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Elon Musk, le charismatique et fantasque patron de Tesla, est jugé jeudi à New York pour outrage à autorité. Une décision défavorable de la juge en charge du dossier pourrait fragiliser le fondateur et meilleur ambassadeur du constructeur de véhicules électriques.
Le milliardaire, dont les idées ont déjà révolutionné les services de paiements (PayPal), est accusé d'outrage par le gendarme américain de la Bourse (SEC).
La SEC reproche à M. Musk, 47 ans, d'avoir multiplié des tweets dont le contenu était susceptible de tromper les investisseurs et d'influencer le cours de l'action Tesla.
Le médiatique entrepreneur, qui s'essaie depuis quelques jours au rap, ne devrait pas être présent à l'heure de l'audience (18H00 GMT) au tribunal, où il sera représenté par ses avocats, estiment des analystes.
Mais si la juge Alison Nathan le condamnait pour outrage, il n'est pas exclu qu'il doive effectuer le déplacement de Los Angeles, où il vit, à New York pour entendre le verdict.
Le bras de fer entre Elon Musk et la SEC est né après un accord à l'amiable conclu entre les deux parties en octobre dernier, à la suite d'un tweet du 7 août de l'entrepreneur assurant disposer des financements appropriés pour sortir Tesla de la cotation en Bourse.
Cette déclaration avait fait flamber l'action et fait perdre beaucoup d'argent à des investisseurs ayant parié sur l'effondrement du groupe, dont la rentabilité demeure fragile plus de 15 ans après sa création.
N'étant pas parvenu à apporter les preuves de son affirmation, Elon Musk s'était vu infliger une amende de 20 millions de dollars par la SEC.
- "Défier l'autorité" -
Le régulateur avait aussi obtenu que toute communication du patron "contenant ou pouvant contenir des informations susceptibles d'affecter Tesla ou ses actionnaires" soit passée en revue par les juristes de l'entreprise avant d'être publiée.
Selon la SEC, M. Musk n'a pas respecté cette dernière clause de l'accord en tweetant, le 19 février, que Tesla allait produire 500.000 voitures en 2019 quand le groupe ne parlait alors que d'environ 400.000 unités du fait de problèmes de production rencontrés par le Model 3, voiture censée en faire un constructeur de masse.
Quatre heures plus tard, le milliardaire rectifiait le tir: "Les livraisons pour cette année demeurent attendues à environ 400.000" unités.
M. Musk "a une fois de plus diffusé des informations importantes sur Tesla à ses plus de 24 millions d'abonnés sur Twitter, dont des journalistes, et rendu accessibles des informations incorrectes à toute personne disposant d'un accès à internet", accusait la SEC.
Rejetant cet argument, les avocats du grand patron font valoir qu'il a respecté les demandes de la SEC en réduisant mensuellement de "près de moitié" en moyenne ses tweets mentionnant Tesla.
Ils accusent à leur tour l'autorité de bafouer la liberté d'expression de M. Musk et estiment que cette action judiciaire est une mesure de représailles à des propos tenus par leur client lors de la célèbre émission de télévision 60 Minutes.
- "Enrichissement des spéculateurs" -
"Je veux être clair. Je ne respecte pas la SEC (...) Je ne les respecte pas", avait déclaré à plusieurs reprises Elon Musk lors de cette émission d'enquêtes diffusée en décembre.
Il avait qualifié sur Twitter la SEC de "Commission d'enrichissement des spéculateurs", quelques jours après l'accord.
Pour Erik Gordon, enseignant à l'université du Michigan, la juge devrait écarter d'emblée l'argument sur la liberté d'expression car les remarques mises en cause entrent dans le cadre de l'accord à l'amiable.
L'universitaire estime toutefois que le tribunal n'ira pas jusqu'à retirer à Elon Musk la direction de Tesla mais devrait brandir une telle menace en cas de récidive.
"L'entretien de 60 Minutes a alimenté l'image selon laquelle Musk est +quelqu'un d'habitué à défier l'autorité+ et ébranle l'argument de la défense selon lequel il a veillé à respecter l'accord" avec la SEC, estime M. Gordon.
Il est possible que la justice inflige des amendes à Elon Musk et à Tesla, ainsi que des restrictions sur son utilisation des réseaux sociaux, affirme de son côté Garrett Nelson, expert chez CFRA Research.
"Si on lui retire sa casquette de directeur général, il devrait sans doute hériter d'un titre du type directeur de la création", avance David Whiston de MorningStar pour qui, quelle que soit l'issue de ce bras de fer, Elon Musk restera très impliqué dans Tesla, dont il détenait 19,6% du capital au 31 décembre.
"Je ne voudrais pas être le nouveau PDG dans une telle hypothèse", avance l'expert.