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C’est fait: le Parlement wallon a voté pour faire suspendre les négociations européennes du fameux traité transatlantique

Les parlementaires wallons, réunis au sein de la Commission des affaires générales et des relations internationales ont adopté, lundi, une résolution appelant à la suspension des négociations menées dans le cadre du projet de partenariat transatlantique de commerce et d'investissement entre l'Union européenne et les Etats-Unis (TTIP). Les parlementaires PS et cdH ont voté en faveur de cette résolution alors que l'opposition MR s'est abstenue.

"Ce texte tombe à point nommé, au lendemain d'un week-end de mobilisation citoyenne contre ce traité et alors que les négociateurs semblent vouloir accélérer la cadence. Or, certaines conditions démocratiques, notamment en matière de transparence, ne sont pas réunies", a souligné André Antoine pour le cdH. Dans ce contexte, "une suspension des négociations s'impose afin de recalibrer les discussions. Cette suspension pourrait également permettre aux parlements des différents Etats de s'exprimer et à une étude rigoureuse, mesurant les conséquences du projet, d'être menée car nous commençons à avoir peur des chiffres unilatéraux", a poursuivi le président du Parlement wallon.

"Nous sommes convaincus que la résistance peut faire bouger les lignes. Nous avons donc décidé de résister", a de son côté indiqué la députée PS Olgra Zrihen en estimant que le "manque de transparence actuel constitue un véritable handicap". "Négocier avec les Etats-Unis: oui. Mais sous certaines conditions, dont le respect des normes sociales et environnementales", a-t-elle ajouté.

Quant au MR, il a pour sa part affirmé vouloir rester "dans une logique de négociations" et "adopter une attitude courageuse en faisant confiance aux négociateurs". "Une suspension des débats serait une fuite en avant et un aveu de faiblesse. Nous soutenons la poursuite des discussions tout en restant attentifs au respect des acquis sociaux, sanitaires et environnementaux", assure-t-on dans les rangs libéraux.


Ecolo voulait aller plus loin: la fin pure et simple des négociations

Ecolo, lui, demandait la fin pure et simple des négociations, estimant le projet actuel "inamendable". "La Commission européenne a reçu un mandat en juin 2013 pour négocier avec le gouvernement américain. Aujourd'hui, il est temps d’arrêter les frais car le TTIP représente une réelle menace pour nos démocraties, pour l'économie européenne et pour nos modèles de société", a ainsi estimé la députée verte Hélène Ryckmans. L'appel écolo à la fin des négociations n'a toutefois pas été suivi par les autres partis.


Les politiciens wallons de gauche dans la lignée des citoyens inquiets

Pour rappel, environ 2.000 personnes ont participé samedi à Bruxelles à la manifestation contre ce traité de libre-échange négocié entre l'Union européenne et les Etats-Unis (photos). Ce traité et d'autres accords similaires représentent, selon les manifestants, une menace pour le bien-être social, la sécurité du consommateur et la démocratie. "Avec le TTIP, les Etats-Unis et l'Union européenne veulent créer une vaste zone de libre-échange qui échapperait à toute forme de contrôle démocratique", dénonçait un activiste, Sébastien Franco. "Des multinationales auraient la possibilité d'attaquer les législations nationales en matières d'environnement, de santé, de sécurité alimentaire, etc, si elles estiment qu'elles menacent leurs profits. De tels litiges ne seraient pas traités devant les cours et tribunaux nationaux mais par une cour d'arbitrage privée, qui jusqu'à présent a toujours pris le parti des multinationales américaines."



Impossible au final de refuser des OGM de Monsanto, par exemple

La manifestation n'était pas seulement dirigée contre le TTIP (Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement) mais aussi contre d'autres accords de libre-échange comme le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement) entre le Canada et l'Union européenne. Pour les manifestants, les accords de ce type ne seraient favorables qu'aux multinationales. "L'accord NAFTA par exemple, entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique, s'est révélé catastrophique pour l'économie mexicaine et latino-américaine. Les citoyens et travailleurs ne retirent aucun avantage de ce genre d'accords. Au contraire, ces accords ne font qu'ouvrir la voie à la libéralisation et la commercialisation de secteurs comme les soins de santé et l'enseignement, ce qui ne peut être que néfaste". Le TTIP aurait aussi un effet catastrophique sur l'agriculture. "L'indépendance de l'agriculteur est menacée, nous allons tous finir sous la coupe de l'agro-industrie, avec toutes les conséquences que cela implique pour la sécurité alimentaire et les revenus des agriculteurs."


Une cinquantaine de communes wallonnes se sont déjà déclarées "zones hors-TTIP"

"Le TTIP est une attaque en règle contre la démocratie économique", avait déclaré vendredi Bruno Poncelet, porte-parole de la plateforme No Transat, lors d'une conférence de presse de la FGTB wallonne à Namur sur son impact sur les pouvoirs locaux et entreprises. Une cinquantaine de communes wallonnes ont signé une motion contre le TTIP. Plus d'un million et demi de citoyens européens ont signé la pétition "Stop TTIP" tandis que 150.000 ont répondu à la consultation populaire. "Tout n'est pas perdu. Le processus continue malgré tout. Nous relançons un appel aux 215 autres communes. Si demain, 250 communes wallonnes sont des zones hors-TTIP, nous pourrons avoir un impact sur les décisions aux autres degrés de pouvoir", a souligné Thierry Bodson, secrétaire général de la FGTB wallonne, membre de la plateforme.



Problèmes de santé, d'environnement... mais aussi d'emploi

Thierry Bodson a mis en évidence l'impact potentiel du TTIP sur la santé, l'environnement, mais aussi sur l'emploi. "La démocratie économique nous offre à tous des droits et des devoirs au travail. Or, via le TTIP, les multinationales veulent beaucoup plus de droits et beaucoup moins de devoirs, et veulent faire reculer la démocratie tout court", a quant à lui expliqué Bruno Poncelet.


Exemple concret: le Mexique n'a pas pu taxer les sodas!

Parmi les membres du réseau de gouvernance transatlantique, Bruno Poncelet a cité les noms de plusieurs géants de l'industrie alimentaire ainsi que de banques liées aux scandales financiers des subprimes ou Luxleaks. La mise en place d'une cour privée "Règlement des Différends entre Investisseurs et Etats (RDIE/ISDS)", permettra aux multinationales de déposer plainte contre les Etats, "mais jamais l'inverse". "En 2004, le Mexique a dû verser 66 millions d'euros de dommages et intérêts à une entreprise pour avoir voulu instaurer une taxe sur les sodas pour une question de santé publique", cite en exemple Bruno Poncelet.



Même si le traité ne concerne pas les domaines les plus décriés, l'Europe voudrait laisser la porte ouverte pour le futur

Enfin, si un Etat souhaite modifier une loi, il devra rendre des comptes aux autorités américaines et européennes mais aussi prévenir la firme privée sur laquelle elle aurait un impact potentiel, ajoute-t-il: "On va asservir la démocratie locale à la gouvernance internationale. Par ailleurs, dans un premier temps, la Commission européenne assure qu'il n'y aura pas de 'poulet javel', pas d'OGM, etc. Mais un des objectifs de cet organe est de poursuivre, après l'accord, l'instauration des éléments qui ne seront 'pas là' au moment de la signature."

Créée en 2011, la plateforme No Transat rassemble plus de 55.000 citoyens et près de 300 organisations.

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