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L'attente d'un logement social de plus en plus interminable

Avec un nombre record de ménages en attente et des délais pouvant dépasser les 10 ans, obtenir un logement social n'a jamais été aussi difficile, déplorent bailleurs et locataires.

"Au bout d'un moment, j'en ai un peu marre": Isabelle Gautier, auxiliaire de puériculture, a raconté à l'AFP son attente d'un logement social à Fontenay-sous-Bois, qui dure depuis plus de 10 ans.

Dans cette commune du Val-de-Marne, elle habite un deux-pièces de 30 mètres carrés loué pour 700 euros par mois à un particulier, qu'elle partage avec sa fille de 20 ans. Faute de place, elle doit dormir dans la salle à manger.

Pendant tout ce temps, elle n'a reçu qu'une proposition de HLM, il y a environ cinq ans, qui ne lui convenait pas du tout. "C'était un appartement très mal agencé, il y avait des placards cassés... Je ne veux pas vivre dans quelque chose où je ne me sens pas bien".

Et impossible de se loger ailleurs, les loyers dans le parc privé étant inabordables, sauf à s'éloigner beaucoup de là où elle travaille, à Vincennes, et de Fontenay, ville à laquelle elle est attachée.

"Je vis dans cette ville, je paie des impôts, je consomme dans cette ville, je fais du sport dans cette ville, je suis une bonne citoyenne, donc je me dis: mince !"

"Je ne suis pas la seule dans cette situation, il y a pire que moi, mais quand même, en dix ans ! Franchement, c'est honteux", déplore-t-elle.

- "C'est la pénurie" -

Si le marché du logement est ultra-tendu depuis longtemps en Ile-de-France, le phénomène s'amplifie aussi dans d'autres régions, alertent les bailleurs sociaux.

En France, le nombre de ménages en attente d'un HLM n'a jamais été aussi élevé. Fin 2022, ils étaient 2,42 millions, 162.000 de plus qu'en 2021, selon les données de l'Union sociale pour l'habitat (USH).

Parmi eux, les deux tiers (1,63 million) ne sont pas déjà logés dans le parc social. Les autres (797.000) attendent un logement plus adapté à leurs besoins.

"Le nombre de gens qui enregistrent une demande augmente, et ce dans toutes les régions, y compris dans des régions dans lesquelles la progression de la demande était pour l'instant maîtrisée", explique à l'AFP Marianne Louis, directrice générale de l'USH.

"On a plus de demandes, parce que d'une part on ne construit pas assez, et d'autre part les gens qui sont dans le parc HLM le quittent moins qu'avant", soutient-elle. "Parce que le marché privé est trop cher pour eux, ou ils ont des structures de revenus qui ne leur permettent pas d'y avoir accès; je pense aux gens en intérim, qui n'ont pas de revenu issu d'un CDI".

"On siège dans les commissions d'attribution, et c'est la pénurie", dit aussi Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement (CNL), première organisation représentative des locataires dans les conseils d'administration des bailleurs.

"Quand il y a un logement qui se libère, il y a des tas de dossiers qui se présentent et quelquefois, c'est quand même assez compliqué pour choisir qui va avoir le logement...", dit-il.

Eddie Jacquemart, également élu communiste, y voit "la conséquence directe des politiques libérales qui sont menées par M. Macron depuis 2017", les bailleurs sociaux reprochant régulièrement à l'exécutif de faire des économies à leur détriment.

Pour soutenir le logement social, le ministre délégué chargé du Logement, Patrice Vergriete, a promis de "réfléchir à des mesures qui puissent améliorer les fonds propres des bailleurs" et de développer le bail réel solidaire, dispositif d'accession sociale à la propriété.

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