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Etat de droit: Varsovie donne des gages à l'UE pour tourner la page

Le gouvernement polonais a présenté mardi à Bruxelles un plan d'action pour mettre un terme à une procédure européenne lancée contre Varsovie en réaction aux réformes controversées du système judiciaire du précédent pouvoir nationaliste.

"Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour restaurer l'Etat de droit", a déclaré le ministre polonais de la Justice, Adam Bodnar, après avoir exposé cette feuille de route aux ministres des Affaires européennes de l'UE réunis à Bruxelles, ainsi qu'à la Commission européenne.

Les réformes judiciaires entreprises à partir de 2017 par les conservateurs nationalistes du parti Droit et Justice (PiS), accusées d'avoir sapé l'indépendance des juges, ont aussi poussé Bruxelles à bloquer plusieurs dizaines de milliards d'euros de fonds européens destinés à la Pologne.

Les principaux points du plan d'action dévoilé mardi pour rétablir l'indépendance de la justice concernent les statuts du Conseil national de la magistrature, de la Cour suprême, du Tribunal constitutionnel, des tribunaux de droit commun mais aussi la séparation des fonctions de ministre de la Justice et de chef du parquet national.

- Réactions "très positives" -

Après des années de bras de fer entre Bruxelles et le précédent pouvoir, la Commission a salué les efforts du nouveau gouvernement pro-européen de Donald Tusk. Et les réactions des autres ministres européens lors de la réunion de mardi ont été "très positives", s'est félicité le commissaire à la Justice Didier Reynders.

"La Pologne est en train de passer du statut d'enfant à problèmes en matière d'Etat de droit à celui de champion de la démocratie", a abondé la ministre allemande Anna Luehrmann.

La Commission européenne avait activé en décembre 2017 contre la Pologne l'article 7 du Traité de l'UE, prévu en cas de menaces sur l'Etat de droit.

Cette procédure - qui a depuis été enclenchée également contre la Hongrie - peut en théorie aller jusqu'à une suspension des droits de vote d'un Etat au Conseil de l'UE.

Elle est prévue comme dernier recours face à un pays commettant "une violation grave et persistante" des valeurs de l'UE. Dans le cas de la Pologne, la Commission avait estimé que l'appareil judiciaire était devenu inféodé au pouvoir politique.

En pratique, cette procédure n'a donné lieu qu'à des discussions régulières au sein du Conseil (réunion des ministres), sans que soit enclenchée la phase suivante menant à des sanctions.

-"Encore du travail"-

Le nouveau gouvernement polonais espère convaincre l'UE de mettre fin à cette procédure de l'Article 7 d'ici les élections européennes, prévues du 6 au 9 juin.

"Le plan d'action est un pas dans une direction qui peut conduire à la fin de la procédure de l'Article 7. Mais il y a encore du travail à faire", a souligné la vice-présidente de la Commission, chargée des valeurs et de la transparence, Vera Jourova.

La signature du président conservateur polonais sera requise pour entériner de nouvelles législations. Ces propositions "ne bénéficient pas du soutien de tous les acteurs en Pologne et des blocages sont à prévoir", s'est inquiétée Anna Luehrmann.

La Commission européenne, dont la présidente Ursula von der Leyen doit se rendre vendredi à Varsovie, n'a pas voulu s'avancer sur un calendrier pour la fin de cette procédure, ni sur une date pour un premier versement des fonds européens jusqu'ici gelés.

Car les mesures destinées à restaurer l'indépendance de la justice sont aussi des conditions au déblocage de 76 milliards d'euros de fonds de cohésion et de près de 60 milliards de fonds du plan de relance post-Covid (34,5 milliards de prêts et 25,3 milliards de subventions).

"Ce sont différents types de processus. Mais à chaque fois (ces décisions) sont basées sur une évaluation que nous faisons", a simplement commenté Didier Reynders.

L'UE a déjà autorisé en novembre le versement d'une avance de 5,1 milliards d'euros à ce pays. Cette somme n'était soumise à aucune condition, contrairement au reste des fonds actuellement bloqués.

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