fait. Chaque famille doit arrêter d'inviter +tonton Robert+ alors qu'on sait tous ce qu'il a fait. Il ne faut pas laisser les enfants devenir des adultes complétement cabossés. Il faut que le prochain quinquennat soit le quinquennat de la protection des enfants".

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