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Yémen: après trois ans de succès, les rebelles Houthis sur la défensive

L'élimination du plus haut responsable politique rebelle au Yémen est un sérieux revers pour les Houthis et signifie que l'Arabie saoudite, qui les combat depuis 2015, reste fermement décidée à privilégier une solution militaire, estiment des experts.

Pour les Saoudiens et leurs alliés, "il n'y a pas d'autre option à ce stade", affirme à l'AFP Mustafa Alani, analyste au Gulf Research Center, en expliquant d'une part que les Houthis, soutenus par l'Iran, ne sont pas encore prêts à négocier, d'autre part que la coalition anti-rebelles réalise des progrès graduels mais tangibles sur le terrain.

"C'est certainement un revers majeur", ajoute Adam Baron, expert à l'European Council on Foreign Relations, en réagissant à l'annonce lundi de la mort de Saleh al-Sammad, chef du Conseil politique suprême de la rébellion, l'équivalent du président des territoires contrôlés par les Houthis.

Il est "tombé en martyr" avec six compagnons le 19 avril lors d'une frappe de la coalition sous commandement saoudien dans la province de Hodeida (ouest du Yémen), ont admis les rebelles en promettant de venger sa mort.

- "Personnalité raisonnable" -

C'est "le plus grand succès de la coalition jusqu'ici et cela indique que ses capacités de renseignements s'améliorent", poursuit M. Baron.

Il met toutefois en garde contre toute conclusion définitive. Dans le passé, les Houthis, qui contrôlent totalement la capitale Sanaa depuis 2015, "ont perdu des leaders clés, mais ont réussi à rebondir."

Un autre expert occidental souligne sous couvert d'anonymat que Saleh al-Sammad était une personnalité "raisonnable" qui avait déjà participé à des pourparlers. Sa mort éloigne "les perspectives de négociations utiles", poursuit cette source.

M. Alani ajoute pour sa part à la disparition de ce chef politique l'élimination récente d'"au moins 25 commandants militaires" de la rébellion. "C'est important. C'est un revers car ces personnes savent se protéger et leurs mouvements sont +top secret+. Elles savent qu'elles sont visées".

La coalition sous commandement saoudien a davantage fait parler d'elle ces trois dernières années au Yémen pour son surplace militaire et ses bavures contre des civils, comme celle de dimanche soir qui a fait au moins 23 morts et 65 blessés lors d'une fête de mariage dans la province de Hajja (nord-ouest).

Cependant, Mustafa Alani fait état de discrètes avancées des forces de la coalition sur le terrain.

"Il ne s'agit pas de grandes victoires, mais elles avancent très lentement" sur quatre fronts.

Selon lui, les objectifs sont "Saada" (nord), "capitale idéologique du mouvement des Houthis", issus de la minorité zaïdite (branche du chiisme), "Sanaa, la capitale politique" du Yémen, "Taëz (sud-ouest), la capitale économique", et "Hodeida", le grand port sur la mer Rouge.

"C'est très significatif qu'il y ait des progrès sur ces quatre cibles. Cela ne va pas très vite, mais c'est graduel".

- Sur la "défensive" -

Depuis six mois et un premier tir rebelle de missile balistique vers l'aéroport de Ryad, on assiste à une intensification des tirs de missiles par les Houthis sur l'Arabie voisine.

Ryad accuse le grand rival iranien de fournir ce type d'armements, ainsi que des drones, aux insurgés yéménites, ce que Téhéran conteste vigoureusement.

Les Houthis sont désormais "dans une position purement défensive. Ils tentent de garder le contrôle (de leurs territoires), ils affrontent des problèmes et la manière la plus simple (de répondre à la pression) est de tirer les missiles que les Iraniens leur ont fournis", avance M. Alani.

Opposés aux forces progouvernementales soutenues par la coalition sous commandement saoudien, les Houthis se sont longtemps sentis marginalisés sur la scène politique.

Ils comptent dans leurs rangs des combattants aguerris qui connaissent bien le terrain, en particulier les zones montagneuses du nord.

Le conflit, qui a fait quelque 10.000 morts et 54.000 blessés depuis 2015, a provoqué "la pire crise humanitaire du monde", selon l'ONU.

Il a pris progressivement une tournure de "guerre par procuration" entre l'Arabie saoudite sunnite et l'Iran chiite.

Le 17 avril, le nouvel émissaire de l'ONU pour le Yémen, le Britannique Martin Griffiths, a promis au Conseil de sécurité de lui fournir "dans les deux mois un cadre de négociations", mais ses prédécesseurs ont échoué à mettre fin à la guerre.

M. Griffiths s'est lui-même montré prudent en prenant note du "redoublement des combats" et d'informations sur des "mouvements de troupes".

Selon M. Alani, ce médiateur pourrait avoir "plus de chances" de réussite car, "en raison de l'augmentation de la pression militaire", les Houthis pourraient être davantage "disposés à un compromis politique".

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