Accueil Actu Régions Hainaut

Institutrice dans l'école incendiée à Montignies, Évelyne a vécu l'incendie en pleine nuit: "Il y avait des larmes, il y avait des cris"

Une école a encore été incendiée la nuit dernière à Charleroi. Les dégâts sont limités, mais 70 élèves se retrouvent sans classe. La ministre de l'Éducation dénonce des "actes de terrorisme". Sur place, c'était l'incompréhension ce vendredi matin.

Un établissement scolaire a été touché par un incendie cette nuit dans la région de Charleroi. "École des cités à Montignies-sur-Sambre endommagée par les flammes", nous a écrits un témoin via le bouton orange Alertez-nous.

Les pompiers de Charleroi ont été appelés vers 23h00, jeudi soir, pour un incendie dans l'école communale des Cités, à Montignies-sur-Sambre. La police de Charleroi, via son porte-parole, a confirmé l'absence de lien établi avec le projet Evras (Éducation à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelles).

70 enfants se retrouvent sans classe

Ce vendredi matin, c'est la stupeur pour les parents venus amener leurs enfants. Le bâtiment est inutilisable. Suite à l'incendie et l'intervention des pompiers, de grandes quantités d'eau sont toujours dans les classes et une odeur de fumée persiste. Les dégâts restent limités et les autorités espèrent pouvoir rapidement rouvrir le bâtiment touché. Des élèves ont dû rentrer chez eux. Trois classes sont concernées en 1ère, 4e et 6e primaires. Cela représente environ 70 élèves. Le directeur attend le passage d'un expert pour savoir si les élèves pourront rapidement réintégrer le bâtiment ou s'il faudra trouver d’autres locaux provisoirement.

Un lien avec l'EVRAS?

Si aucun tag ou message de revendication n'a été trouvé sur les lieux, le feu pourrait être lié aux autres incendies survenus dernièrement. Dans la nuit de mardi à mercredi, quatre écoles communales carolos ont été visées par des incendies d'origine criminelle. Des tags faisant référence au projet d'Éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (Evras) ont été retrouvés sur les sites. Le lendemain, un établissement de Monceau-sur-Sambre a été touché.

Le cours Evras n'est pas un cours régulier. Il consiste en une animation de deux heures assurée par des intervenants extérieurs agréés à deux moments de la vie scolaire des élèves. Il est donné une fois aux élèves du sixième niveau de primaire (11-12 ans) et une fois à ceux du quatrième niveau de secondaire (15-16 ans). Obligatoire depuis 2012, il n'était jusque-là pas systématiquement assuré faute de moyens. Son but est de "rassurer les élèves sur des questions qu'ils se posent à la puberté" et de les "protéger de situations potentiellement dangereuses ou problématiques", a insisté la ministre citant "sexisme, violences sexuelles, stéréotypes de genres".

Des citoyens et groupes ont véhiculé de nombreuses fausses informations sur les réseaux sociaux, provoquant chez certains une opposition au projet à partir d'arguments qui ne correspondent pas à la réalité.

Ici, c'est une école de famille... tout le monde a été impacté

Nous avons rencontré Évelyne Sluyers ce vendredi matin. Institutrice d'une classe de 4e primaire, elle habite le quartier et a assisté à l'incendie en pleine nuit. "J'ai vu des anciens élèves, j'ai vu des parents, des élèves courir vers moi. On était tous choqués. On était outrés de ce qu'il se passait. Il y avait des larmes, il y avait des cris", nous confie-t-elle.

Ce matin, l'émotion est toujours vive, pour l'enseignante et pour ses élèves. "Ce matin (on a) des petits loulous à consoler, à tenir bon et à les rassurer. À leur dire que ça va aller, que madame ça va... essayer de relativiser avec eux. Ils sont petits, ils sont mal, c'est leur maison. C'est notre maison. Ici, c'est une école de famille. On est tous une famille. Tout le monde a été impacté. Les petits étaient dans un état déplorable ce matin", précise Évelyne.

Évelyne travaille dans l'école depuis 19 ans et vit à proximité depuis plus de 20 ans. "Moi, c'est mon quartier, c'est ma famille. Nos enfants sont venus à l'école ici. On a vu tous les enfants de l'école. C'est des familles, c'est des amis. On nous touche nous. On touche notre famille. Quand on touche à la famille, c'est normal qu'on soit dans cet état-là, dans cette colère, dans cette tristesse. Je ne comprends pas comment on peut faire du mal à des enfants", explique l'institutrice.

Ce jeudi, une réunion avait justement été organisée avec des parents pour leur expliquer le projet EVRAS et répondre à leurs questions. D'après l'enseignante, l'ambiance était calme. "Le ressenti que j'ai eu, c'est que tous les parents avaient bien compris le message. On leur a dit que c'était comme d'habitude. Qu'il y a plus de vingt ans qu'on fait ça en sixième année. Que ça ne toucherait pas les petits. Nos parents, ils nous connaissent. Ils ont confiance en nous. On est sortis tous sereins de cette réunion", nous dit-elle.

Nous avons interrogé des parents. Pour eux aussi, c'est l'incompréhension. "On ne s'attaque pas aux écoles. Quel que soit le problème, on ne touche pas aux écoles. C'est l'éducation de nos enfants. J'essaie de rester poli, mais c'est dur. S'attaquer aux écoles, c'est juste stupide, j'espère qu'on va les attraper", confie Dimitri, papa d'un enfant de six ans. "Les gens qui font ça, ils pensent bien faire, que c'est pour l'histoire d'EVRAS. Ils sont mal informés. Ils font ça la nuit en se disant que ça ne touche pas les enfants. Les gens sont mal informés, ils réfléchissent mal. Ça me stresse plus pour le monde que pour les enfants", nous indique Mehdi, papa d'un enfant de sept ans.

Bourgmestre et ministre parlent d'actes "de barbarie" et de "terrorisme"

Dans la matinée, le bourgmestre de Charleroi, Paul Magnette, s'est rendu sur les lieux. Il était accompagné de la ministre de l’Éducation de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Caroline Désir. Tous deux ont écouté les responsables de l'école et ont tenté de les rassurer sur les procédures liées à l'enquête et aux réparations. Le bourgmestre et la ministre ont indiqué qu'un soutien psychologique serait mis en place.

Le bourgmestre a réagi à notre micro ce matin: "Ces actes de barbarie continuent, tout ça fondé sur des informations totalement fausses, sur des campagnes de diffamation fondées absolument sur rien. On voit bien des campagnes menées par l'extrême droite, par des mouvements religieux radicaux sur les réseaux sociaux, qui donnent des informations totalement fausses au public, et puis ça donne des réactions comme celles-ci. C'est terrifiant, on a des enseignants qui sont en larmes, des enfants qui étaient en pleurs en arrivant ce matin en voyant qu'on a brûlé leur école. L'école, c'est vraiment un lieu sacré. On a renforcé les moyens de la police. Il y a encore eu des tournées supplémentaires l'autre nuit. Mais il y a plus de cent établissements scolaires sur le territoire de la ville de Charleroi. Je ne sais pas mettre des policiers partout toute la nuit".

De son côté, la ministre parle de "terrorisme". Découvrez sa réaction complète via le lien ci-dessous.

À lire aussi

Sélectionné pour vous

Commentaires

1 commentaire

Connectez-vous à votre compte RTL pour interagir.

S'identifier S'inscrire
  • Pourquoi auraient-ils peurs? Lorsque l'on voit les condamnations pour les auteurs des attentats qui ont touché nos concitoyens.

    Daniel Legros
     Répondre