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Migrants: à Paris, des Afghans campent sous la neige

"Maintenant je vais essayer de dormir": au bord d'un canal parisien, Azam calfeutre les ouvertures de sa tente, en pestant contre la neige qui tombe depuis la veille sur le campement, essentiellement constitué d'Afghans.

Il est onze heures et les flocons recouvrent la soixantaine de tentes alignées des deux côtés du canal Saint-Martin, dans le nord de la capitale. A l'intérieur, les habits et chaussures sèchent mal. "Tout est mouillé", soupire Azam, en montrant ses tennis rangées dans un coin et la double épaisseur de chaussettes dont il s'est enveloppé les pieds.

En descendant le long des quais, les tentes s'égrènent, recouvertes de bâches pour certaines, de couvertures de survie pour d'autres. "Nous avons décompté 278 personnes le 2 février" autour du canal, dit Pierre Henry, directeur général de l'association France terre d'asile, en rappelant que cette zone "est historiquement un lieu de ralliement pour les migrants afghans".

Dehors, des hommes emmitouflés dans des couvertures et des parkas se pressent autour d'une bouteille thermos amenée par une voisine, Ilhem, qui distribue des gobelets de thé et du pain.

"Quand je suis sortie de chez moi ce matin, il faisait trop froid, je suis remontée pour préparer un petit-déjeuner. Je pensais qu'il y aurait du monde pour leur distribuer à manger, mais ce n'est pas le cas", explique-t-elle, dépitée de voir des gens dormir dehors à l'heure du plan grand froid déclenché par le gouvernement.

- Maraudes -

Dans les bureaux des autorités régionales, on assure que "les maraudes ont été intensifiées" pour les migrants avec "plus d'orientations en centres d'hébergement et plus de créations de places" dédiées. Cela renforcera les deux maraudes hebdomadaires déjà organisées, qui ont permis de mettre à l'abri "900 personnes en janvier".

Mais "on ne force personne", ajoute-t-on.

"Les réflexes peuvent être communautaires, si on ne prend pas l'ensemble du groupe, ils vont refuser", ajoute M. Henry, qui précise que "le campement a grossi depuis trois semaines".

Les tentes, comme les vêtements, ont été données par des associations ou des collectifs. "Sous celle-ci il y a deux personnes, quatre autres sous la grande... là un homme est arrivé hier, on lui a prêté une couverture", assure Haman, un homme au visage fatigué.

L'endroit, proche de la plateforme où sont distribués les précieux rendez-vous en préfecture pour une demande d'asile, attire depuis longtemps les migrants. En novembre 2016, il faisait partie de la zone où un campement de près de 4.000 personnes avait été évacué.

Au bord de l'eau, des hommes se réchauffent autour d'un feu. "La police est venue hier, ils nous ont dit que c'était interdit", ajoute Haman, qui saute du français à l'anglais, et parle aussi un peu allemand après un passage à Berlin. "Mais je n'ai pas froid. Je suis sportif, moi!"

Son voisin Ghoul, la veste de jogging largement ouverte sur son cou, approuve crânement: "en Afghanistan, on a de la neige jusqu'aux genoux".

Mais Ghoul a hâte de partir. Installé depuis trois mois au bord du canal, il attend son rendez-vous à l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) pour la fin février. "Ensuite, ils m'ont dit que j'aurai ma réponse en trois mois", dit-il.

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