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Le projet controversé d'autoroute Toulouse-Castres prend de plus en plus une dimension internationale, avec la visite du rapporteur spécial de l'ONU, Michel Forst, venu jeudi voir les opposants, quelques jours après l'écologiste suédoise Greta Thunberg.
M. Forst, rapporteur spécial de l'ONU sur la protection des défenseurs de l'environnement, est arrivé en début d'après-midi sur la Zone à défendre (ZAD) mise en place à Saïx, dans le Tarn, par les anti-A69 qui l'ont accueilli sous les hourras, ont constaté un photographe et un correspondant de l'AFP.
En présence des gendarmes, qui tenaient à distance journalistes et la quarantaine de militants sur place, il a d'abord déclaré avoir "besoin de calme et d'espace", demandant à ce qu'on le "laisse faire (son) travail".
Puis il est monté à bord d'une nacelle pour s'entretenir avec les opposants, baptisés "écureuils", qui campent dans des arbres menacés d'abattage pour la construction de l'autoroute.
Le rapporteur spécial de l'ONU a ensuite expliqué être là pour "faire un travail d'investigation, recueillir des témoignages, entendre la parole des uns et des autres, avant de réagir".
"J'ai demain (vendredi) un entretien avec le préfet à 11h00 à Albi. Bien évidemment, c'est important qu'on écoute pas seulement la voix des militants qui sont dans les arbres, pas seulement la voix de ceux qui les accompagnent, mais également la voix des autorités nationales", a-t-il ajouté, précisant qu'il verrait après "s'il y a lieu ou non de faire une communication publique".
- Des arbres abattus -
Puis il s'est entretenu avec des militants sur un terrain privé aux abords de la ZAD, hors présence des journalistes.
Son attachée de presse a indiqué à l'AFP qu'il venait aussi "recueillir des informations complémentaires auprès des observateurs de la Ligue des droits de l'Homme (LDH)" et qu'il avait "rendez-vous avec les deux avocates Claire Dujardin et Alice Terrasse", qui représentent les anti-A69.
Le 16 février, M. Forst avait écrit sur X que "les alertes sur les méthodes de maintien de l'ordre actuellement employées contre les militants pacifiques sur le chantier de l'A69 sont alarmantes. Il est indispensable d'apaiser la situation sur place pour que la démocratie environnementale s'exerce".
Les forces de l'ordre encerclent la ZAD depuis plusieurs jours et sont accusées par les opposants d'empêcher le ravitaillement des "écureuils".
M. Forst a précisé leur avoir "apporté des médicaments". "On a discuté également du ravitaillement en eau et en produits de première nécessité", a-t-il ajouté.
Peu avant son arrivée, un des militants avait été contraint de descendre par des gendarmes qui l'ont interpellé.
Dans la matinée, au moins cinq arbres ont été abattus, alors que des tronçonneuses se faisaient entendre, derrière plusieurs fourgons de gendarmerie.
A la chute d'un des arbres, des opposants ont hurlé des slogans hostiles aux forces de l'ordre, du style: "Vous êtes des monstres de la pire espèce!", "Des monstres au service de monstres!" ou "Gendarmerie pourrie!"
Sur place, la députée LFI Karen Erodi a demandé "un moratoire, en attendant le résultat de la commission d'enquête parlementaire" qui a été créée.
Lundi, une nacelle avait déjà été amenée sur place et avait permis aux forces de l'ordre de détruire une des plate-formes où campent les anti-A69. Les "écureuils" s'étaient alors repliés sur une autre partie de la zone, à l'aide de cordes pour passer d'un arbre à l'autre.
Atosca, le concessionnaire privé de l'A69 désigné par l'Etat, estime avoir depuis le 15 février le droit de reprendre les coupes d'arbres sur le tracé.
- "Enjeu environnemental" -
Mais pour le collectif d'opposants La Voie est libre, le bois occupé par les zadistes est à "enjeu environnemental fort" et ne peut être défriché qu'entre le 1er septembre et le 15 octobre.
La militante écologiste suédoise, Greta Thunberg, était venue le 10 février leur apporter son soutien.
Plusieurs manifestations ont été organisées contre le projet, les opposants proposant des alternatives, telles l'amélioration de la route nationale existante ou de la desserte ferroviaire.
Pour sa part, Atosca défend son projet, "exemplaire" en termes de respect de l'environnement ou de création d'emplois, arguant que l'emprise sur les terres agricoles a été réduite de 380 à 300 hectares.
Des élus du Tarn ont dénoncé un chantier en "totale contradiction avec l'urgence climatique", mais d'autres, de tous bords politiques, soutiennent la construction de cette portion d'autoroute de 53 km, qui réduirait d'une vingtaine de minutes le trajet Castres-Toulouse, actuellement d'environ 1h20.
Le gouvernement s'est dit décidé à mener "jusqu'à son terme" le projet, dont la mise en service est prévue en 2025.
fpp-pho-cor-dmc/dch