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Nicole Klein, démineuse de l'explosif dossier de Notre-Dame-des-Landes

"Une main de fer dans un gant de velours": à 66 ans, "Madame la préfète" des Pays de la Loire, Nicole Klein, s'est fait un nom en pilotant le désamorçage de l'explosif dossier de Notre-Dame-des-Landes, dans un mélange de concertation et de fermeté unanimement salué par le gouvernement.

Près de cinq mois après l'abandon du projet d'aéroport, la "préfète de Notre-Dame-des-Landes" doit régulariser lundi en préfecture quinze premiers projets agricoles déposés par des occupants de la ZAD. Un premier pas vers la "normalisation" du territoire longtemps qualifié par les autorités de "camp retranché".

Cette "préfète d'expérience", passée par tous les métiers au sein de la préfectorale après des débuts à la Documentation française et sa sortie de l'ENA, estime être "sur la bonne voie" dans le règlement de "cette histoire qui dure depuis des années". Reste le rétablissement de la circulation sur le site de 1.650 hectares.

Tous les ministres ayant défilé à Nantes et dans le bocage nantais ont loué son "travail délicat" ou son "infatigable énergie à écouter", le chef de l'Etat Emmanuel Macron évoquant sa "patience extraordinaire".

- "Très solide" -

"La force de Nicole Klein est de ne jamais abandonner. Elle a toujours privilégié la main tendue et le dialogue (...) même si les opérations d'expulsions l'ont parfois mise dans des positions délicates", commente une source au ministère de l'Intérieur. "Si elle n'était pas quelqu'un de très solide, ça aurait pu la briser", ajoute-t-elle.

"Peut-être parce que j'ai le sens du compromis, parce que je connaissais le dossier et les différents interlocuteurs, j'ai toujours eu l'impression que ma voix portait", confie à l'AFP Mme Klein, petit bout de femme énergique aux yeux bleu vifs et à la chevelure claire coupée courte.

Quand cette mère de trois grands enfants, Francilienne d'origine, prend ses fonctions à Nantes en mars 2017, nommée pour la troisième fois préfète de région, Notre-Dame-des-Landes ne lui est "pas inconnu". Elle est secrétaire générale de la préfecture de Loire-Atlantique en 2000, quand le gouvernement de Lionel Jospin relance le projet.

"Je savais que ce n'était pas une terre vide d'hommes et d'activités, donc il fallait ne pas être pris dans une conviction qui empêche d'agir", explique Mme Klein. Si sa carrière l'a amenée à gérer de nombreuses crises, du Vaucluse à la Normandie en passant par la Banque mondiale à Washington, elle est "frappée" par le côté "passionnel", voire "irrationnel", du cas Notre-Dame-des-Landes.

- "Susciter des vocations" -

Sa subite notoriété, elle l'acquiert lors de sa première visite médiatisée sur la ZAD, le 26 janvier. Pas échaudée par la rangée de pantalons baissés lors de son passage sur l'emblématique "route des chicanes", elle préfère évoquer "le bocage magnifique" avant de trinquer avec d'ex-opposants au projet dans un gobelet "Non à l'aéroport". Un "geste audacieux et de conciliation" pour les anti-aéroport historiques, mais qui provoque l'ire des pro-NDDL.

"Je n'ai pas bu un verre avec des voyous, mais avec un agriculteur qui allait récupérer ses terres et une association qui a pignon sur rue à Notre-Dame-des-Landes", s'étonne Nicole Klein, cible également d'"attaques d'une grande violence" de zadistes opposés à toute régularisation.

Elle assume avoir géré le dossier "avec autorité sans être autoritaire" et suivi "au pied de la lettre, avec des ajustements, du discernement" la feuille de route du Premier ministre Edouard Philippe. Elle avait mis un point d'honneur à n'expulser ni enfants, ni animaux.

"C'est quelqu'un de très abordable, avec qui il est très facile de communiquer. Mais il y a un vrai décalage entre ce qu'elle nous dit quand elle nous reçoit et ce qui se passe sur le terrain", souligne Marcel Thébault, agriculteur "historique" à Notre-Dame-des-Landes. "Elle nous a parlé à chaque fois d'interventions ciblées de la gendarmerie mais on a eu l'impression d'un éléphant dans un magasin de porcelaine, qui casse tout", déplore-t-il.

Si personne n'enviait sa place ces derniers mois, la préfète espère aujourd'hui avoir "suscité des vocations". "Ma fierté, c'est d'avoir donné l'image d'un métier riche, complexe, où les fonctionnaires prennent des décisions", conclut-elle en souriant.

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