Partager:
Le plasticien Claude Lévêque, 70 ans, a été mis en examen pour des viols et agressions sexuelles sur deux frères, mineurs à l'époque des faits, a annoncé vendredi le parquet de Bobigny, selon lequel d'autres victimes ne sont pas à exclure.
"Deux victimes sont visées dans les qualifications retenues, sans exclure qu'il puisse y en avoir d'autres qui se déclareraient pendant l'information judiciaire", a précisé le parquet à l'AFP.
L'artiste est mis en examen pour "viols sur mineur de 15 ans", "viols sur mineur par personne ayant autorité" et "agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité", a détaillé la même source.
L'enquête a été ouverte au printemps 2019 et confiée à la sûreté territoriale de la Seine-Saint-Denis, département où réside le plasticien, à la suite d'une plainte du sculpteur Laurent Foulon.
Dans les colonnes du quotidien Le Monde, ce dernier a raconté avoir été violé par Claude Lévêque dès l'âge de 10 ans et jusqu'à ses 17 ans, au milieu des années 1980. Il a signalé ces agissements dans une lettre adressée à la procureure de la République de Bobigny en février 2019.
Les faits le concernant sont prescrits, indique le parquet de Bobigny. Mais deux nouvelles victimes, deux frères, sont identifiés, révèle Le Monde. Ils sont originaires de la Nièvre et connaissent Claude Lévêque depuis leur enfance. L'artiste a été le témoin de mariage de leurs parents.
Au cours de leurs auditions, l'un d'eux évoque des relations sexuelles entre l'âge de 13 et 16 ans, entre 1997 et 2000. Il dit avoir été " masturbé" à plusieurs reprises par Claude Lévêque, rapporte Le Monde.
"Cela ne me plaisait pas, mais je le supportais. Je le supportais parce que, avec les mots d'aujourd'hui, je dirais qu'il avait une certaine emprise sur moi et qu'on pouvait passer des moments vraiment chouettes en sa compagnie. C'était contraint pour moi, même s'il n'y a jamais eu de violence physique, son comportement et sa forme de manipulation me faisaient accepter ça", raconte l'une des victimes aux policiers.
Son frère aurait subi ses premiers viols par sodomie lorsqu'il était âgé de 10-11 ans.
Les deux frères ont déclaré avoir été sous emprise.
Joint par l'AFP, l'avocat de Claude Lévêque, Me Patrick Klugman, n'a pas souhaité faire de commentaire.
Lors de l'ouverture d'enquête, le plasticien avait pointé des "accusations graves" et dénoncé des "propos diffamatoires et calomnieux soutenus par Laurent Foulon", estimant que ce dernier faisait preuve d'un "acharnement incessant" envers lui, dans un communiqué transmis à l'AFP par son ancien avocat, Emmanuel Pierrat.
- Œuvres encombrantes -
Après les accusations de viols, ses œuvres monumentales sont devenues encombrantes pour les municipalités et lieux d'exposition.
A Montreuil en Seine-Saint-Denis, son installation lumineuse bleue qui s'articule autour du château d'eau de Bel-Air et intitulée "Modern Dance" avait été débranchée un temps puis rallumée à la demande de riverains du quartier populaire, en mars 2022.
Au musée d'art moderne de l'Abbaye royale de Fontevraud (Maine-et-Loire), l'installation "Mort en été", a été retirée de l'exposition permanente à la demande de la présidente du conseil régional des Pays de la Loire, Christelle Morançais.
Figure à la mode des avant-gardes de la fin des années 1970, l'artiste libertaire est connu pour ses installations, aux thèmes souvent provocateurs.
Fin 2018, un diadème aux 16 branches d'inox au sommet de l'Opéra Bastille et deux énormes roues lumineuses sur le grand escalier du Palais Garnier avaient fait polémique, certains jugeant ces installations déplacées.
Il a œuvré dans des lieux emblématiques comme le Louvre, la Banque de France, le bassin des Tuileries, mais aussi dans une cité HLM, des usines désaffectées...
Artiste invité du Pavillon français à la 53e Biennale de Venise en 2009, il présentait une cage en forme de croix avec des drapeaux noirs qui flottaient en silence: un "Grand Soir", voulant illustrer "la perte des illusions", avait-il alors expliqué.