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Nommé vendredi à la tête du JDD, encensé à l'extrême droite, Geoffroy Lejeune est un journaliste trentenaire à l'ascension fulgurante, qui se voit volontiers en mousquetaire ferraillant contre le progressisme et "pour la France".
"L'aventure n'est pas terminée, nous nous retrouverons bientôt ailleurs", écrivait-il sur Twitter lundi, après son licenciement de l'hebdo d'extrême droite Valeurs actuelles.
Trois jours plus tard, la révélation par Le Monde de sa possible arrivée au Journal du dimanche (JDD) y a déclenché une grève quasi-unanime, reconduite vendredi, quelques heures avant l'officialisation de sa nomination.
La rédaction craint un virage à droite toute pour le journal, désormais contrôlé par Vincent Bolloré, milliardaire aux opinions réputées ultra-conservatrices.
"On n'abdique pas l'honneur d'être une cible", revendiquait Lejeune en paraphrasant Cyrano, "l'homme du panache français", dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux fin octobre.
La presse le disait alors en passe d'être renvoyé de son poste de directeur de la rédaction de Valeurs actuelles. Il avait sauvé sa tête en lançant une campagne numérique de soutien au magazine, #JeSuisLàPourVA.
- "Conquête" -
Pour un journaliste de Valeurs actuelles qui veut rester anonyme, l'histoire illustre sa "capacité de rebond": "Geoffroy a du génie, il a une espèce d'énergie assez hallucinante".
A l'inverse, un ancien collaborateur dépeint le journaliste de 34 ans en "enfant gâté" qui a transformé Valeurs actuelles en "secte", et le compare au "gamin dans Astérix qui fait des crises en permanence".
Sollicité par l'AFP, l'intéressé n'a pas donné suite.
C'est en tout cas une altercation, rapportée par Le Monde, qui lui a coûté sa place à Valeurs actuelles.
Le 29 mai, avant une réunion, M. Lejeune s'était vigoureusement opposé à la présence de Jean-Louis Valentin, le nouveau président de Valmonde, groupe propriétaire du magazine.
Selon des informations de presse, cela se doublait de désaccords sur la ligne éditoriale donnée par Lejeune au magazine, que Valmonde aurait jugée trop à droite. Le groupe n'a pas commenté.
A la tête de l'hebdomadaire depuis 2016 (il n'avait que 27 ans), Lejeune en a fait un soutien du candidat d'extrême droite Eric Zemmour à la présidentielle de 2022, sept ans après lui avoir consacré un livre dans lequel il le voyait élu.
Chevelure blonde indisciplinée, petite barbiche, visage poupin et allure d'éternel étudiant, le journaliste est aussi ami avec une autre figure d'extrême droite: Marion Maréchal, petite-fille de Jean-Marie Le Pen, qu'il connaît depuis l'adolescence.
Alors qu'il dirigeait Valeurs actuelles, il assumait une "volonté de conquête" idéologique, dans une interview publiée sur le site de l'Issep, l'école de sciences politiques cofondée par Marion Maréchal.
- "Thénardier" -
"Nous essayons de faire progresser nos idées dans le débat public, de convaincre des gens, de défendre nos positions y compris dans les autres médias traditionnels; je pense notamment aux chaînes d'info qui nous offrent la possibilité de le faire régulièrement", disait-il.
Il fustigeait la "bien-pensance relativiste, progressiste et mollassonne" et disait lutter contre l'"échec des gouvernements de centre droit ou de centre gauche", l'"immigration massive" ou l'"asphyxie fiscale".
Habitué des plateaux télé, Lejeune est rompu aux codes de communication modernes, notamment sur Twitter. En avril, lors d'une soirée de débats organisée par Valeurs actuelles, il était monté sur scène guitare en main pour pasticher une chanson de Vianney.
Son efficacité médiatique lui vaut nombre d'admirateurs à la droite de la droite.
"Tu es l'honneur du journalisme français (...) Tes amis sont fiers de l'amitié que tu leur donnes et de la voie que tu traces", a tweeté Philippe de Villiers après son renvoi de Valeurs actuelles.
Sous la direction de Lejeune, l'hebdo a été condamné à une amende de 1.000 euros avec sursis pour injure publique à caractère raciste envers la députée LFI Danièle Obono.
En cause, un article et un dessin parus en août 2020 sous le titre "Obono l'Africaine", où l'élue d'origine gabonaise était dépeinte en esclave.
Selon Le Monde, Lejeune pourrait arriver au JDD accompagné d'une autre figure de Valeurs actuelles, Charlotte d'Ornellas: "Ce duo est très inquiétant, grince son ancien collaborateur. Ce sont les Thénardier du journalisme d'extrême droite".