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Affaire du petit Grégory: les époux Jacob remis en liberté, l'enquête fragilisée

Un revers qui ajoute à la confusion, 32 ans après le crime. La justice a remis en liberté, mardi, le grand-oncle et la grand-tante du petit Grégory, quatre jours seulement après leur mise en examen pour enlèvement et séquestration suivis de mort.

Après quatre jours de détention provisoire, Marcel et Jacqueline Jacob, mis en examen vendredi dans l'affaire du petit Grégory, ont été remis en liberté sous contrôle judiciaire mardi par la chambre de l'instruction de Dijon, a annoncé l'avocat de l'un deux. "La chambre de l'instruction (de la cour d'appel de Dijon, NDLR) a entendu nos arguments sur la faiblesse des charges, quand je dis la faiblesse je pourrais dire l'inexistence des charges qui pesaient sur les époux Jacob", a déclaré devant la presse, au sortir du palais de justice de Dijon, Me Stéphane Giuranna, qui défend Marcel Jacob, 72 ans.

Cette décision, d'application immédiate, constitue un sérieux revers pour les enquêteurs, et le parquet général qui avait requis le maintien en détention.

L'arrestation surprise du couple, mercredi dernier dans les Vosges, avait relancé l'affaire, jamais élucidée depuis la découverte du garçon de quatre ans, pieds et poings liés dans les eaux de la Vologne, le 16 octobre 1984. Mais elle ne l'avait pas résolue pour autant et la défense criait depuis à l'absence de preuves.

Les deux septuagénaires restent mis en examen pour enlèvement, séquestration suivis de mort. Ils n'avaient jamais été inquiétés jusqu'alors même si leurs noms apparaissaient au fil des 12.000 pièces du dossier: dans un arrêt de 1993, la cour d'appel de Dijon les avait au contraire disculpés.


L'expression 'le chef'

Avec eux, l'accusation pense avoir identifié les fameux "corbeaux" et selon elle, "il y a un élément qui associe ces actes, ces lettres, les appels téléphoniques, l'acte d'enlèvement et la mort de l'enfant", plusieurs personnes ayant concouru à la réalisation du crime.

Les soupçons se fondent sur des rapprochements graphologiques ou lexicaux, comme la récurrence de l'expression "le chef" pour désigner Jean-Marie Villemin, le père de Grégory, dont les auteurs auraient voulu se venger. Ce terme est notamment utilisé dans la lettre de revendication du meurtre, postée à Lépanges-sur-Vologne le 16 octobre 1984, semble-t-il avant même l'enlèvement de l'enfant d'après le cachet de la Poste. Signe que son auteur aurait joué directement un rôle.

L'expression fut aussi employée par Marcel Jacob, ouvrier, lors d'une altercation avec Jean-Marie Villemin, devenu contremaître, deux ans avant le drame. Me Giuranna ne voit là qu'une banale opposition syndicale, "pas un mobile pour assassiner un petit garçon, c'est délirant". Et "chef, c'est un mot que tout le monde employait" dans la famille, souligne Me Gary Lagardette, avocat de Jacqueline Jacob.

Le parquet général s'appuie aussi sur l'absence d'alibis "confirmés ou étayés", ce que conteste encore la défense. Trois décennies plus tard, les enquêteurs comptent s'employer à vérifier leurs emplois du temps au regard de leurs déclarations antérieures et en procédant à de nouvelles auditions.


"Dissiper les rumeurs"

Murielle Bolle, la belle-soeur de Bernard Laroche, premier suspect tué en 1985 par Jean-Marie Villemin, pourrait être entendue prochainement. En 1984, âgée de 15 ans, elle avait affirmé devant les gendarmes qu'elle était avec son beau-frère le jour du meurtre et avait assisté à l'enlèvement de Grégory, avant de se rétracter trois jours plus tard. "Compte tenu du climat actuel, qui ressemble étrangement à celui qui régnait dans ce dossier fin 1984, il me semble important que les doutes et les rumeurs soient rapidement dissipés", estime son avocat, Me Jean-Paul Teissonnière.

De vieilles plaies semblent en effet se rouvrir dans la famille. Samedi dans une interview à L'Est Républicain, Valérie, fille de Marcel et Jacqueline Jacob qui a depuis longtemps "coupé les ponts avec eux", n'a pas exclu la culpabilité de ses parents.

"Ce n'est pas possible que ces gens-là aient quelque chose à voir" avec le meurtre, avait rétorqué lundi Ginette Villemin, 61 ans, dont le défunt mari, Michel Villemin, oncle de Grégory, était très lié à Bernard Laroche, tout comme Marcel Jacob. Elle avait été placée en garde à vue la semaine dernière sans être mise en cause.

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