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Arnaud Donckele: "les plus beaux plats naissent des rencontres"

Consacré lundi soir chef de l'année par le Gault et Millau, Arnaud Donckele raconte que ses plats cultes, comme la liche (un poisson), sont nés de rencontres avec des gens simples ou des recettes oubliées.

Sa cuisine "complexe", mais faite pour plaire à tout le monde est "construite sur des sauces": "la mode est à l'épure et je suis allé à contre-pied de l'épure", confie à l'AFP le chef de 42 ans du restaurant La Vague d'Or à Saint-Tropez, trois étoiles au Michelin.

Il décrit sa cuisine comme un "pot-au-feu" où "vous cuisez 12 à 14 éléments ensemble". "Mais quand vous mangez une pomme de terre, elle a un goût d'une pomme de terre, la carotte d'une carotte, le navet d'un navet, le boeuf c'est du boeuf"...

Dans un plat, on "amène, on retire, on rajoute" pour atteindre un bon degré "de satisfaction et de bonheur" comme dans "Le Chopin de liche grillée à l'âtre façon Victor Petit" qui figure parmi "50 plats de grands chefs qu'il faut avoir goûté une fois dans sa vie" selon un livre récemment publié aux éditions de La Martinière.

- "Belge, né en Normadie, adopté en Provence" -

C'est un pêcheur de 72 ans qui a fait goûter à Arnaud Donckele dans un sandwich, la liche, ce poisson "qui arrive avec le thon" et est souvent mélangé avec ce dernier dans des conserves.

"J'ai mis six mois à comprendre la méthodologie de cuisson", raconte le chef.

Le reste de l'inspiration vient de Victor Petit, journaliste et critique gastronomique d'avant-guerre et de "sa salade de poisson blanc avec tomate, pomme de terre, anchois, origan ..."

"C'était une symphonie de goût extraordinaire, il l'a appelé Chopin".

"J'ai repris ces deux histoires, en rééquilibrant cette sauce avec de l'anchois fumé, liche grillée, tomates jaunes ananas, vinaigre d'oignons rouges avec du yuzu. On arrive à une sauce soyeuse, une caresse en bouche comme un drapé de soie".

"Les plus beaux plats ne peuvent se construire autrement qu'avec des rencontres avec des hommes ou avec des histoires", assure Arnaud Donckele.

D'origine belge, il a grandi en autarcie dans une ferme en Normandie et a été "adopté" en Provence.

En tant "qu'autodidacte" de cette région, il s'est senti obligé de faire "la cuisine provençale", mais aussi de chercher autre chose que "du poivron, de l'agneau, de l'ail, et de l'aubergine" pour "faire plaisir" à ceux qui font plus de 3.000 km pour manger chez lui.

- jardin à Saint-Tropez -

Celui qui rêvait d'être "cultivateur" avant de devenir cuisinier, a un jardin à Saint-Tropez depuis dix ans et un élevage de volailles et de lapins.

"Locavore" avant l'heure, il rejette cependant le discours radical sur le manger local et les saisons.

"Le restaurant est fait pour plaire à tout le monde. Chez moi, il y a une grande carte, pour respecter toutes les religions et tous les modes de consommation", souligne-t-il.

"J'essaie d'être le plus local possible, acheter à 60 km autour, je respecte cette règle à 70%".

"Les saisons, j'adore ce discours, mais au mois de juillet j'utilise les citrons - il n'y a pas de citrons au mois de juillet!".

"Quand tu es chef dans un palace tu as un client qui prend une chambre à un certain prix et veut des cerises, tu vas lui trouver les cerises qui viennent des Etats-Unis où c'est la saison! Ce sont des obligations commerciales".

Alors que son restaurant à Saint-Tropez est fermé d'octobre à mai, Arnaud Donckele prépare l'ouverture du Cheval Blanc Paris, à la Samaritaine, au printemps 2020 avec le concept des "sauces en premier lieu".

"Mon idée c'est de construire des sauces intemporelles, comme on construit des assemblages des cognacs. L'idée ce sera +aujourd'hui on a reçu de la lotte, c'est telle sauce+. Il y aura 40 créations", confie-t-il.

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