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Florence Jeux, celle qui a dit oui au Bataclan

Lycéenne fan de punk-rock, Florence Jeux venait au Bataclan. L'hiver dernier, elle en prend la direction. Objectifs: faire revenir les artistes et leur "donner les manettes" de cette salle endeuillée par les attentats de 2015.

Rembobinage. A l'été 2018, les décideurs Jules Frutos et Olivier Poubelle, en place depuis 14 ans, s'en vont, cédant leurs parts au groupe Lagardère. "C'est Jérôme Langlet - président de la branche Lagardère Live Entertainment - qui m'appelle à la fin de l'été. Je croyais qu'il allait me proposer une création pour les Francos, mais il cherchait quelqu'un pour reprendre la direction", se remémore pour l'AFP Florence Jeux, alors directrice générale du prestigieux festival de La Rochelle.

"Assez surprise", elle a "pas mal réfléchi, ce n'est pas anodin". Qu'est-ce qui la convainc? D'abord, cette femme de 36 ans fait partie "des gens revenus très vite au Bataclan" après l'attaque terroriste.

"Une évidence" pour elle, mais pas forcément pour tous les artistes. "Mon challenge, c'est de les faire revenir" acquiesce-t-elle, alors que la fréquentation "est bonne, voire très bonne". Cet hiver, il y aura des têtes d'affiche, comme Jean-Louis Aubert (7 novembre-5 décembre), précédé par Kev Adams le 23 octobre.

Mais cette tête-chercheuse à la chevelure rousse est surtout là "pour un projet". Sur la forme, un nouveau visuel orne la façade, un "B" stylisé dans un cercle. "Ce changement n'est pas lié aux évènements d'il y a quatre ans" mais pour illustrer les mots "pluridisciplinaire" et "création".

- "Très belle carrière" -

Sur le fond, Florence Jeux a traqué "l'ADN d'une salle aux 160 années d'histoire liée au spectacle, avec des phases music-hall, théâtre, ciné, concerts: il ne faut pas mettre de barrière".

Le profil des "jeunes artistes aujourd'hui" l'a aussi nourrie. "Dès le départ ils sont réalisateurs, peintres, circassiens, danseurs, et pas seulement musiciens". L'idée, c'est une transversalité greffée au modèle "des grands théâtres nationaux fonctionnant avec des artistes associés à l'année".

Démonstration avec le danseur-chorégraphe Léo Walk, qui créé avec le Bataclan le Walk Fest, les 26 et 27 octobre, festival de musique et danse hip-hop.

Et les portes s'ouvrent désormais au street art, aux podcasts enregistrés en public ou à la... boxe thaï. "Ça cartonne", sourit Florence Jeux. "Dans un match de boxe, il y a une approche très rock". Et d'imaginer des "matches de boxe avec une touche musicale" ou encore "des concours d'éloquence sur un ring".

"Sa nomination, c'est une superbe évolution dans une très belle carrière. Et qu'il y ait plus de femmes à des postes de direction, ça me parle", se réjouit auprès de l'AFP Virginie Dubois, codirectrice du label Neuve.

Jérôme Langlet, qui voulait quelqu'un avec "un côté authentique, qui connaît le milieu artistique", confie à l'AFP que, dans son esprit, "choisir une femme, ça pouvait participer au changement, pour se projeter dans l'avenir après la tragédie".

- "Challenge" -

Retour sur l'itinéraire de cette "discrète", comme elle se présente, qui se déplace avec une béquille - "c'est permanent" dit-elle pudiquement. La musique, ça commence sérieusement à "16-17 ans". Clermont, sa ville natale, offre une belle "scène indé rock".

Elle "traîne, lycéenne, à la Coopérative de Mai", salle réputée, d'abord "comme spectatrice", avant de "distribuer des flyers". Bénévole sur les festivals, alors qu'elle est en "fac de psycho", elle bifurque vers une formation pointue aux métiers des musiques actuelles à Issoudun (Indre).

Aimantée par la "musique live", elle goûte "de fil en aiguille" à "la prod', au booking". Puis elle rencontre Gérard Pont, le boss des Francofolies, alors qu'elle développe "des jeunes artistes", comme Mesparrow, et fait "du management". "On s'est plutôt bien entendus". Un jour, lui qui "recrute de manière instinctive", l'appelle pour lui proposer la programmation alors qu'elle "travaille dans un centre culturel en Slovaquie": "+Si tu veux le job, il est pour toi+". Le lendemain, c'est train et avion. Elle a 28 ans. "J'ai super flippé, mais quand même accepté, je fonctionne au challenge". Le Bataclan en est un autre.

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